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Signée Sebastian Zelada de la Haute école de travail social Genève, la sélection de ce mois aborde notamment une critique de la pensée positive, le travail du sexe, la formation en animation socioculturelle ou encore la santé mentale en milieu carcéral.
Comment la Suisse a-t-elle, en l’espace de quelques décennies, glissé de l’exploration des substances illégales par des individus en quête d’exotisme à la scène ouverte du Platzspitz où sont morts des centaines de jeunes « toxicomanes » de tout le pays ? Comment a-t-elle pu ensuite, souvent avec l’accord de sa population, mettre en place des mesures aussi controversées que les locaux d’injection, la prescription médicale d’héroïne et le drug checking ? Comment ce pays, célébré alors à travers le monde pour l’audace et le courage de sa politique des quatre piliers, a-t-il pourtant persévéré à punir les personnes qui consomment des drogues et laissé la légalisation du cannabis se réaliser ailleurs ? Pourquoi, hier comme aujourd’hui, la question de la consommation et du trafic des drogues illégales est-elle associée à autant de peurs, de débats et de controverses dans les médias, en politique et chez les professionnel·le·s ? Et, surtout, trouvera-t-on un jour en Suisse le moyen de faire la paix avec ces drogues plutôt que de leur faire inlassablement une guerre perdue d’avance ? Cet ouvrage examine plus d’un demi-siècle du rapport complexe qu’entretient la Suisse avec les drogues illégales et permet de répondre à ces questions. (Alphil)
Boris Cyrulnik a introduit en France et sur plusieurs continents le terme « résilience » et a travaillé à son élaboration. La résilience, c’est reprendre un nouveau développement après un trauma pour répondre à l’appel de la vie. Ce nouveau concept a redonné l’espoir à chacun d’entre nous, comme aux praticiens et aux patients. La résilience est ainsi entrée dans la culture. Lorsque certains personnages politiques se sont emparés de ce concept, ils ont créé un contresens en parlant de résilience néolibérale sans l’aide de l’État, alors que toutes les publications scientifiques et cliniques démontrent l’importance du soutien psychoaffectif et socioculturel. L’objectif de ce livre est de préciser la définition du concept de résilience. C’est pourquoi Boris Cyrulnik s’est entouré d’universitaires expérimentés de disciplines complémentaires. (Odile Jacob)
L’animation socioculturelle puise ses origines dans l’éducation populaire. Or, de nombreuses injonctions politico-économiques bousculent aujourd’hui ce lien historique et conduisent à le réinterroger. Le monde de l’animation se structure autour d’une demande sociale qui impose une dynamique de professionnalisation et la création d’une filière bien identifiée. L’ouvrage explore cette dynamique et cette création en quatre périodes par lesquelles se construit le monde de l’animation : celle de la naissance des premiers diplômes, celle de la structuration de l’animation socioculturelle et de ses métiers, celle de l’organisation d’une filière de diplômes et, enfin, celle de la formation à l’ère de la compétence. Il propose une sociohistoire d’un métier qui, à côté de celui d’enseignant, se donne pour principale mission d’épanouir les individus en lien avec tous les autres. (PUR)
Heureux à tout prix, même si le monde est violent et injuste ? Dans une société néolibérale qui nous offre les moyens de nous épanouir en nous adonnant aux joies de la consommation, des objets, des services et des autres, nous devons savoir être positifs, nous réaliser personnellement, trouver en nous-mêmes les clés du bonheur sans critiquer l’ordre établi. Cette idéologie positive, issue de la rhétorique marchande, a une influence décisive sur les représentations et normes comportementales individuelles, notamment le développement personnel, la psychologie, l’éducation et la parentalité. En partant de la mise en place de la publicité, Gérard Neyrand entreprend une sorte d’archéologie de la pensée positive et suit son développement progressif jusqu’à son omniprésence dans le fonctionnement social néolibéral d’aujourd’hui. Dans une approche documentée, il réfute les logiques internes de cette pensée qui, dans une vision fonctionnaliste, comportementaliste et biologisante, promeut la reconnaissance d’un individu supposé libre, c’est-à-dire dégagé de toute détermination aussi bien sociale que psychique. (Erès)
Pute est sans doute l’insulte la plus proférée à l’encontre des femmes. Si elle renvoie en premier lieu aux travailleuses du sexe, de manière très péjorative, elle est employée contre toutes les femmes, ce qui contribue à assimiler les unes aux autres. Fortes de ce constat, nombreuses sont les femmes qui entendent retourner ce stigmate et revendiquent fièrement être des putes, qu’elles soient travailleuses du sexe ou non. Mais d’où vient ce terme aussi vieux que le français ? Quelle est son histoire et celle des dizaines de mots qui gravitent autour de lui (ribaude, fillette, grande horizontale, cocotte, bitch, grue,…) ? Que nous raconte son usage des mœurs, des mentalités, des tabous des différentes époques et des différents milieux sociaux ? Faut-il bannir ce mot et les autres insultes putophobes et misogynes ? Afin de répondre à ces questions, Dominique Lagorgette traque avec minutie les occurrences de pute et de centaines de locutions, plus ou moins fleuries, qui renvoient aux travailleuses du sexe dans les dictionnaires d’argot, les archives criminelles, les textes de fiction, les chansons ou les films. Foisonnant, drôle et engagé, Pute. Histoire d’un mot et d’un stigmate décrypte les idéologies à l’œuvre derrière les énoncés, du latin au français contemporain, et dessine un tableau assez édifiant des représentations culturelles des femmes depuis le Moyen Âge. (La Découverte)
Qu’est-ce que sortir de la délinquance ? Comment observer et mesurer les sorties de délinquances des jeunes ? Telles sont les deux principales questions qui traversent les différentes recherches présentées dans cet ouvrage. Dans un contexte d’évolution de la justice pénale des mineurs (avec la mise en œuvre en septembre 2021 du Code de justice pénale des mineurs), il s’agit de faire dialoguer des approches sociologiques intégrant la question de la gestion des risques mobilisant des techniques de contrôle, des approches sociales visant à soutenir et à pérenniser des parcours de sorties de délinquance, des approches psychocriminologiques posant la question de la capacité du sujet à changer mais aussi celle des institutions à accompagner les jeunes vers la désistance. Le livre croise les apports de chercheurs, de praticiens, de hauts fonctionnaires d’administration afin d’apporter des connaissances sur les plans théorique, clinique et éducatif. La prise en compte des parcours de jeunes, dans une perspective pluridisciplinaire, contribue à documenter les modalités opérationnelles de sortie de délinquance. (PUR)
Mariée à Ivano, Delia, mère de trois enfants, vit à Rome dans la seconde moitié des années 40. La ville est alors partagée entre l’espoir né de la Libération et les difficultés matérielles engendrées par la guerre qui vient à peine de s’achever. Face à son mari autoritaire et violent, Delia ne trouve du réconfort qu’auprès de son amie Marisa avec qui elle partage des moments de légèreté et des confidences intimes. Leur routine morose prend fin au printemps, lorsque toute la famille en émoi s’apprête à célébrer les fiançailles imminentes de leur fille aînée, Marcella. Mais l’arrivée d’une lettre mystérieuse va tout bouleverser et pousser Delia à trouver le courage d’imaginer un avenir meilleur, et pas seulement pour elle-même. (Éditions ESC)
Les données épidémiologiques le montrent depuis le début des années 2000 : la population carcérale française est composée pour une part importante de personnes avec des troubles psychiatriques graves. Face à ce constat et forts de leur expérience respective de sociologue et de psychiatre en milieu carcéral, Camille Lancelevée et Thomas Fovet mènent l’enquête : pourquoi les prisons françaises semblent-elles devenues des asiles contemporains ? Peut-on désormais les considérer comme des lieux de soin ? Dans quelle mesure la peine de prison est-elle devenue un temps thérapeutique ? Cet ouvrage interroge les évolutions croisées de la psychiatrie publique et de la justice pénale pour comprendre la réalité complexe des troubles mentaux en prison et l’expérience de celles et ceux qui s’y trouvent confrontés. (Éditions de la Maison des sciences de l’homme)
Infothèque de la HETS Genève