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L’aide sociale apparaît surtout dans les statistiques et les budgets publics. La photographe vaudoise lui donne du cœur et du corps.
En 2008, Ghislaine Heger reçoit l’aide sociale pendant quelques mois. Elle est sous le choc : ni son diplôme HES ni le passeport suisse ne l’ont empêchée de «chuter». Elle reste enfermée chez elle de crainte de dépenser le moindre centime. Même à ses proches, elle n’ose pas parler de sa situation.
Comme tout le monde, elle a entendu les rengaines sur les profiteurs et les fainéants. Elle n’avait pas réfléchi plus loin. Là, elle veut en savoir plus et part à la rencontre de ces personnes qui galèrent et se font juger comme si ce qui leur arrivait était de leur faute. Elle-même ayant passé par là, elle parvient à établir un lien de confiance et reçoit les confidences des uns et des autres. Ils ont moins de 20 ans ou plus de 60 ; une adolescente qui a quitté le domicile familial au divorce de ses parents, une infirmière dont une grave maladie s’est déclarée pile entre deux emplois, un quadragénaire souffrant de fibromyalgie, un très jeune père sorti de ses addictions grâce à son fils, une situation professionnelle instable pour ce quinquagénaire, une enfance tourmentée pour cette jeune femme.
Dans le bel ouvrage* qui retrace ces rencontres, l’aide sociale prend enfin des couleurs. Ghislaine Heger a empreint ses portraits de respect, elle a aussi rassemblé des témoignages d’une grande sincérité. Si la honte n’est pas absente des récits, c’est le courage et l’espoir qui dominent ces parcours de vie.
Marylou Rey, rédactrice en chef de REISO
* « Itinéraires entrecoupés. Portraits photographiques et récits de personnes au bénéfice de l’aide sociale», Ghislaine Heger, Lausanne : Editions Réalités sociales, avril 2017, 208 pages.