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La place des femmes dans la musique

Vendredi 03.06.2016
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La musique n’est-elle qu’une combinaison de sons ? Non, c’est aussi un domaine où sont façonnées des constructions de genre et une répartition des tâches. Eclairage sur la condition des femmes dans le milieu musical.

Par Mathilde Romanens, étudiante de la faculté des lettres à l’Université de Lausanne

Cet article vise à montrer comment la musique sert et construit l’ordre du genre, au même titre que dans les autres sphères professionnelles [1]. La division sexuelle du travail musical provoque une ségrégation horizontale, différenciant les rôles et reléguant les femmes à certains domaines spécifiques tels que le chant ou le piano. Elle provoque aussi une discrimination verticale limitant leur accès aux postes les mieux placés. Comment ce construisent ces rôles différenciés et les ségrégations qui en découlent ? Les mêmes mécanismes sont-ils à l’œuvre dans la musique classique et dans un style de musique populaire comme le jazz ?

Au fil des siècles, plusieurs théories ont défini les instruments de musique convenables à la nature féminine (Launey, 2008). Déjà durant l’Antiquité, l’instrument à vent est considéré comme impudique car il enlaidirait le visage des femmes. Un prête allemand exprime, en 1783, son malaise à observer une femme jouer du violon parce qu’elle prendrait des positions « gênantes ». Cet instrument ne serait pas adapté à ses formes et il conseille aux femmes d’en rester au piano où la posture est plus neutre. Quant aux cuivres, ils rappelleraient l’ordre militaire et feraient partie du « jeu en force » (Willener, 2002) de par leur puissance.

Orchestre classique : avancées et résistances

Les hommes ont longtemps entravé la participation des femmes par des obstacles institutionnels, notamment en leur refusant l’accès à une formation musicale et à la pratique d’un instrument dans la sphère publique (Ravet, 2003). Un changement s’opère dans la seconde moitié du XXe siècle : les écoles de musique s’ouvrent aux filles, le droit d’exercer la profession d’enseignante, d’instrumentiste, puis de musicienne d’orchestre dans la sphère publique se concrétise et les différentes classes d’instruments sont accessibles aux femmes dans les conservatoires.

Aujourd’hui, la part des femmes s’est accrue dans les orchestres et cela notamment grâce à l’utilisation du paravent, empêchant de voir l’interprète, adopté lors des auditions. Néanmoins, la division sexuelle du travail reste une constante. Les femmes accèdent rarement au poste de cheffe d’orchestre. Si elles deviennent instrumentistes [2], elles seront d’avantage présentes parmi les instruments à cordes plutôt qu’avec les cuivres ou les instruments à vent. Ce n’est d’ailleurs pas anodin si le pupitre des cordes, celui où les femmes sont les plus nombreuses, est aussi celui où les places de solistes sont plus rares. Les femmes sont donc plus ancrées dans le rôle d’accompagnement tandis que les hommes acquièrent plus de responsabilités et un plus grand pouvoir de décisions sur les créations (Ravet, 2003).

Concernant la division verticale, les hommes musiciens connaissent un taux plus élevé de professionnalisation. Ils sont régulièrement assignés à des postes prestigieux, avec de plus hauts revenus. Les femmes se tournent plutôt vers l’enseignement, ce qui leur offre des salaires moins élevés et des emplois à temps partiel. Les femmes connaissent néanmoins un plus grand taux de professionnalisation dans les instruments à clavier ou à la harpe. Mais la plupart du temps, ces instruments débouchent seulement sur l’enseignement. L’exclusion des femmes des métiers musicaux professionnalisant les plus prestigieux se joue donc déjà lors de leur formation : les jeunes filles verront leurs « ambitions freinées et canalisées vers le professorat » (Ravet, 2002).

Un cas particulier : la chanteuse de jazz

Ces mécanismes de discrimination se retrouvent-ils dans le jazz ? L’enquête de Marie Buscato (2003) sur les musiciens de jazz français montre que la division sexuelle du travail s’opère aussi par une double ségrégation : les femmes sont reléguées à un rôle précis dévalorisé, la chanteuse, tandis que 95% des musiciens sont des hommes. Dans les milieux du jazz, les musiciens hommes appartiennent souvent à plusieurs réseaux. Ces relations leur permettent de gérer l’instabilité de leur emploi et de jouer dans divers groupes. Les chanteuses sont généralement exclues de ces réseaux et ne sont pas appelées à chanter en tant que sidewomen dans d’autres formations. Cette exclusion augmente les difficultés à s’insérer sur le marché du travail.

Mais pourquoi les chanteuses sont-elles dévalorisées ? Des musiciens affirment que le jazz vocal est un style commercial avec un répertoire non créatif. De plus, les connaissances musicales des chanteuses sont jugées inférieures, ce qui légitime leur non-intégration. Par ailleurs, la plupart des jazzmen considèrent la mélodie chantée comme une dégradation du jazz pur, sans valeur en comparaison du travail de compositions instrumentales et d’écritures rythmiques. Le rôle du chant se borne à mettre en valeur les compositions des musiciens et n’est pas considéré comme une qualification à part entière mais comme une expression naturelle de féminité.

Jazz et musique classique : les similitudes

Dans le jazz comme dans la musique classique apparaissent donc les ségrégations. Une différenciation sexuée des rôles et des tâches s’inscrit dans la naturalisation des qualités dites féminines : on relie les femmes à la grâce et à des qualités d’écoute. Au contraire, les hommes sont vus comme des individus actifs, associés à la technique et à la virtuosité. Ces différences de nature sont présentées comme des évidences définitives et servent à légitimer privilèges et discriminations.

Le corps. Dans le cas de la musique classique, le rapport entre corps et instrument s’inscrit dans une différenciation des rôles même s’il n’y a aucun argument physiologique valable : selon Ravet, les femmes doivent rester gracieuse, leur jeu doit générer peu de souffle, de salive et de transpiration. De leur côté, les hommes doivent exprimer force et puissance. Dans le jazz, le rapport entre corps et chanteuse est aussi fortement présent puisqu’on détermine à l’égard des chanteuses des attentes basées sur « des stéréotypes corporels et naturels de la féminité ». Il y a donc, à travers ces constructions, une définition sociale de ce que sont la virilité et la féminité.

Le statut. Dans les deux styles musicaux, des processus de soutien semblent nécessaires aux femmes afin d’accéder à leur statut. Beaucoup de chanteuses ont un conjoint musicien jouant un rôle de médiation et d’insertion. Dans la musique classique, ces soutiens sont apportés par la confiance en soi, le soutien familial, des figures servant de modèle comme un parent musicien/ne par exemple. Des stratégies sont mises en place par les femmes afin d’être mieux respectées, notamment en adoptant des comportements socialement masculin. Dans le jazz, les chanteuses devront « se comporter comme des hommes afin d’être reconnues ». Quant à la musique classique, une stratégie consiste à « neutraliser les marques de féminité en se masculinisant » (Buscato, Ravet).

Les qualifications. Dans l’enquête de Marie Buscato, un batteur de jazz affirme : « A la limite, un instrumentiste qui joue bien peut passer pour un grand artiste. Pour une chanteuse, il faut plus. » Dans la même idée, Hyacinthe Ravet remarque que la surqualification est une condition nécessaire aux femmes afin d’intégrer un orchestre, mais pas forcément afin d’acquérir un poste à responsabilités, ce à quoi Alfred Willener consent lorsqu’il affirme qu’« une candidate musicienne doit être deux fois meilleure qu’un candidat musicien pour décrocher le même poste ».

La création artistique : un pouvoir

La féminisation des métiers musicaux opère une modification dans le partage et la création des connaissances, dans les responsabilités, mais surtout, dans la répartition du prestige et du pouvoir. Christine Bard définit la création artistique comme « un pouvoir, peut-être pas celui de changer le monde, mais de changer la vision du monde et, là comme ailleurs, le pouvoir tend à rester un monopole masculin ».

Dans le cas de la musique classique, des mutations sont en cours par la professionnalisation croissante de musiciennes. Mais mixité n’est pas synonyme d’égalité. Ainsi, Alfred Willener (2002) décrit la place des femmes dans les orchestres comme une « ascension sociale sur un escalator descendant ». Il souligne que plus les femmes s’élèvent à des postes prestigieux, plus la profession d’instrumentiste d’orchestre perd de sa notoriété [3]. Dans le cas de la musique populaire, grâce aux lieux musicaux variés qui se développent, chanteuses et musiciennes semblent gagner en visibilité et une nouvelle génération de collectifs de musiciennes et de chanteuses se font actuellement entendre, notamment en France (Prévost, Ravet 2007).

Les récentes études genre consacrées à la musique mettent en lumière ces enjeux symboliques. Favoriseront-elles un changement pour que les femmes soient socialement, musicalement et financièrement mieux reconnues ?

Références :

  • BUSCATO, Marie, « Chanteuse de jazz n’est point un métier d’homme. L’accord imparfait entre voix et instruments », Revue française de sociologie, Volume 44, p. 35-62, 2003, en ligne
  • LAUNEY, Florence, « Les musiciennes : de la pionnière adulée à la concurrente redoutée. Bref historique d’une longue professionnalisation », Travail, genre et sociétés, Numéro 19, Janvier 2008, p.41-63, en ligne
  • PREVOST-THOMAS, Cécile, RAVET, Hyacinthe, « Musique et genre en sociologie », dans Agnès Fine, Mathilde Dubesset, Clio, Femmes, Genre. Histoire, Paris, Editions Belin, 2007, p. 175-198, en ligne
  • RAVET, Hyacinthe, « Féminin et Masculin et musique, dynamiques identitaires et rapports de pouvoir », dans Green Anne-Marie, Ravet Hyacinthe, L’accès des femmes à la l’expression musicale, Paris, L’Harmattan, 2002, p. 225-246
  • RAVET, Hyacinthe, « Professionnalisation féminine et féminisation d’une profession : les artistes interprètes de musique », Travail, genre et sociétés, Numéro 9, 2003, p. 173-195, en ligne
  • WILLENER, Alfred, « L’accès des femmes instrumentistes aux orchestres symphoniques » dans Green Anne-Marie, Ravet Hyacinthe, L’accès des femmes à la l’expression musicale, Paris, L’Harmattan, 2002, p. 111-120

[1] Cet article résulte d’un travail réalisé dans le cadre du cours « Introduction aux études genre et théories féministes » de Nadia Lamamra à l’UNIL.

[2] Métier qui reste néanmoins, dans une majorité des cas, occupé par des hommes

[3] Les orchestres les plus prestigieux emploient un nombre quasi nul de femmes

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