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Livre / « Bienvenue dans la société de longue vie »

Mardi 28.06.2016

Bienvenue dans la société de longue vie

Jean-Pierre Fragnière, Sierre : Editons A la Carte, 2016, 133 p.

Recension par Jean Martin, médecin de santé publique

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Jean-Pierre Fragnière est bien connu en Suisse romande et au-delà par son engagement dans le domaine social, en particulier sur la problématique de la vieillesse. Après de nombreuses publications sur le domaine social en général, y compris un « Dictionnaire suisse de politique sociale », il a écrit récemment plusieurs ouvrages traitant des défis que pose l’évolution démographique (vieillissement, « cylindrisation » de la pyramide des âges).

Dans l’ouvrage évoqué ici, l’auteur commence par rappeler d’où nous venons avec, depuis trois quarts de siècle, les progrès importants en termes de protection sociale, les avancées de la médecine, la plus grande autonomie reconnue aux individus et à des groupes auparavant minorisés ou négligés, ainsi qu’un meilleur accès à la formation et la montée des préoccupations environnementales. Ce qui n’empêche pas que subsistent certaines « inégalités choquantes ».

A propos de l’introduction de l’AVS, intéressant de rappeler que l’âge de 65 ans, discuté aujourd’hui, a été choisi vers 1950 parce qu’il correspondait à l’espérance de vie moyenne des hommes à l’époque – hommes qui vivent aujourd’hui quinze ans de plus… Pour bien/mieux vivre le temps de la retraite, Fragnière débat quatorze questions, parmi lesquelles : quels rôles vont assumer ces centaines de milliers de personnes retraitées ; quel sera leur niveau de vie (actuellement, il tend à être meilleur que celui d’autres classes d’âge) ; vivre longtemps c’est faire le lent apprentissage de la solitude (que des programmes sociaux et d’animation divers cherchent à contrer) ; il y a un risque de fossé entre les générations ; nos sociétés sont de plus en plus cosmopolites ; les nouvelles technologies offrent des services considérables et/mais bousculent profondément nos habitudes ; plus d’attention est donnée aujourd’hui (il faut s’en féliciter) à la dimension spirituelle de la personne – que ce soit par les gens eux-mêmes ou par les institutions.

Des défis sont lancés aux professions, l’auteur en relève trois. D’abord, l’intervention des professionnels apporte un risque de disqualification des compétences des personnes (les aînés) elles-mêmes. Ensuite, la spécialisation croissante peut favoriser un « découpage de l’usager » suivi et pris en charge par plusieurs intervenants. Enfin, ces facteurs entrainent des exigences de qualité et disponibilité dans la communication entre professionnels. Fragnière met en garde contre la « prolifération des officines du bien vieillir » ; il énonce plusieurs principes pour aller vers des systèmes tenant compte de ces défis. Il estime aussi que le retraité doit disposer d’un certain « devoir d’ingérence » et de présence à la vie sociale.

A juste titre, on parle aujourd’hui beaucoup d’éthique, individuelle, professionnelle, sociale : « Le travail éthique devient une composante explicite de nos vies, pour chacun et, pour plusieurs groupes, de leur activité professionnelle ». Une citation conclusive : « Chacun est invité à la table du partage entre les générations, jusqu’au bout. Tout cela doit être rendu possible. Nous en avons les moyens. Reste à écarter quelques obstacles et à saisir les outils voulus. »

Bienvenue dans la société de longue vie est une présentation synthétique pratique, maniable, agréable à lire, de ce dont tout un chacun, particulièrement ceux qui s’intéressent aux enjeux sociaux et sociétaux, devraient être conscients. A noter enfin que, au cours des dernières années, l’auteur a dû faire face à plusieurs sérieux soucis de santé, qui l’ont beaucoup fait fréquenter médecins et hôpitaux et dont l’expérience, en toile de fond, soutient son propos.

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