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Enquête sur le comportement des jeunes au volant

Mardi 26.07.2022

Sur la route, la conduite des jeunes générations représente un important enjeu de santé publique. Dans Les jeunes au volant, sociologues et pédopsychiatres se penchent sur cette thématique, qui reste encore peu étudiée.

Recension par Jean Martin

les jeunes au volant eres 170

Les risques qu'une partie notable des jeunes prennent sur les routes et les dommages subséquents représentent un sujet important de santé publique. En France, les 18-24 ans composent 8% de la population, mais rendent compte de 16% des mort sur les routes.

Cet ouvrage est issu d'une large enquête qualitative auprès de conducteurs·trices de 18-25 ans en France, menée à l'initiative de David Le Breton, sociologue universitaire connu. Dans la première partie, celles et ceux qui ont mené la recherche en présentent les résultats principaux, selon la séquence des éléments pertinents : apprentissage, obtention du permis, type de conduite (urgence à conduire, risques et excès, sentiment de liberté). D’une manière générale, ce travail fait découvrir des jeunes lucides sur les avantages et les inconvénients de la voiture. Le sociologue note : « Le jeu avec la mort repose sur une part d’ambivalence mêlée d'une méconnaissance du danger (...) Vécu comme une gêne intolérable, le code de la route est l'objet d'une permanente réinterprétation qui élargit d'autant la marge d'imprévisibilité » (p. 13).

Dans la section sur les compagnons numériques de la route, tels que la radio, le smartphone ou le GPS, on peut lire : « Choisir ces compagnons, c'est choisir de se sentir moins seul, de rester connecté (...) les avantages qu'ils donnent entrent en tension avec la nécessité d'une constante concentration. » Les chercheur·se·s ont également voulu connaître l’évaluation que font les jeunes des campagnes de prévention, découvrant une population active et riche d’un esprit critique. « Globalement, nos observations témoignent d'une jeunesse réflexive sur les campagnes de prévention (...) Non seulement ils analysent les campagnes actuelles mais ils proposent aussi des solutions ». Ces premiers chapitres fourmillent de citations des réponses des enquêtés.

De l’influence des parents

Dans la seconde partie, des auteurs et autrices spécialisées (universitaires de sciences humaines et trois pédopsychiatres) prennent du recul et commentent les résultats dans des contributions substantielles. Parmi elles et eux, Hervé Marchal porte un regard ethnosociologique sur le rapport à l’automobile des jeunes : « La personne jeune au volant est non seulement dans son propre monde, elle est aussi et surtout son propre monde ». Il analyse également les conséquences de l’habitat du conducteurs·trices et note que « Jeunes des villes ou des champs : de multiples effets à prendre en compte ». Leila Jeolas se concentre sur des jeunes accros à la vitesse dans son pays, le Brésil, et du phénomène des courses illégales de voitures et de motos, ainsi que de la casse y relative. En matière de genre, Yoann Demoli discute les relations différentes des jeunes filles et des garçons à l'automobile. Des données qui retiennent l’attention sont celles sur l'influence du comportement au volant des parents sur celui des jeunes conducteurs. Et sans surprise, celle-ci est grande !

Dans le dernier chapitre, tout à fait stimulant, l'historien Mathieu Flonneau s’interroge : « Que reste-t-il du rêve automobile ? », à l'aide de notations historiques et littéraires. Il termine avec cette citation de Blaise Cendrars (1945) : « Prendre la route. Rouler à tombeau ouvert, au cœur de la solitude, au volant de mon engin, foncer droit devant moi, déchirer le monde en deux comme on déchire un prospectus ».

Travail pionnier dans ce domaine, Les jeunes au volant intéressera les professionnel·le·s aussi bien que les responsables des publics concernés, ainsi que les milieux de l'éducation à la santé et de la prévention. Sans oublier, il va de soi, les parents.

Les jeunes au volant, David Le Breton (dir. publ.), Toulouse : Éditions érès, 2022, 264 pages

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