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Apprendre à signer de manière précoce favoriserait le développement des compétences visuelles, spatiales et sociales chez les enfants sourds. Pourtant, l’implant cochléaire semble rester majoritairement proposé aux parents.
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la surdité touche 1,5 milliard d’individus dans le monde. Une situation qui soulève des questions cruciales concernant le développement cognitif et social des enfants touchés par ce handicap invisible. Dans un article publié en décembre 2024 dans The Conversation, Delphine Fleurion, enseignante chercheuse en neuropsychologie à l’Institut catholique de Lille, met en lumière l’importance de l’apprentissage précoce de la langue des signes.
Elle rapporte dans cet article que les recherches démontrent que la pratique de la langue des signes active les mêmes zones cérébrales que la langue vocale : l’aire de Wernicke pour la compréhension et l’aire de Broca pour l’expression. Cette langue visuo-gestuelle stimule particulièrement les compétences visuelles et spatiales, mais aussi la théorie de l’esprit — cette capacité à comprendre et anticiper les pensées d’autrui. Le développement du langage suit d’ailleurs des étapes similaires, qu’il soit oral ou signé : premiers signes vers un an, association de deux signes vers deux ans.
Or, seuls 5 à 10% des enfants sourds naissent de parents eux-mêmes sourds, leur permettant une exposition naturelle et précoce à la langue des signes. Pour les autres, l’accès tardif à cette langue peut avoir des conséquences néfastes sur leur développement cognitif et social, particulièrement lorsque cet apprentissage intervient après les cinq premières années de vie — période cruciale de plasticité cérébrale.
Les conséquences sur l’acquisition des savoirs académiques sont considérables : entre 50% et 80% des personnes sourdes seraient aujourd’hui en situation d’illettrisme, selon des chiffres rapportés par Delphine Fleurion. Face à ce constat, les spécialistes plaident pour une approche bilingue. Celle-ci soutiendrait non seulement le développement de compétences en communication sociale, mais favoriserait également l’acquisition d’une seconde langue, qu’elle soit écrite ou vocale, grâce à une meilleure connectivité cérébrale.
(CROC)
Source : Fleurion, D. (2024, 17 décembre). Surdité et langue des signes : quels impacts sur le développement du cerveau ? The Conversation.