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«Pouvoir discuter d’un épisode psychotique sans tabou»

Mardi 11.03.2025

À l’occasion de la Semaine du cerveau, Marco Armando, psychiatre responsable de la Consultation d’évaluation du risque psychotique à l’adolescence (CHUV), explique comment aborder ce type de pathologie sans la diaboliser.

Photo portrait en situationPr Marco Armando © CHUV, Eric Deroze(REISO) Professeur Marco Armando, le terme psychose est souvent galvaudé, mais cliniquement comment se définit-elle et qui touche-t-elle ?

(Marco Armando) Un premier épisode psychotique se caractérise par des symptômes tels que des hallucinations auditives ou visuelles, une désorganisation de la pensée, une perte de lien avec la réalité, entre autres. Tout le monde peut expérimenter ce type de symptômes un jour ou l’autre. Si vous privez quelqu’un·e de sommeil pendant 48 heures, par exemple, il y a fort à parier que sa perception de la réalité sera altérée. Cependant, on parle d’épisode psychotique lorsque les symptômes sont récurrents, qu’ils s’inscrivent dans la durée, qu’ils s’accompagnent d’un dysfonctionnement et d’une importante souffrance. La personne perd également sa capacité critique vis-à-vis de ses symptômes, elle a la certitude que ce qu’elle perçoit est réel. Les 75% des troubles psychotiques débutent avant 25 ans et la prévalence est plus élevée chez les 16-25 ans.

Quels sont les signes d’un éventuel épisode psychotique qui doivent alerter une personne qui travaille avec des jeunes ?

Tout changement soudain d’attitude ou d’habitude doit alerter. Un·e jeune qui se montre méfiant·e vis-à-vis d’une situation habituelle, qui se met à tendre l’oreille comme s’il ou elle avait entendu quelqu’un·e l’appeler sont des signes possibles d’un épisode psychotique. Il existe un questionnaire de screening que les professionnel·les [1] peuvent utiliser pour évaluer les risques.

En tant que professionnel·le du travail social, comment agir avec une personne que l’on pense atteinte d’un trouble psychotique ?

Tout d’abord, il est vraiment important qu’une personne qui montre des symptômes psychotiques soit prise en charge le plus rapidement possible par une équipe de soins multidisciplinaire. Comme pour un cancer, plus le diagnostic est posé tôt, meilleures sont les chances de vaincre la maladie. Ensuite, il faut pouvoir discuter de cela sans tabou. Les personnes qui en souffrent ont souvent honte, elles craignent d’être considérées comme des « folles ». Pourtant, un épisode psychotique doit être abordé comme tout autre type de souffrance. Car c’est une réaction à un stress important, comme peut l’être la dépression. Arriver à faire comprendre cela à la personne concernée et lui permettre d’exprimer ce qu’elle vit est très important. Les psychoses sont des maladies multifactorielles qui mettent la vie des malades en pause pendant plusieurs mois. Aujourd’hui, les approches pharmacologique et psychothérapeutique sont efficaces, mais les soignant·es se tournent de plus en plus vers un travail de remise en route globale de la personne afin qu’elle puisse réintégrer sa vie d’avant.

(Propos recueillis par Yseult Théraulaz)

Proposée chaque année au mois de mars, la semaine du cerveau s’inscrit dans une campagne mondiale visant à enrichir les connaissances du public au sujet de la science du cerveau et l’impact de la science cérébrale sur la vie quotidienne. En Suisse romande, des actions sont organisées à Lausanne, Sion, Genève et Fribourg.

(Source : La Semaine du cerveau à Lausanne)

[1] Pour obtenir le questionnaire, s’adresser à

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