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«Le cerveau continue à travailler, mais le corps lâche»

Mardi 19.04.2022

Trois questions à Corinne Le Bars, autrice de Réussir son burn-out ; Récits de résistantes, paru aux éditions érès.

corinne le bars 170@ DR(Reiso) Dans votre dernier livre [1], vous avez recueilli les témoignages de sept femmes, dont vous, qui ont traversé un burn-out. Comment vous êtes-vous rencontrées ?

(Corinne Le Bars) Nous participions au même groupe d’entraide, proposé par le service social de l’assurance-maladie aux personnes qui étaient en arrêt de travail pour burn-out. Nous avons chacune des parcours différents et pourtant beaucoup de choses en commun. Nous étions méticuleuses, bosseuses et n’étions pas à l’écoute de nous-mêmes. Lors d’un burn-out, le cerveau continue à vouloir travailler à tout prix, mais le corps lâche de façon assez violente. Il y a clairement un moment précis où tout bascule.

Comment cela s’est produit pour vous ?

Je travaillais dans le domaine de la formation pour adultes, puis l’institution qui m’employait m’avait demandé de diriger un service de recherche. Lors d’un processus de fusion de mon entreprise, le climat de travail s’est détérioré. Je me suis accrochée, mais un jour, alors que je conduisais ma voiture, j’ai eu le sentiment de traverser un trou noir à plusieurs reprises. J’ai failli avoir un accident de la route. J’avais les symptômes d’un AVC. J’ai été hospitalisée au service de neurologie de l’hôpital. L’IRM était normale. C’est là que j’ai compris que je faisais un burn-out.

Vous vous en êtes sortie, quels conseils donneriez-vous aux personnes qui traversent une telle épreuve ? Peut-on prévenir le burn-out ?

Pour m’en sortir, après ce point de rupture, j’y suis allée par étapes. J’aime beaucoup nager, mais j’étais incapable de me rendre à la piscine. Mon psychiatre m’a conseillé de mettre mon sac de natation dans mon coffre et de commencer par me rendre devant la piscine, puis d’essayer d’aller jusqu’à la porte, puis de rentrer dans le bâtiment… De fil en aiguille, j’ai pu recommencer à nager. Pour prévenir le burn-out, il faut impérativement écouter les signes avant-coureurs. Pour ma part, alors que je suis très méticuleuse, je me suis mise à perdre mes clefs ou ma carte d’identité. J’avais également de fortes douleurs à la mâchoire et beaucoup d’autres symptômes. Je conseille aux personnes qui commencent à se sentir épuisées de surtout ne pas se dire : « il suffit que je me donne un bon coup de pied aux fesses » ! Au contraire, il faut s’arrêter, relativiser. Depuis mon burn-out, j’ai appris à mettre le travail à sa juste place, à profiter davantage de la vie et à écouter les signaux que mon corps m’envoie. Parmi les femmes qui ont témoigné dans le livre, nous sommes plusieurs à penser que cette épreuve est un mal pour un bien.

(Propos recueillis par Yseult Théraulaz)

[1] « Réussir son burn-out », récits de résistantes, Ed. Eres, 2022, 192 pages

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