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Sous le slogan « Entre hommes et femmes, on se respecte », les municipalités de l’Ouest lausannois viennent de lancer une campagne pour réinstaurer des codes de respect entre hommes et femmes.
Parler du respect entre hommes et femmes revient à brosser le tableau des conditions qui empêchent les uns et les autres de s’apprécier mutuellement et de se vouer le respect qu’ils se doivent. Ainsi, face à la perte du sentiment communautaire et de l’appartenance sociale, de l’isolement face aux dérives entraînées par l’industrie et le commerce mondialisés, les relations interpersonnelles se détériorent. C’est en tout cas l’avis de Jaques Depallens, municipal chargé des affaires sociales à Renens, qui s’exprimait à l’occasion de l’ouverture de la campagne « Entre hommes et femmes, on se respecte ».
Pour Pascale Manzini, chargée du social à Ecublens, le mot respect fait d’abord penser au respect du prochain et finalement "à tout le monde qui vit autour de vous et qui n’est pas vous". Dans le mot "prochain", il y a aussi "proche". C’est donc aussi envers nos proches que nous devons du respect. « Une telle attitude suppose une catégorie de règles qui dépendent des us et coutumes des différents groupes de la société ». La députée insiste particulièrement sur le respect de l’aîné, de l’ancien, de celui qui a construit notre présent en vivant dans le passé. Pour la Vaudoise, il faut donc un respect particulier pour le passé, l’expérience et la sagesse. « Si la société veut continuer d’exister dans sa diversité, elle doit aussi respecter ses enfants et ses jeunes », a recommandé la municipale des affaires sociales à Ecublens, qui prône la notion de durabilité du respect.
Concilier modernité et tradition
Jacques Depallens, municipal social de la commune de Renens, pense qu’il faut avoir le courage de concilier modernité et tradition. « Personne, Suisse ou étranger, ne peut vivre exactement comme vivaient les grands-parents, souvent dans un cadre villageois et une famille élargie très encadrante », fait remarquer le popiste. Et de rappeler que dans les années 1950-60, les filles ne sortaient que peu de la maison avant le mariage. « La vie sociale des jeunes filles était très réduite, à la différence de celle des garçons qui sortaient pour faire du sport, participer aux sociétés de jeunesse, faire l’armée, etc. Peu de filles suivaient une formation poussée. Elles n’avaient même pas le droit de vote ! »
« Mais la modernité n’est pas non plus rose », observe le municipal qui dénonce les nombreux dérapages par exemple dans les moyens de communication de masse. Pour lui, internet et téléphonie mobile véhiculent impunément des images dégradantes pour les femmes et de nature à égarer les hommes. Quant aux affiches publicitaires, elles associent toujours le corps féminin dénudé avec la vente d’objets de consommation.
Promouvoir le « vivre ensemble »
De nombreuses personnalités issues des milieux scientifiques se sont également exprimées sur ce thème du respect mutuel entre hommes et femmes. Ainsi, pour Ilario Rossi, professeur d’anthropologie à l’Université de Lausanne, la société moderne est devenue très métissée. « Mais ce métissage du présent ne doit pas être trop encombrant pour le passé. Il doit plutôt l’enrichir », indique ce scientifique pour qui l’homme d’aujourd’hui est un héritier d’un ensemble de mémoires. C’est à cet homme même à qui il est demandé de s’adapter à l’affirmation des différences pour ne pas mettre en cause le « vivre ensemble ».
Même son de cloche chez Véronique Mottier, professeure associée à l’Université de Lausanne et spécialiste des questions de genre. D’après elle, il y a encore de nombreuses discriminations à l’égard de certaines catégories de populations, ce qui empêche les gens de construire leur propre identité. Elle donne comme exemple le cas des homosexuels qui restent encore stigmatisés, ici comme ailleurs. Même chose pour les immigrés musulmans, accusés de ne pas respecter un certain nombre de valeurs occidentales. Si les gens veulent avoir une meilleure qualité de vie sociale, et même économique, il faut du respect entre hommes et femmes. Voilà le chantier qui attend les habitants des communes de l’Ouest lausannois.
Déo Negamiyimana