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Sélection des derniers livres qui ont retenu l’attention des bibliothèques spécialisées en travail social. Ce mois-ci, par Corinne Biel, Haute école de travail social, Sierre.
Gerard élève seul ses trois garçons depuis que leur mère les a quittés sans laisser d'adresse, se contentant d'envoyer des cartes postales envoyées depuis l'Italie pour les anniversaires et Noël. Klaas et Kees, les jumeaux de seize ans et leur petit frère Gerson - sans oublier le chien, Daan - vivent néanmoins dans une maisonnée plutôt joyeuse où Gerard s'efforce de faire bonne figure. Un dimanche matin ordinaire où ils sont invités chez les grands-parents, leur vie bascule. Sur une route de campagne traversant des vergers où fleurissent des arbres fruitiers, une voiture s'encastre dans celle de Gerard, le choc est violent. Si les jumeaux et le père s'en tirent avec des blessures légères, il en sera tout autrement pour Gerson. Il est plongé dans le coma et au réveil, il comprend qu'il a perdu la vue.
Aidé par Harald, infirmier dévoué, l'adolescent tente d'apprivoiser sa nouvelle vie, alors que les jumeaux et leur père essaient également de faire face, mais le retour à la maison est douloureux malgré le soutien de Jan et Anna, les grands-parents des enfants. Gerson s'enferme dans sa douleur et sa colère, refuse d'accepter toute aide et de se projeter dans un quelconque avenir. Plus personne ne sait comment le soutenir. Gerard presse son fils de prendre des décisions quant à son futur, sans résultat. Lorsque l'été arrive, tous savent que les choses ne pourront pas continuer ainsi. Le séjour prévu dans la paisible maison des grands-parents au bord d'un lac apparaît alors à tous comme la possibilité d'un nouveau départ...
Gerbrand Bakker est un maître incontesté dans l'art de saisir l'essentiel avec peu de mots. Son écriture impressionne par sa concision, sa justesse et surtout, par l'absence absolue de tout pathos. Racontée pour l'essentiel par ses frères, l'histoire de ce jeune garçon qui ne parvient pas à accepter de vivre dans le noir n'en devient que plus déchirante. Traduit du néerlandais par Françoise Antoine. ©Payot
Un récit au cœur de l'enfance et de l'intimité de Feurat Alani, grand reporter français d'origine irakienne. Roman graphique poétique et original, Le parfum d'Irak est constitué des 1000 tweets de Feurat Alani. Il nous livre avec émotion ses souvenirs d'enfance, depuis sa découverte de l'Irak à l'âge de 9 ans jusqu'à sa décision de devenir journaliste pour couvrir la guerre sur place. Un témoignage puissant illustré par les magnifiques dessins de Léonard Cohen. ©Payot
Clostère est un centre d'aide d'urgence en Suisse. Ses habitants vont et viennent dans les longs couloirs où se suivent des chambres de quatre personnes. La distribution de nourriture à heures fixes ponctue des journées qui s'étirent dans l'attente et l'angoisse d'un renvoi. À l'entrée, des gardes fouillent les sacs et contrôlent les identités. Clostère n'est pas une exception, mais un lieu aujourd'hui ancré dans la normalité avilissante de la politique d'asile suisse. Dès 2008, la suppression de l'aide sociale à toutes les personnes déboutées du droit d'asile se matérialise par l'ouverture de centres d'aide d'urgence, où seul le minimum vital est octroyé. Les personnes n'ayant pas suivi l'ordre de quitter le territoire y sont soumises à un contrôle quotidien.
À partir d'une approche ethnographique, ce livre retrace les journées des habitants de Clostère au fil des aléas de la régulation intensive de leur vie par les autorités suisses. Le livre se tisse autour de récits poignants et instructifs de femmes et d'hommes immobilisés des années entières, conservant l'espoir d'être un jour régularisés.
L'illégalité régulière est une tentative de nommer l'essence de ce paradoxe : la vie des personnes logées dans des foyers d'aide d'urgence prend forme au cœur d'un appareil administratif qui a comme raison d'être leur disparition du territoire suisse. Ce livre rend hommage à celles et ceux qui refusent de disparaître. ©La Liseuse
Intuitivement, nous savons que notre sentiment de bien-être s'accroît lorsque nous faisons une marche en montagne, une promenade dans un parc ou quelques pas au milieu de la garrigue. Qu'en serait-il si nous disposions d'éléments objectifs, ou de preuves scientifiques, montrant que la fréquentation de la nature renforce notre immunité, nous aide à lutter contre le stress, les états dépressifs ou l'hyperactivité des enfants, restaure la concentration, améliore notre humeur, réduit les risques de maladie cardiovasculaire ou de diabète, atténue les inégalités socio-économiques en matière de santé ? Quelles seraient les conséquences de ces découvertes dans le domaine de la santé publique, de l'urbanisme ou de l'éducation ?
Voici le récit de cette formidable aventure scientifique en marche, depuis les premières études sur l'impact positif d'une vue arborée dans les hôpitaux, parues dans les années 1980, jusqu'à l'apport récent des neurosciences. Comment expliquer que l'expérience de nature (les arbres, les paysages, les jardins, etc) ait de tels effets sur nous ? Quels sont les mécanismes thérapeutiques qui agissent sur notre corps, nos humeurs, notre état d'esprit ? La sauvegarde des forêts, la plantation d'arbres dans les écoles et les hôpitaux ou l'aménagement de villes vertes, peuvent-ils contribuer non seulement à notre bien-être, mais aussi à notre équilibre ? Ces découvertes pourraient révolutionner notre approche de la santé, de la médecine et notre rapport au monde vivant. ©Payot
Un sac contenant un peu de terre d'Erythrée, du Ghana, une carte de bibliothèque, un bulletin scolaire... Autant de vestiges des vies brisées de ces hommes, femmes et enfants qui ont tout risqué pour un avenir meilleur. Les naufrages tragiques en Méditerranée ponctuent désormais l'actualité et ont fait de cette mer un véritable cimetière, mais un cimetière d'anonymes.
En Italie, une femme médecin légiste, Cristina Cattaneo, s'est donné pour mission d'identifier chaque disparu. Elle raconte son travail d'enquête, au cours des mois passés à Melilli, en Sicile, après le naufrage du Barcone qui transportait près de 1'000 personnes. Une tâche qui n'a pas de fin heureuse, un travail solitaire, patient, humble et tenace, dont personne ne veut se charger et qui doit donc, toujours, justifier de sa nécessité : identifier des naufragés dont on ne sait d'où ils viennent et dont on peine à trouver ceux qui pourraient les réclamer... Dans ce livre qui a ému toute l'Italie jusqu'au pape, l'auteure nous rappelle que c'est pourtant ce travail, ce combat pour rendre justice aux morts sans nom, qui fonde notre humanité. ©Payot
Cette bande dessinée n'est malheureusement pas une fiction. Composé de témoignages, d'investigation, de documentation et de conseils, ce livre rend compte d'un phénomène souvent sous-estimé mais très répandu : le cyberharcèlement, qui touche principalement des femmes et des minorités. Un ouvrage qui aborde de manière inédite ce thème difficile, à travers des témoignages, mais aussi des explications de termes techniques et des conseils adressés directement aux victimes. ©Payot
Sélection proposée par Corinne Biel, Haute école de travail social, Sierre, lien internet.