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Le service de la santé publique du canton de Neuchâtel et Unisanté ont dévoilé la plateforme Image/Mirage à l’intention des médias. Le but ? Attirer l’attention des professionnel·le·s de l’information sur les conséquences d’une représentation trop liftée des corps humains.
(REISO) Le site internet Image/Mirage est consacré à la promotion d’une image corporelle positive. Quels sont les faits et constats qui vous ont menés à développer cette plateforme ?
(Sabrina Rinaldo Adam, Service de la santé publique Neuchâtel et Oriana Villa, Unisanté, Lausanne) On constate, qu’une préoccupation excessive pour son corps peut engendrer de graves répercussions sur la santé physique et psychique des personnes concernées. Par exemple, dans le but de garder une silhouette svelte et musclée, des comportements alimentaires dangereux, comme l’anorexie ou la boulimie ou une activité physique excessive, peuvent être adoptés. Ce type de comportements et le manque d’estime de soi, s’ils perdurent, peuvent avoir un impact sur la santé mentale.
Cet impact est-il le même pour les adultes que pour les jeunes ?
L’adolescence est une période singulière. Les jeunes sont en pleine construction d’identité, ils et elles cherchent des modèles à suivre et sont particulièrement influençables. On sait que cette population accorde beaucoup d’importance aux images présentes dans l’espace public, les médias et les autres canaux de communication. C’est un public particulièrement vulnérable [1], raison pour laquelle la promotion de la santé réalise des actions qui tendent à renforcer l’estime de soi en promouvant une image corporelle positive auprès de lui. Si la personne a une bonne estime de son apparence, elle est plus en confiance et mieux armée. Une image corporelle saine est en effet une protection essentielle pour une estime de soi saine. Les scientifiques sont d’accord sur le fait que les individus ayant une image corporelle positive sont plus satisfaits de leur corps, en prennent davantage soin et sont en mesure de jeter un regard critique sur les idéaux de beauté qui prévalent dans la société et qui contribuent au développement de sa propre image corporelle [2].
Les ressources ont-été créées en particulier pour les médias. Les professionne·lle·s du travail social et de la santé peuvent-ils et elles aussi s’y référer ?
Dans un premier temps, le site est effectivement conçu pour les médias. Image/Mirage ouvre des pistes de réflexion sur l’impact que les images et mots peuvent avoir sur l’estime de soi. Le site propose également plusieurs références et bonnes pratiques, sources d’inspiration pour approfondir le sujet.
Ce qui a été publié représente une première étape. Dans les réflexions initiales, ce projet visait aussi d’autres vecteurs de communication, ainsi que les acteurs et actrices qui ont un lien de près ou de loin avec le monde de la mode et du corps (magazine, centre de beauté, pharmacie ou fitness par exemple). À l’avenir donc, et dans la mesure du possible, ces secteurs pourraient être pris en compte. Pour l’heure nous poursuivons dans l’alimentation de l’outils destiné aux médias.
Cette thématique n’est pas propre aux cantons de Vaud et de Neuchâtel. Cette action ne devrait-elle pas toucher les autres cantons romands ?
Image/Mirage s’intègre dans une réflexion plus globale que Neuchâtel et Unisanté mènent avec les autres cantons suisses sur la thématique de la promotion de l’image corporelle positive. Chaque canton développe des outils destinés à des publics différents dans une vision de complémentarité. Par exemple, les cantons du Jura et du Valais ont développé des outils destinés aux écoles ; Fribourg travaille sur les questions d’image corporelle avec les centres de loisirs ; Genève prépare des formations en ligne. Les professionnel·le·s du travail social et de la santé peuvent donc bénéficier de ces différents outils, disponibles avec toutes les informations utiles sur le site.
En pratique, il est difficile de trouver des images inclusives, ou tout simplement représentant la « réalité » des corps dans les banques d’images, devenues outils essentiels dans la communication contemporaine. La création d’une telle banque d’images est-elle une piste de développement pour ce projet ?
Les rédactions achètent des bases de données internationales et, en principe, les journalistes ont l’obligation d’utiliser les images dans ces bases de données. En général, il s’agit d’images (corporelles) assez peu diversifiées, très standardisées. Nous visons à sensibiliser les journalistes à ce manque de diversité, afin de faire évoluer les mentalités et changer les pratiques peu à peu. Il faut préciser que notre projet s’adresse aux journalistes, mais aussi aux rédactions qui, elles, ont plus de marge de manœuvre dans le choix des images à diffuser.
(Propos recueillis par Céline Rochat)
[1] (Favoriser une image corporelle saine. Ronia Schiftan. Psychologue FSP, psychologue nutritionnel ZEP dans le Message spécial « Les adolescents » de Pro Juventute.
[2] (Promotion Santé Suisse, Image corporelle positive – Notions de base, facteurs d’influence et conséquences, 2016)