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A la suite de l’annonce de la mise en place d’un processus ombudsman indépendant, Laura Tocmacov, co-présidente de l’association Psychédelos, revient sur cette première mondiale.
Laura Tocmacov © DR(REISO) Pourquoi mettre en place un ombudsman dans le cadre des thérapies assistées par psychédéliques ?
(Laura Tocmacov) Les personnes qui s’engagent dans la psychothérapie assistée par psychédéliques ont généralement des troubles anxieux ou dépressifs, ou sont concernées par une addiction. Ce genre de thérapies, encore peu pratiquées, peut très bien se passer, mais il existe également des risques que cela ne soit pas le cas. Il peut alors parfois s'avérer difficile de parler au corps médical.
Conjointement avec la Société suisse de médecine psychédélique, Psychédelos a souhaité proposer une solution pour avoir un lieu de recours, où les personnes peuvent se confier. Le but est aussi de prévenir les abus. Cet ombudsman permettra de protéger autant les médecins que les patient·es, en Suisse romande.
Quel sera le profil de cet ombudsman et de quels financements pouvez-vous bénéficier ?
On est en train de chercher. Ce sera une personne qui devra se situer entre le monde médical et celui des patient·es, avec une bonne connaissance de ces thérapies.
Nous demandons un financement auprès des assurances, car la mise en place d’un ombudsman est primordiale. Nous faisons aussi des demandes de subventions cantonales, peut-être à la Ville de Genève aussi. C’est un système qui devrait coûter environ vingt mille francs par an.
Selon votre communiqué de presse, le but de cet ombudsman est « d’assurer un rôle clé dans la régulation et la médiation des éventuels conflits ou insatisfactions des patient·es ». De quelle nature sont ces conflits et insatisfactions en général ?
Un ou une patient·e qui avait placé beaucoup d’espoir dans ces thérapies et ne constate pas de transformation peut ressentir de la colère envers le médecin. Il peut aussi surgir des incompatibilités de personnalités. Il est également arrivé qu’un patient en thérapie ait été laissé seul pendant une heure, ce qui a réactivé son trauma de façon massive. Une autre situation pourrait être celle d’un proche du ou de la patient·e qui s’inquiète de cette thérapie et qui aurait besoin d’exprimer ses craintes.
Au fond, ce que tout le monde redoute, c’est qu’il y ait un abus, une prise de pouvoir, un abus physique, que le médecin profite de cette auto-suggestion. L’existence d’un ombudsman vise à prévenir et rassurer.
Comment s’organisera la cellule d’écoute ?
La porte d’entrée, c’est l’association Psychédelos. La personne nous contacte en premier lieu et un ou une membre de l’association lui répond en cinq à sept jours. On accuse réception de la plainte et on explique comment se passe le traitement. Bien entendu, on assure la confidentialité de ce qui nous est rapporté. Ensuite, le ou la patient·e a la possibilité de rencontrer deux membres de Psychédelos formé·es à la médiation, pour analyser ensemble si des résolutions sont possibles. Un rapport intermédiaire est alors rédigé.
Si cela ne suffit pas, la deuxième ligne de ce processus est activée : un comité mixte composé de membres des associations Psychédelos et de la Société Suisse de Médecine Psychédélique, incluant des représentant·es des patient·es et des psychiatres, examine les dossiers et propose des solutions. Enfin, si aucune solution n’est trouvée à ce stade, l’ombudsman interviendra. Sa mission sera de statuer sur les cas les plus complexes et émettre des recommandations contraignantes.
L’ombudsman indépendant garantira ainsi les intérêts des patient·es comme ceux du corps médical. Cette démarche initie l’encadrement d’une discipline en plein essor, mais qui manque cruellement de médecins formés, entraînant une prise en charge limitée des patient·es. C’est pourquoi les deux associations co-organisent une formation continue, ouverte à tout·e professionnel·le ou étudiant·e dans le domaine de la santé mentale et sociale qui souhaiterait approfondir ses connaissances sur les psychotéhérapies assistées par psychédéliques.
(Propos recueillis par Mélissa Henry)
En savoir plus sur l'association Psychédelos et la Société suisse de médecine psychédélique, à l'origine de cette initiative.
Bureaux partagés en sous-location à Lausanne-centre, dans un environnement propice aux échanges et aux synergies, notamment avec des associations axées sur la famille. (image : © Freepik)