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L’épidémie de coronavirus se stabilise en Suisse, mais…

Mardi 21.04.2020

… mais il faut persévérer dans la durée. Bulletin d'étape avec trois remarques du Dr Jean Martin sur la mondialisation des virus, bactéries et autres ; sur la santé psycho-sociale et sur la qualité de l’information.

Commentaire du Dr Jean Martin, médecin de santé publique et bioéthicien

Les problèmes de santé publique. Il est bien admis que la dissémination d’agents infectieux tels que le Covid-19 a été favorisée par la mondialisation, qui a massivement accentué l’interdépendance économique et a mené ici à des pénuries qui nous ont stupéfiés - ou peu s’en faut (masques, gants etc.). Avec un « bouquet » d’autres facteurs, l’augmentation du transport international facilite la propagation de virus, bactéries et parasites. Dans un futur proche, l’Europe sera vraisemblablement confrontée à la dengue, au chikungunya, à la malaria. On doit aussi craindre qu’en Arctique, la fonte du permafrost libère des microorganismes qui y sommeillent congelés depuis des siècles.

Sur ces sujets de santé, comme en général pour la problématique climat, il importe d’écouter la science et les scientifiques, et de leur donner les moyens d’approfondir leurs travaux, de progresser en termes de thérapeutiques et de prévention, et d’élaborer des méthodes/moyens à soumettre aux parties prenantes économiques (gouvernants, privés) dans la perspective de changements drastiques d’orientations.

A noter encore que la santé publique au sens large devait inclure celle des animaux et même des végétaux, que nous malmenons gravement et de plus en plus. « L’exceptionnalisme humain est auto-destructeur », dit l’écrivain américain Richard Powers. L’exceptionnalisme, cette fâcheuse façon de penser qu’il n’y a que nous qui comptions.

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Sur le plan psycho-social. Des psychiatres relèvent l’augmentation des « pertes de sens » devant les tensions actuelles. On connait le syndrome de stress post-traumatique (après un évènement grave dans sa vie, en cas de guerre, etc). Aujourd’hui, on voit des stress pré-traumatiques (crainte de choses qui vont ou pourraient se passer). Ce printemps, différentes études et sondages montrent comment la corona-pandémie et le confinement ont déstabilisé passablement de personnes (fragilisation psychique, dépression) – et aussi comment le télétravail a entrainé des tensions et des surcharges.

Les restrictions massives du moment nous montreront-elles qu’on peut vivre différemment ? Pour la santé et le mieux-être psychosocial : produire et consommer moins de ces choses qui relèvent du superficiel, du superflu ou de l’égocentrique ? Ce qui libérerait un peu de notre temps précieux, si « embouteillé » dans la vie d’avant, pour le dédier à nous enrichir sur des modes non-matériels.

Sur la convivialité souhaitable dans un monde qui garde un sens, le poète Christian Bobin : « Nous ne sommes pas ici pour triompher. L’existence peut offrir beaucoup mieux. »

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L’importance de lutter pour la qualité de l’information. Le contrôle de qualité de ce que chacun peut trouver sur les réseaux est un sujet important, aigu. Cela vaut aussi bien pour la pandémie coronavirus que pour le climat. Les fausses informations sont particulièrement préoccupantes s’agissant de santé et médecine et les médias ont rendu attentif à leur fréquence durant la pandémie. Le 18 avril 2020, la chaîne CNN relevait que, dans certains milieux évangéliques états-uniens, on voyait la promotion de produits « originaux » prétendument antivirus et potentiellement toxiques. Attention aux illuminés qui disposent de tribunes médiatiques !

S’invite ici à nouveau la question des « marchands de mensonges » - ou de doutes -, les lobbys des énergies fossiles et leurs communicants. Dans le dernier quart du XXe siècle, des chercheurs (genevois notamment) ont mis au jour l’étendue des manipulations de l’industrie du tabac pour minimiser les données scientifiques quant à la nocivité du produit et discréditer ceux qui œuvraient pour la santé de la population. Aujourd’hui, les mêmes méthodes sont utilisées pour minimiser les catastrophes que prépare le dérèglement climatique et pour disqualifier les scientifiques qui étudient ce problème.

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