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Les aînés vivant seuls utilisent leur pouvoir d’agir

Lundi 15.08.2016
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Dans la vie quotidienne à domicile, les personnes très âgées se révèlent astucieuses. Une recherche vaudoise montre qu’elles développent des ressources insoupçonnées pour contourner leur vulnérabilité.

Par Maria Grazia Bedin, professeure HES associée, Marion Droz-Mendelzweig, professeure HES ordinaire, Catherine Piguet, professeure agréée, Haute Ecole de Santé La Source, Lausanne

L’augmentation du vieillissement amène les politiques de santé et les instances professionnelles à se préoccuper du maintien de l’autonomie des personnes âgées dans une optique de soutien de leur qualité de vie tout en évitant ou en retardant un placement en maison de retraite. Nous avions mis en évidence, dans une précédente recherche [1], que des personnes âgées vivant seules à domicile dissimulent leurs difficultés, souhaitant préserver leur autonomie et l’image donnée à leur entourage, et ce faisant, elles prennent des risques. Comprendre plus finement ce qui préside aux choix des personnes âgées face aux risques encourus et perçus par elles, tel a été le but de la deuxième étude.

La recherche s’est déroulée de 2013 à 2015 et elle a été effectuée en partenariat avec l’Association vaudoise d’aide et de soins à domicile. Vingt personnes âgées de 80 à 98 ans, usagères des services de soins à domicile ont été interrogées. La plupart des personnes rencontrées avaient des handicaps moyens à sévères affectant leur vie quotidienne (douleurs chroniques, difficultés de mobilisation, double amputation pour deux d’entre elles, problèmes oculaires). Une approche qualitative basée sur la technique des entretiens d’explicitation a été choisie. Initié par Vermersch (1997), l’entretien d’explicitation part de la subjectivité du sujet et vise à mettre en évidence son point de vue en première personne en s’intéressant à son vécu de l’action. Son but n’est pas d’identifier des représentations déjà construites ou des discours sur un vécu en général, mais d’accompagner un sujet vers des prises de conscience des aspects implicites d’une action ou d’une situation vécue.

Dans notre étude, l’entretien d’explicitation a été orienté sur le récit d’un risque concret, vécu par la personne âgée et identifié par elle-même.

Solitude et finitude : des raisons d’agir

Interrogées sur les risques qu’elles considèrent encourir et sur ce qu’elles sont amenées à faire pour s’en prémunir, les personnes âgées montrent que leur quotidien n’est pas dominé entièrement par du renoncement. Si de l’angoisse et de la tristesse pointent certes dans leurs récits, les personnes se montrent néanmoins actives en situation et ne demeurent pas pour autant prostrées. D’une personne à l’autre, on relève une cohérence entre les actes entrepris et l’histoire biographique. Les récits d’actions recueillis peuvent être vus comme des récits de résistance individuelle à la finitude palpable, dans lesquels il s’avère que les efforts sont autant d’ordre identitaire que pratique.

Ainsi, pour l’une, l’essentiel de ses efforts consiste à conserver la maîtrise de l’organisation de sa vie : moment d’intervention de l’infirmière pour la pause des bandages sur ses jambes, l’heure de son petit-déjeuner, règlement de ses factures par son fils, ajustement de sa posologie par son médecin. Le pilotage de ces coordinations mobilise cette personne et la maintient dans l’action, sans qu’elle n’ait pour autant besoin de sortir de chez elle.

Pour une autre, c’est à l’inverse la perception d’un sentiment d’isolement après avoir mené une vie sociale intense, qui est vécu comme une mise à l’écart du monde auquel elle avait appartenu jadis, et qui agit sur elle comme un moteur de vie, la stimulant à agir et à réagir pour se réaffirmer. La pénibilité du sentiment de solitude semble ainsi alimenter une nécessité vitale de conserver et d’exercer un pouvoir sur sa propre situation. En quittant sa villa pour venir s’installer dans un immeuble et dans un quartier où elle croyait retrouver un réseau social, elle déploie une énergie considérable à tisser des liens, en cherchant en vain un partenaire pour jouer au scrabble.

La confrontation à la finitude agit sur la personne de manière paradoxale : ouverture d’un vide existentiel et stimulation à entreprendre. Dans son aspect tragique, l’angoisse de la finitude incite la personne à exercer sa puissance d’agir.

Vulnérabilité existentielle : les moteurs d’action

Les « micro-détails » révélés par l’analyse des narrations recueillies sur les activités de la vie quotidienne et sur les multiples efforts investis par les personnes âgées dans leur réalisation, éclairent les perceptions intimes qu’ont ces personnes de leurs limites, les limites s’entendant autant sur le plan fonctionnel que social, relationnel, voire existentiel. Il nous est apparu que, plus encore que les risques de type physique, ce sont des menaces existentielles qui sont redoutées : perte d’identité, de cohérence interne ; perte d’autonomie, de maîtrise de sa situation, perte de l’estime de soi, de l’image de soi. Cette crainte agit comme moteur pour mettre en œuvre dans la vie quotidienne toute sorte de mesures pratiques, y compris des mesures qui entraînent des prises de risques en matière d’intégrité physique.

  • Garder la maîtrise de sa propre existence Cette dimension met en évidence le besoin de conserver le droit de décider de ses actions, d’agir en fonction de sa propre façon de juger de sa situation. Madame R., 98 ans, s’aventure à descendre par un raccourci à travers le pré au lieu de prendre le chemin. Elle se dit : « Tiens, je veux quand même de nouveau essayer, je vais faire attention. » Elle énumère les paramètres qui lui ont permis de prendre la décision : le pré était sec, les souliers étaient adaptés, les mouvements contrôlés, etc. Elle compte sur son appréciation pour tenter un acte de hardiesse qui lui donne le sentiment d’être encore en vie et d’exercer ses capacités de décision.
  • Maintenir son sentiment d’identité Pour certains répondants, il est important de conserver la cohérence avec son identité biographique, ses valeurs, ses caractéristiques personnelles, dans une dynamique de continuité avec son passé, même si les activités entreprises les exposent à des risques. Madame B., 89 ans est malvoyante, diabétique et allergique à la farine, mais elle ne résiste pas à l’occasion de démontrer son expertise comme la meilleure des pâtissières. Pour elle, faire des biscuits est l’expression d’une expertise sans pareille : son médecin irait « même sur la lune pour en chercher », dit-elle. La poursuite de certaines tâches, même si elles représentent une difficulté substantielle ou sont déconseillées pour leur santé, l’emporte sur le choix de s’en abstenir car elles font valoir les habiletés et les possibilités qui persistent (Dale, Derhamn & Derhamn, 2012, Ballinger & Paine, 2002).
  • Sauvegarder sa dignité humaine Percevant sa vulnérabilité, la personne âgée concentre ses efforts pour continuer à exister d’une manière « décente » à ses yeux et aux yeux d’autrui. Ainsi se comporte par exemple Monsieur B., 90 ans, qui évoque la journée de la veille au cours de laquelle il a fait sa lessive. Il s’oblige à maintenir la propreté et l’ordre. La crainte de perdre l’estime de soi et d’entacher son image aux yeux d’autrui agit comme un incitatif à continuer d’assumer des tâches, tout en étant conscient que faire sa lessive va exacerber ses douleurs, le fatiguer et augmenter ses risques de chute. Les activités de la vie quotidienne sont donc davantage déterminées par la volonté d’atténuer la menace de l’atteinte à son sentiment de dignité personnelle que par le contrôle des douleurs physiques.

Une vision de la personne âgée bousculée

Les narrations des personnes âgées rencontrées éclairent la notion de vulnérabilité sous un nouveau jour. La dimension existentielle se dégage de manière prégnante. Les personnes interrogées établissent clairement un lien entre les efforts déployés dans les actes de la vie quotidienne et leur besoin d’autodétermination, leur sentiment d’efficacité personnelle, leur dynamique identitaire et l’estime de soi, qu’il s’agit de maintenir à tout prix au risque de disparaître.

Nos observations bousculent une vision de la personne âgée irrémédiablement confrontée au déclin de ses possibilités et aux renoncements qui leur sont consécutifs. Les personnes interrogées dans le cadre de notre étude ont un monde physique certes rétréci, mais il n’en va pas forcément de même de leur vie intérieure et de leur champ existentiel. Il existe un seuil, comme l’est par exemple chaque atteinte supplémentaire à l’état de santé, qui enclenche un processus d’adaptation, de réduction et abandon de certaines activités. Toutefois les récits recueillis indiquent que l’adaptation s’accompagne d’un processus de développement.

L’adaptation aux contraintes de l’avancement en âge se fait parallèlement au développement de ressources et de stratégies de maintien de sa dynamique identitaire. Ces ressources échappent souvent aux intervenants externes lorsque leur regard est dirigé sur les déficits des personnes et sur les manières d’y pallier. Les repères sont donc brouillés : la vulnérabilité ne se situe pas là où on pense et l’on ne cherche pas les ressources là où elles se situent. Les plus démunis ne sont pas nécessairement les plus atteints dans leurs fonctionnalités motrices, ni les personnes les moins éduquées ou celles dotées de ressources financières plus modestes. Le sentiment de solitude et sa menace pour l’intégrité physique et morale enclenche des processus différents selon la perception particulière de chaque personne. Le recours aux services de soins à domicile n’est pas nécessairement la marque de l’amenuisement du pouvoir d’agir, mais un espace où s’exerce l’affirmation de l’autonomie.

En conclusion, les personnes rencontrées nous renseignent sur leur capacité à maintenir, voire à développer un pouvoir d’agir en regard de leur vulnérabilité physique, psychique ou sociale. La vulnérabilité perçue stimule l’essor de ressources qui sont susceptibles de réduire le poids de la vulnérabilité vécue.

[1] Brève bibliographie

  • Ballinger, C. & Payne, S. (2002). The construction of the risk of falling among and by older people. Ageing and Society, 22, 305-324.
  • Dale, B., Derhamn, U.S., Derhamn, O.S. (2012) Life situation and identity among single older home-living people : a phenomenological hermeneutic study. Int J Qualitative Stud Health Well-being, 7 : 18456
  • Mendelzweig, M., Chappuis, M., Vuilleumier, D., Kuhne, N., Piguet, C., & Bedin, M. G. (2014). Le risque chez les personnes âgées à domicile : un objet relationnel. Revue Médicale Suisse, (444), 1835–1837.
  • Jacelon, C. S., Connelly, T. W., Brown, R., Proulx, K., & Vo, T. (2004). A concept analysis of dignity for older adults. Journal of Advanced Nursing, 48(1), 76-83.
  • O’Byrne P. (2008). The dissection of risk : A conceptual analysis. Nursing Inquiry, 15:30-9.
  • Vermersch, P. , Maure, M, (sous la direction de) Pratiques de l’entretien d’explicitation, Paris, ESF, 1997

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