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Les nouvelles familles à l’école de l’injustice

Lundi 27.06.2011
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Les façons de « faire famille » aujourd’hui sont multiples et largement recensées dans les statistiques aussi bien que dans la société. Pourtant, les rôles parentaux restent et demeurent profondément genrés. Pourquoi ?

Par Marianne Modak, Haute Ecole de travail social et de la santé, Lausanne [1]

D’aussi loin qu’on l’étudie, la famille se caractérise autant par ses métamorphoses que par sa stabilité. Ce double processus de transformation et de continuité atteste de l’adaptabilité, de la résistance, ainsi que de l’innovation d’une institution face à son environnement (Goody, 2001) [2]. Aussi rapides et profonds puissent-ils apparaître, les bouleversements actuels de l’institution familiale ne constituent donc pas une spécificité de notre époque, ni la préfiguration de la « fin de la famille » comme certains ont pu le prédire dans les années septante. En revanche, ces profondes transformations alimentent, sur le plan des politiques sociales notamment, une question récurrente de l’étude sociologique de la famille : l’efficacité des nouvelles configurations familiales dans le maintien de l’ordre social et la protection des individus, l’enfant en particulier (Cicchelli-Pugeault & Cicchelli, 1998).

De plus, ce qui, me semble-t-il, caractérise l’histoire de la famille occidentale depuis une quarantaine d’années, c’est le contraste saisissant existant entre deux ordres de normativités, deux systèmes de références a priori opposés, qui orientent maintenant les manières de « faire famille ». D’un côté, le pluralisme des styles d’interactions et des modalités de régulation de l’intimité atteste de l’importance des prérogatives individuelles dans la définition des rapports entre le groupe familial et ses membres – hommes, femmes, enfants – estimés formellement égaux. D’un autre côté, la division sexuelle du travail qui continue de marquer profondément la prise en charge des responsabilités domestiques et de l’emploi, témoigne quant à elle de la force du système de genre dans la reproduction des inégalités par la famille, l’on tend d’ailleurs à minimiser en qualifiant le travail des mères de « normal », relevant de leurs qualités « naturelles ».

Vivre en famille, en constituer une, cela apparaît maintenant assez fortement conditionné par les interactions conduites dans la sphère privée, les institutions publiques (juridiques ou religieuses) tout comme les systèmes de parenté ayant perdu leur légitimité pour définir la « bonne » famille, la « bonne » parentalité. Comme le souligne un sociologue français, « les normes de la vie familiale ne se présentent plus (ou de moins en moins) comme des prescriptions, des règles de conduite à suivre sous peine de sanctions, légitimées par un magistère moral. Elles s’apparentent à des conseils, recommandations, persuasions » (Déchaux, 2010) parmi lesquels les individus font des « choix ».

Qu’est-ce qu’un « bon » parent « légitime » ?

Or, ces recommandations sont hétérogènes, relatives aux situations. Leur surabondance, associée au fait qu’aucune ne semble prévaloir, peut être désécurisante. Qu’est-ce qui légitime le « bon » parent et quelle est la « bonne » manière de l’être ? Certaines formes familiales sont-elles positives ou néfastes pour l’enfant ? Il n’existe pas, plus, de réponse univoque à ces questions. Ainsi, le droit prend-il acte des différentes configurations familiales, mais, selon la juriste bâloise Andrea Büchler, il ne place maintenant essentiellement sa mission prioritaire que dans la protection des droits de l’enfant (Büchler, 2008).

J’illustrerai mon propos en prenant pour référence l’exercice de la parentalité – définition du rôle parental, attribution du travail éducatif, du soin et de l’autorité – qui lui aussi se décline désormais dans les marges de la régulation juridique, lorsque par exemple, un adulte jouant le rôle de parent ne l’est pas légalement. Les situations ne manquent pas : famille « recomposée » au sein de laquelle le lien entre le beau-père et le bel-enfant, ni a fortiori les droits et devoirs associés, ne bénéficient d’une définition légale (Meulders-Klein & Théry, 1993) ; famille « homoparentale » dans laquelle un seul des deux parents (le parent adoptif et/ou biologique) dispose d’une reconnaissance légale ; parents séparés devant faire l’apprentissage semé d’embûches du « départage » de l’enfant (Modak & Palazzo, 2006). Toutes ces situations attestent, comme le disait André Cherlin, de l’incomplétude de l’institution familiale contemporaine, que les parents en particulier doivent assumer par un incessant travail de bricolage et d’invention des modalités de leur vivre ensemble.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’invention est limitée, puisqu’elle ne semble pas pouvoir faire mieux qu’écorner la division sexuelle du travail. Toutes les enquêtes montrent que le travail de soin et d’éducation reste majoritairement assigné aux femmes, comme attribut de leur rôle maternel.

Les incertitudes provoquent des malentendus

Dans ce contexte d’incertitude, le travail de soin et d’éducation effectué auprès d’un enfant, le fait de se responsabiliser et de se soucier de son bien-être, sont des critères majeurs de désignation du « bon » parent. Chez les mères pour qui ce rôle est quotidien, cela légitime souvent que leur soit attribuée la garde et l’autorité parentale dans les divorces : la parenté « domestique » vient en quelque sorte renforcer la filiation sociale. Dans les autres cas, le fait de prendre soin au quotidien sur la base d’un travail domestique continu ou discret ne semble ouvrir à aucune prérogative (Weber, 2005) et les malentendus à ce sujet sont lourds de conflits et de luttes de pouvoir entre les sexes dont les enfants sont les victimes. Les remous occasionnés par la récente décision de la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga de différer le vote par le Parlement et la promulgation de la loi sur l’autorité parentale conjointe au divorce tant que la question des pensions alimentaires et de la garde ne sera pas réglée équitablement, témoignent de ces luttes de pouvoir.

Les problèmes que j’ai brièvement esquissés sont immenses et ils ne se résoudront pas en niant l’empreinte du système de genre sur leur reproduction dans la famille. Etonnamment, l’individualisme ne semble pas trop contrarier la division sexuelle du travail. Elle rend les femmes prioritairement responsables de la sphère domestique et les hommes de la sphère professionnelle avec, pour conséquences, le surcroît de travail quotidien, les avantages sociaux moindres liés à des emplois à temps partiels, les risques encourus en cas de divorce pour celles à qui échoit la charge du domestique.

Un enjeu foncièrement politique

Ces éléments contredisent le diagnostic fréquemment posé sur les familles contemporaines. Car leur problème est sans doute moins celui, moral, de la diversité de leurs formes et de leurs styles de vie, que celui, politique, de l’occultation de la pérennité du système de genre et de son coût pour les femmes et les jeunes générations. Dans la mesure où on y éduque des enfants, la famille organisée selon le genre, reste une « école de l’injustice au quotidien » pour les jeunes générations, c’est-à-dire une institution injuste (Moller Okin, 2008).

Photo-vignette extraite du film « Mon père est une femme de ménage »

[1] Je remercie mon collègue et ami Pascal-Eric Gaberel pour sa lecture critique et attentive de ce texte.

[2] Bibliographie

  • Büchler, A. (2008). L’amour, c’est l’instant, le mariage c’est l’ordre. Horizons, juin, 28-30.
  • Cicchelli-Pugeault, C., & Cicchelli, V. (1998). Les théories sociologiques de la famille. Paris : La Découverte.
  • Déchaux, J.-H. (2010). Ce que "l’individualisme" ne permet pas de comprendre. Le cas de la famille. Esprit, Juin.
  • Goody, J. (2001). La famille en Europe. Paris : Seuil.
  • Meulders-Klein, M.-T., & Théry, I. (1993). Les recompositions familiales aujourd’hui. Paris : Editions Nathan.
  • Modak, M., & Palazzo, C. (2006). Etre parent après une séparation : analyse des processus de « départage » de l’enfant. Revue suisse de sociologie, 31 (2), 363–381.
  • Moller Okin, S. (2008). Justice, genre et famille. Paris : Flammarion.
  • Weber, F. (2005). Le sang, le nom, le quotidien. Une sociologie de la parenté pratique. Paris : Aux lieux d’être.

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