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La charge mentale, ce fardeau féminin

Lundi 08.03.2021
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Les témoignages sur la charge mentale recueillis par le Bureau lausannois pour les familles tendent à montrer que c’est toujours majoritairement les femmes qui anticipent et organisent les affaires familiales. Analyse.

Par Claire Attinger, déléguée à la politique familiale, Ville de Lausanne [1], Rebecca Fabères, stagiaire et Muriel Débaz, chargée de projet, Bureau lausannois pour les familles

La notion de charge mentale fait son apparition dans les années 80, à la suite de la parution de l’article « La gestion ordinaire de la vie en deux » de la sociologue Monique Haicault. Elle y décrit la « double journée » des femmes et la jonction entre travail domestique et familial, l’augmentation du pourcentage de travail et des exigences professionnelles [2].

Quelque 40 ans plus tard, une enquête suisse sur la population active réalisée par l'Office fédéral de la statistique (OFS) montre que les femmes consacrent 28,1 heures par semaine au travail domestique et familial, contre 17,9 heures pour les hommes [3]. Alors que les femmes ont investi le marché du travail depuis plus d’un demi-siècle, c’est toujours elles qui se chargent majoritairement des tâches ménagères, notamment en termes d’anticipation, d’organisation et de coordination.

La charge mentale est définie comme une injonction informelle obligeant à être constamment en alerte. Il s’agit de penser à tout, pour soi-même mais également pour l’ensemble de sa famille et pour l’organisation du foyer, en parallèle à sa journée de travail. Cette charge cognitive va au-delà de la répartition unique des corvées ménagères et s’apparente plutôt à une planification du « qui », « quoi », « où » et « comment ». Ces réflexions restent invisibles, envahissantes, épuisantes, permanentes et reposent souvent exclusivement sur les femmes. Et alors qu’il est possible de quantifier le temps utilisé à exécuter une action, c’est une autre paire de manches que de mesurer le temps et l’énergie passés à la programmer. Cette réalité de devoir constamment toujours penser à tout est au cœur d’une BD [4] publiée en 2017 par la dessinatrice Emma. Avec cette création, elle contribue à visibiliser ce problème qui s’est intensifié, et qui traduit l’accélération et la compression des vies privées et professionnelles.

« Penser à tout, tout le temps »

Marquant sa volonté de prendre part à la réflexion sur les questions qui touchent la conciliation des activités privée et professionnelle, le Bureau lausannois pour les familles a décidé de participer au débat. Un appel à témoignages a donné l’occasion aux Lausannois·e·s d’évoquer en quelques mots leur charge mentale. Ces récits ont été thématisés, avant de servir de fils conducteurs à la réalisation de capsules vidéo qui mettent en scène des situations vécues. Pour inscrire la démarche dans une réflexion sociétale plus large, les différents messages ont été complétés par l’intervention de la sociologue Nicky Le Feuvre. [5]

Les près de 200 commentaires collectés concourent à cerner quelques typologies. Le premier élément significatif fait référence à la mémoire indéfectible dont font preuve les mères à l’égard des besoins et demandes des membres de leur famille. « Penser à tout, tout le temps, pour tous ! ». Ces propos reviennent dans la plupart des allégations reçues. Cela corrobore la définition de la charge mentale, qui n’est pas qu’une question de répartition des tâches, mais bien l’extrême fatigue qui résulte de devoir constamment anticiper et coordonner. Ainsi, la phrase « Dis-moi comment je peux t'aider » ne résout rien aux difficultés puisque, comme le décrivent très bien ces paroles, « Ce qu'il ne comprend pas, c'est que devoir lui lister les choses à faire, pourtant souvent bien visibles, ne me soulage pas ». Cette déclaration renforce l’explication suivante : « Les papas ont des fois l'impression de faire beaucoup mais souvent c'est les mamans qui disent ce qu'ils doivent faire ». Pour sortir de ce schéma, quelques articles suggèrent de prédéfinir les devoirs de chacun·e… Mais qui va s’en charger ? [6]

La deuxième typologie s’apparente à la question de la délégation. Plusieurs témoignages évoquent la difficulté de confier une tâche à l’autre, de crainte que celle-ci soit mal faite, voire pas du tout. Les affirmations « Ne pas pouvoir faire confiance à l'autre pour me décharger (même s'il a la volonté) parce qu'il va certainement oublier d'y penser », « C’est lorsque mon mari m’a dit qu’il s’occuperait d’appeler la gérance mais qu’à 16h ce n’est toujours pas fait » ou « difficulté à déléguer - croyant que « les choses » seront mieux faites par moi » convergent en ce sens.

Cette situation, qui se réfère aux rôles historiques associés à chaque genre [7], peut entrer en conflit avec l’identité personnelle [8]. Une mère évoquait par exemple que cette peur d’oublier et de perdre le contrôle était « amplifiée par le fait que la femme n’est pas valorisée. C’est comme s’il s’agissait d’un don inhérent à la nature féminine qui serait un dû envers sa famille ». A l’inverse, d’aucun·e rapporte avoir réussi à dépasser ce problème en répartissant « les tâches domestiques, administratives et de planification selon nos affinités ».

« Rien n’est perdu tant que maman n’a pas cherché »

La culpabilité représente un troisième élément inhérent à la charge mentale. Ne pas avoir été capable d’avoir tout fini à temps ou avoir manqué certaines choses favorise la peur de mal faire, et renvoie une mauvaise image de soi-même. « Ne pas arriver à dormir par peur d'oublier quelque chose avant le départ en vacances en famille », « la mauvaise conscience parce qu'on a oublié le sac avec les gants pour la journée de ski ».

Nombres de propos sont semblables et attestent de cette crainte d’omettre des éléments importants. Sans surprise, ces témoignages décrivent systématiquement un sentiment de culpabilité face à un oubli ou face à une capacité partielle à effectuer les obligations domestiques. C’est particulièrement vrai pour les familles monoparentales qui ne peuvent ni partager ni déléguer. « De la culpabilité, une pression de maman qu’on se met en croyant que les autres réussissent mieux que nous à tout gérer et à tout penser... Alors que c’est faux, personne n’y arrive et on devrait s’en battre les steaks et se laisser vivre. Mais cette culpabilité est tenace, je la vis tous les jours... », a rapporté une femme. S’il s’avère difficile de se défaire de ces sentiments, il est en revanche possible de donner de petites responsabilités aux enfants dès leur plus jeune âge, pour leur apprendre à devenir autonome. Quelqu’un·e a rapporté que « quand « rien n'est perdu tant que maman n'a pas cherché » se transforme en « à quoi bon chercher, maman sait où il est », il s’agit de faire prendre conscience à sa descendance que cette même maman ne sera pas toujours là, en intégrant cette notion dans l’éducation.

Un témoignage a défini la charge mentale comme « un poids très lourd que nous, les femmes, avons sur nos épaules. Un poids difficile qui nous accompagne tout au long de notre vie de femme. Comment ne pas les transmettre à nos filles ? Comment l'éradiquer de l'éducation que nous donnons à nos enfants ? ». Aucune solution miracle n’existe, et chaque individu trouvera des pistes selon sa situation personnelle ; le lâcher-prise n’est pas si évident à appliquer. Les possibles stratégies décrites ne pourront voir leurs effets que sur le long terme. Et comme évoqué précédemment, la volonté de tendre à une égalité des tâches et des responsabilités est aussi une question d’éducation.

Non au stagiaire, oui au père

La littérature met en avant deux moments déterminants dans la répartition du travail au sein du couple et donc du développement de la charge mentale. Le premier est l’instant où l’on décide de faire ménage commun et où les rôles doivent faire l’objet d’une nouvelle répartition. L’arrivée d’un enfant redistribue ensuite les tâches domestiques et éducatives. Dans ce contexte, l’introduction dès janvier 2021 d’un congé paternité fédéral est un premier pas pour que les pères s’imprègnent des besoins de leur foyer et s’investissent de manière plus égalitaire. Plutôt que de de se comporter en auxiliaire qui exécute [9], il peut participer à construire un nouvel équilibre familial durant ces jours de présence pour accueillir son nouveau-né.

Un autre problème identifié réside dans l’articulation entre des temps sociaux, à savoir entre les temps personnels et les temps familiaux. La conciliation entre tous ces espaces temps est devenue difficile dans notre société de plus en plus active. Stress, manque de temps, inconciliabilité sont autant de pressions que les femmes subissent tout au long de leur double, voire triple journée. Si leurs réalités quotidiennes ont énormément changé ces dernières décennies, le fonctionnement des administrations, des écoles, des commerces et les horaires des services en tout genre n’ont pas suivi la même évolution.

Organisation sociétale à construire

Pour gagner en fluidité dans la gestion prévisionnelle, il pourrait ainsi être judicieux de penser en termes d’organisation sociale collective. A ce titre, plusieurs villes Italiennes ont par exemple créé des bureaux des temps : ils ont pour objectif de renforcer la qualité des services publics, par la définition d’horaires s'accomodant au mieux demandes des usager·e·s et des conditions de travail des fonctionnaires. Ils visent également à développer des assistances innovantes pour mieux concilier vie personnelle et professionnelle, et à prendre en compte des questions temporelles dans les opérations d’aménagement et de déplacements. Le but est de gagner en commodité et en flexibilité, tout en renforçant la question de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes [10].

Pour encourager concrètement le travail pour toutes et tous et diminuer d’autant la charge mentale portée quasi exclusivement par les femmes, de nouvelles pistes sur la construction d’une organisation de la vie en société pourraient donc être testées. Utopie ?

Bibliographie

Haicault, Monique. « La gestion ordinaire de la vie en deux ». Sociologie du travail. 1984

[1] Claire Attinger est également responsable du Bureau lausannois pour les familles

[2] https://www.liberation.fr/debats/2017/06/28/charge-mentale-l-inattendu-retour_1580213/, consulté le 15 février 2021

[3] https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/travail-remuneration/travail-non-remunere/travail-domestique-familial.assetdetail.2967879.html, consulté le 8 février 2021

[4] « Fallait demander », https://emmaclit.com/2017/05/09/repartition-des-taches-hommes-femmes/

[5] Ces réalisations ont été diffusées à partir du symbolique 8 mars, journée internationale mettant en avant la lutte pour les droits des femmes et pour la réduction des inégalités par rapport aux hommes.

[6] https://www.madameportelaculotte.com/fr/le-journal/6-conseils-pour-se-debarrasser-de-la-charge-mentale/, consulté le 9 février 2021

[7] https://www.psychologies.com/Couple/Vie-de-couple/Au-quotidien/Interviews/Dans-le-couple-le-partage-egal-des-taches-est-une-illusion, consulté le 12 février 2021

[8] https://journals.openedition.org/framespa/646, consulté le 12 février 2021

[9] https://www.huffingtonpost.fr/2017/05/30/apres-la-bd-demma-sur-la-charge-mentale-un-jeune-homme-lance-u_a_22116579/, consulté le 9 février 2021

[10] https://www.volubilis.org/wp-content/uploads/2017/01/Bonfiglioli-les-politiques-des-temps-urbains-en-italie.pdf, consulté le 15 février 2021

Lien vers les capsules vidéo (en ligne dès le 8 mars) : Pour moi la charge mentale c’est..

Comment citer cet article ?

Claire Attinger, Rebecca Fabères et Muriel Débaz, « La charge mentale, ce fardeau féminin », REISO, Revue d'information sociale, mis en ligne le 8 mars 2021, https://www.reiso.org/document/7104

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