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Inégalités de santé, à qui la faute?

Vendredi 30.06.2023

Un recueil de textes issus de multiples recherches explique les fondements de l’épidémiologie sociale et de ses enjeux actuels. Aperçu.

inegalites sante enjeux epidemiologie sociale reiso 170L’épidémiologie sociale est une discipline qui met à jour « le fait que l’espérance de vie ne peut dépendre uniquement de facteurs biologiques ou de choix individuels : elle est plus fondamentalement déterminée par des contextes socio-économiques qui relèvent de décisions collectives, et donc politiques. » Ainsi est-elle définie dans l’introduction du livre « Inégalités de santé » [1], paru au mois de mars sous la direction de Mathieu Arminjon, historien et philosophe de la médecine du soin, adjoint scientifique à la Haute école de santé Vaud (HES-SO).

Cet ouvrage est un recueil de textes écrits par des épidémiologistes, des historiens et philosophes de la médecine, des médecins, des professeur·e·s suisses et français·se·s et complété par des traductions d’écrits d’autres pays. Dense et très pointu, il s’adresse aux chercheur·euse·s en humanités médicales, aux professionnel·le·s de la santé mais aussi à un plus large public intéressé par cette vaste thématique.

Syndrome du statut

Pourquoi les personnes qui se situent en bas de l’échelle sociale sont-elles en plus mauvaise santé ? Est-ce uniquement une question de manque d’accès aux soins et de bas revenus ? Ce n’est pas si simple : « (…) les différences socio-économiques en matière de santé ne se limitent pas à une mauvaise santé pour ceux qui sont en bas, et une bonne santé pour tous les autres. Bien davantage, il existe un gradient social de santé chez des individus qui ne sont pas pauvres : plus la position sociale est enlevée, meilleure est la santé. J’ai nommé́ cela « le syndrome du statut ». (…) Si l’on est privé d’un environnement propre et sûr, d’un travail satisfaisant, de possibilités d’obtenir une éducation de qualité́ pour ses enfants, et si l’on est soumis à la violence et aux agressions, il est plus difficile de jouir d’un contrôle sur sa vie ou d’être un acteur social au sens plein », explique le chercheur anglais en épidémiologie et en santé publique Michael G. Marmot.

Big Data à la rescousse

Pour faire avancer la recherche et pour améliorer la santé de tous les individus, les auteurs et autrices espèrent que l’accès aux données de masse puisse être un allié. « On peut (…) souhaiter que l’ensemble des données socio-économiques à l’échelle individuelle et collective, contenues dans des bases de données diverses soient rendues accessibles et susceptibles d’être croisées avec des données environnementales, territoriales, comportementales, cliniques, biologiques ou encore relatives à l’accès aux soins. Un des enjeux pour l’épidémiologie sociale sera alors de parvenir à rassembler l’ensemble de ces données et de produire des résultats interprétables pour la santé publique dans le respect de la confidentialité́ et des libertés individuelles. »

Ce vaste chantier devrait être facilité grâce aux nouvelles technologies. Malheureusement, les données socio-économiques restent encore absentes des statistiques relatives au nombre et aux causes des décès, lesquelles sont rendues publiques dans l’Enquête santé suisse publiée tous les cinq ans.

(Yseult Théraulaz)

Accéder au livre en Open Access

[1] « Inégalités de santé – fondements historiques et enjeux contemporains de l’épidémiologie sociale ». Matthieu Arminjon (dir.), Georg Editeur, mars 2023, 330 pages

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