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Commentaire de Jean Martin, médecin de santé publique et bio-éthicien
Dans la «Tribune» de la Revue médicale suisse du 4 décembre 2019, le professeur Nicolas Senn présente des questionnements de haute importance sur le thème de la santé et de l’environnement.
Le compte à rebours. Le responsable de la formation des médecins de famille d’Unisanté à Lausanne se base notamment sur le « Compte à rebours en matière de santé et de changement climatique » que le prestigieux journal médical Lancet met régulièrement à jour - dernière version en date du 13 novembre 2019. Extraits de son propos.
L’illusion d’autosuffisance. « Les nouvelles sont mauvaises, on s’y attendait : la terre se réchauffe mais l’humanité continue son business as usual. Pourtant, il s’agit de repenser le lien de la santé avec l’environnement. Les décennies récentes ont largement réduit la santé à des paramètres biochimiques. L’homme vit dans une forme d’illusion d’autosuffisance, totalement déconnecté de son milieu. »
La question du sens. Est évoqué le livre récent de la philosophe française Marie Gaille (Santé et environnement, PUF, 2018). Nicolas Senn à ce propos : « La question du sens est fondamentalement éloignée de finesses statistiques [pour lesquelles nous nous passionnons]. C’est peut-être là la révolution : aller au-delà de l’épidémiologie, pour retrouver un sens. » Dans la foulée, donner plus d’attention à l’interaction nécessaire avec l’environnement. Hippocrate faisait ce lien il y a plus de 2000 ans.
Rôle des soignants. D’abord, revoir leurs propres représentations de la santé et de la maladie. « Peut-être, et on ose à peine le dire, devrions-nous, dit le professeur Senn, moins nous occuper de tel taux sanguin chez nos patients, et plus de leur milieu de vie et de leur intégration dans la communauté ? Il y a là un savoir à créer. »
Urgences invisibles. En conclusion, un point majeur. « Oui, il y a urgence, mais force est de constater qu’il y a urgence et urgence. D’un côté celle de l’ambulance, tout le monde respecte et applaudit. De l’autre les urgences invisibles, notamment climatiques – visibles seulement par ceux qui savent regarder, qui trop souvent sont vus comme des idéalistes ou des extrémistes. » Quand on ne les traite pas de terroristes (voir les procès à venir contre de jeunes manifestants – on marche sur la tête !). Ces jeunes ont créé quelques perturbations c’est vrai mais, s’agissant des enjeux planétaires, les puissances qui comptent, dont la finance, portent une responsabilité majeure dans des bouleversements bien plus graves.