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Les hommes : nouvel objet de recherche

Mardi 05.03.2013
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Les études des « masculinités » sont longtemps restées marginales en Europe. Depuis quelques années, ce domaine de recherche gagne du terrain dans les universités. Mais à quoi fait référence le concept des « masculinités » ?

Par Isabelle Zinn, doctorante en sociologie et assistante diplômée, Université de Lausanne

Du 25 au 27 février 2013 ont eu lieu à l’Université de Lausanne des journées consacrées aux études des « masculinités » [1] avec notamment Michael Kimmel, professeur de sociologie à la State University de New York, et l’un des chercheurs les plus renommés dans le domaine de la sociologie des masculinités (Masculinities Studies). Rédacteur en chef de la revue interdisciplinaire Men and Masculinities, ses domaines de recherche comprennent l’homophobie, les théories féministes, la construction des « masculinités », la pornographie ou encore l’extrême droite. M. Kimmel est également représentant de l’organisation pro-féministe NOMAS (National Organization For Men against Sexism) qui promeut l’égalité entre les sexes en favorisant une conception progressiste des masculinités. Michael Kimmel a publié et édité d’importants ouvrages dans ces domaines, dont The Gendered Society (2011 [2009]), Men’s Lives (2010 [1989]) et Changing Men : New Directions in Research on Men and Masculinity (1996 [1987]).

Le champ d’études des « masculinités » s’est développé dans les années 1980 dans le monde anglo-saxon, notamment aux Etats-Unis et en Australie. Comme leur nom l’indique, les « men’s studies » ou « masculinities studies » se donnent pour objet de recherche les hommes. Le concept des « masculinités » fait référence à une construction sociale, culturelle et historique du groupe social que constituent les « hommes ». Toujours utilisé dans sa forme plurielle, il met l’accent sur leur diversité. Parler de masculinités, c’est parler d’une construction et d’une distribution de traits sociaux et de pratiques identifiés comme relevant du « masculin », mais ce n’est nullement se référer pour autant à une identité de genre acquise une fois pour toute et par tous les hommes. Il s’agit d’un concept fluide qui prend différents sens selon les contextes sociaux. Appréhender les masculinités dans leurs multiplicités implique de s’intéresser aux rapports de pouvoir au sein du groupe des hommes, et donc aux processus de hiérarchisation qui ont lieu entre les individus de même sexe.

Penser les hommes revient également toujours à prendre en compte d’autres appartenances sociales qui caractérisent les individus, telles que la classe sociale, l’appartenance ethnique (race), l’orientation sexuelle, l’âge ou encore le milieu social. Michael Kimmel a illustré ce cas de figure dans sa conférence inaugurale en donnant l’exemple d’un homme de 85 ans, d’origine afro-américaine, homosexuel et vivant à Chicago et un homme de 19 ans, « blanc », hétérosexuel et vivant en milieu rural. A l’exception de leur appartenance à un même sexe, ces deux individus n’ont probablement que bien peu de points communs. C’est ainsi que M. Kimmel constate qu’il est important de ne pas enfermer les hommes dans un groupe supposé homogène, prétendant par là que tous les individus qui en font partie partagent les mêmes attributs et détiennent le même pouvoir. Cette perspective s’oppose aux approches essentialistes qui postulent une seule masculinité (ou féminité) et revendiquant une conception biologisante des catégories et des appartenances de sexe. Elle permet par ailleurs de reconnaître la diversité au sein du groupe des hommes au lieu d’insister sur les seules différences sociales entre les sexes.

Les hommes, sujet universel et neutre ?

Un des principaux apports de la recherche sur les masculinités à la connaissance scientifique est d’avoir contribué à documenter la manière dont les sciences sociales et humaines se sont longtemps penchées sur le groupe des hommes en le traitant comme un sujet universel et neutre. Cette manière de faire a eu pour conséquence que l’appartenance sexuée des hommes a été effacée et que, lorsque les analyses portaient sur des expériences spécifiquement masculines, elles ont pu prétendre apporter des éclaircissements sur la société dans sa globalité. C’est en suivant ce constat que Michael Kimmel souligne sans relâche l’importance de rendre le genre visible aux yeux des hommes (make gender visible to men), ceci afin de déconstruire le privilège invisible (invisible privilege) dont tire profit le groupe social des hommes.

Si les hommes en tant que groupe social tendent à détenir un pouvoir sur le groupe des femmes, il est important de reconnaître que ce pouvoir social ne se traduit pas forcément en un pouvoir individuel que chaque homme aurait sur n’importe quelle femme. C’est bien dans ce décalage que résident des tensions importantes : l’image idéologique que renvoie la société aux hommes est celui d’une personne forte, courageuse, en contrôle, et « masculine » qui sait s’affirmer. Un « vrai » homme est censé correspondre à cette image et si cela n’est pas le cas, c’est qu’il aurait échoué à construire sa masculinité (Kimmel, 2011). Un homme faible, dépossédé de sa « masculinité » n’est donc pas un « vrai » homme.

Le concept de « masculinité hégémonique » (Carrigan, Connell, Lee, 1985 ; Connell 1987 [2]) permet de mieux comprendre les processus de hiérarchisation et de marginalisation des masculinités et de souligner les tensions internes à la catégorie « hommes ». Le concept apparaît dans les années 1980 en Australie dans le cadre d’enquêtes sur les inégalités sociales à l’école et le rôle des hommes dans l’organisation du travail productif (Connell, Messerschmidt, 2005). Le concept fait référence à la façon la plus valorisée d’être un homme à une époque donnée et les hommes se mesurent à l’aune de cette figure idéalisée. Autrement dit, il s’agit d’un mécanisme par lequel certaines catégories d’hommes imposent leur domination aux femmes, mais également à d’autres hommes, considérés comme marginaux et subordonnés. Si ce prototype d’hommes ne reflète pas la réalité – bien peu d’hommes correspondent effectivement à ce modèle –, il devient le modèle de référence et se propage sous la forme d’une image hégémonique.

Les masculinités s’articulent de manière distincte selon différents facteurs, mais elles se construisent toujours en relation avec ce qui est considéré comme relevant du « féminin ». Selon M. Kimmel, en effet, il n’y aurait guère de définition universelle et consensuelle des masculinités ; elles se constituent toujours en s’opposant à la « féminité ». Être un homme serait tout sauf être féminin, et l’angoisse première du groupe des hommes résiderait dans le fait d’être considérés comme efféminés. La conception hégémonique de ce que doit représenter un homme en société est diamétralement différente de ce qui est attendu de la part des femmes. Dit autrement, les garçons « restent des garçons » (boys will be boys).

La crise des garçons à l’école, mais de quels garçons ?

Le but de M. Kimmel est de déconstruire ce discours hégémonique, qui enferme hommes et femmes dans des catégories homogénéisantes, et qui ne rend pas compte des multiples formes que prennent les masculinités et féminités. Dans sa conférence intitulée « What about the boys ? The Boy Crisis in Schools », M. Kimmel a thématisé l’apparente crise des scolarités masculines. Cette crise se traduirait selon certaines sources comme suit : les garçons sont de moins en moins nombreux à poursuivre des études, ils sont de moins en moins performants et ont de plus en plus de problèmes comportementaux et émotionnels.

Afin de contrer les discours masculinistes qui propagent « une guerre contre les garçons et les hommes » supposément initiée par les mouvements féministes aux Etats-Unis, M. Kimmel reprend et discute plusieurs arguments avancés. Il examine par exemple l’affirmation selon laquelle les garçons ont de moins en moins tendance à entreprendre des études. S’il est vrai que, aux Etats-Unis, 59% des étudiant·e·s sont des femmes, une investigation plus poussée montre cependant que les étudiants hommes qui échouent appartiennent principalement aux classes sociales inférieures, et qu’ils sont d’origine afro-américaine et « latino ». Autrement dit, il s’agit davantage d’un problème de classe et d’ethnicité que de sexe.

Une des explications de l’« échec scolaire » des garçons avancée par la rhétorique masculiniste est le manque d’enseignants de sexe masculin et l’environnement féminisé de l’école - instauré par les femmes, notamment par le biais de méthodes d’enseignement « féminines ». La doxa féministe pathologiserait les garçons et leur préférence « naturelle » pour des « jeux brutaux » et ignorerait que l’on « doit » éduquer les garçons différemment des filles. M. Kimmel objecte à cet argument qu’il n’y a aucune évidence montrant que le sexe des enseignants a effectivement un impact - qu’il soit négatif ou positif - sur l’attitude et la réussite des écoliers. Il souligne également que le fait de présupposer que les garçons, en raison de leurs « spécificités », demandent un encadrement distinct revient à adopter une conception biologisante qui les enferme dans des catégories préétablies et ne les aide pas réellement à faire face aux problèmes.

Le département de la State University de New York auquel appartient Michael Kimmel vient de créer le tout premier centre consacré exclusivement à l’étude des masculinités. Partant de l’hypothèse qu’une égalité entre les sexes est bénéfique pour tout le monde, hommes et femmes confondus, l’objectif du centre sera de promouvoir l’égalité entre les sexes et de fournir les connaissances permettant de comprendre et d’analyser les discours masculinistes et antiféministes qui propagent l’idée d’une « crise des masculinités ». De même, le centre vise à mettre en évidence le pouvoir normatif et idéologique des discours qui perpétuent des stéréotypes, maximisent les différences entre femmes et hommes et minimisent celles qui sont présentes au sein du groupe des hommes [3].

[1] Les journées d’étude ont été conjointement organisées par le CEG-Liège de l’Université de Lausanne, le Programme doctoral CUSO en études genre ainsi que par le comité de recherche sur le genre de la Société suisse de sociologie.

[2] Bibliographie :
- Carrigan T., Connell B., and Lee J., 1985, "Toward a New Sociology of Masculinity", Theory and Society, n°14, pp. 551-604.
- Connell R. W., Messerschmith J., W., 2005, "Hegemonic Masculinity. Rethinking the concept", Gender & Society, n°19, pp. 829-859.
- Kimmel M., 2011, "Masculinity as Homophobia. Fear, Shame, and Silence in the Construction of Gender Identity", in Ore T., Eds, The Social Construction of Difference and Inequality : Race, Class, Gender and Sexuality, New York, McGraw-Hill, pp. 134-151.

[3] Dans le cadre de sa thèse de doctorat, Isabelle Zinn mène une enquête ethnographique portant sur la construction des « masculinités » et des « féminités » dans deux métiers ségrégués selon le sexe, celui des bouchers/ères et des fleuristes.

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