Go Top

«Le Covid long est un problème de santé publique»

Mardi 29.11.2022

Une consultation pour les complications neuropsychiatriques de cette maladie a ouvert à Lausanne. Le point en trois questions avec le professeur Gilles Allali, directeur du Centre Leenaards-CHUV de la mémoire.

gilles allali covid long centre leenaards memoire 170Gilles Allali © Eric Deroze

(REISO) Votre consultation s’adresse aux patient·e·s qui souffrent de troubles neuropsychiatriques liés à une infection au Covid. Quels sont les symptômes ?

(Gilles Allali) Le Covid long peut se manifester de bien des manières. Certaines personnes souffrent de problèmes cardiovasculaires, d’autres de troubles respiratoires ou olfactifs, entre autres. Une catégorie de patients et patientes se plaint de fatigue persistante, de dépression, d’anxiété. C’est à eux et elles que s’adresse notre consultation. En effet, le Centre Leenaards de la mémoire s’occupait jusqu’à présent principalement de personnes âgées ayant des troubles cognitifs, mais les compétences de nos équipes permettent de proposer des solutions à celles et ceux souffrant de complications neuropsychiatriques dues à une infection au SARS-CoV-2.

Qui sont les personnes les plus touchées et comment reconnaître que leurs symptômes découlent du Covid ?

Le Covid long est un véritable phénomène de société car il touche 20 à 30% des personnes infectées par le virus. Les femmes actives entre 40 et 50 ans constituent l’essentiel de la patientèle qui vient nous voir pour des problèmes neuropsychiatriques liés à cette maladie. La plupart ont eu une forme légère de Covid, à savoir sans hospitalisation, et leur système immunitaire a bien réagi. Il s’ensuit toutefois une fatigue persistante ou des troubles de la mémoire, de l’anxiété, entre autres. Afin de nous assurer que les symptômes sont bien dus à un Covid long, nous établissons une chronologie des faits. Il faut éviter de prendre des raccourcis et de tout mettre sur le dos de l’infection. Une fois le diagnostic établi, nous proposons un accompagnement thérapeutique personnalisé. Pour celles et ceux qui ont des problèmes de mémoire, nous avons des groupes de rééducation. Pour les personnes en dépression, nous pouvons proposer une psychothérapie courte. Le but de cette consultation est de raccourcir la période des symptômes, bien que nous ne connaissions pas les mécanismes physiopathologiques. Compte tenu du nombre de personnes concernées, en Suisse et ailleurs, le Covid long est un véritable problème de santé publique qui émerge aujourd’hui.

Pourquoi ne proposer cette consultation que maintenant ?

Unisanté a créé une plateforme pour les Covid longs, il y a déjà plus d’une année. Elle prenait en charge les patient·e·s envoyés par les généralistes. Quant au Centre Leenaards, il s’occupe des cas avec complications neuropsychiatriques depuis plus de six mois. Nous voyons en moyenne 20 à 30 patient·e·s par semaine. Si nous avons mis du temps à réagir, c’est parce que nous avions tout à apprendre des patient·e·s. Lorsque nous étions en plein vague de Covid, avec des hospitalisations et des décès, le corps médical renvoyait malheureusement à la maison les personnes qui se plaignaient de fatigue persistante. Personne ne savait à ce moment-là ce qu’était un Covid long. Nous avons constaté un taux d’absentéisme record post-infection, certaines personnes n’étaient plus aptes à travailler pendant plusieurs mois après avoir contracté la maladie. Cela a eu un impact sociétal majeur. Le pic de l’épidémie passé, nous nous sommes intéressés à ces cas et avons cherché à trouver des solutions pour que ces personnes récupèrent et reprennent une vie active. Aujourd’hui, nous savons qu’elles ont besoin d’une prise en charge personnalisée. J’insiste sur le fait qu’à l’heure actuelle, il n’existe pas de remède médicamenteux aux symptômes du Covid long. Les personnes concernées doivent être suivies par des médecins et ne pas se laisser amadouer par des charlatans qui leur vendraient une potion magique.

(Propos recueillis par Yseult Théraulaz)

L'affiche de la semaine

Dernier article

Prescrire du mouvement contre la sédentarité
Lundi 16.12.2024
Par Camille Greppin-Bécherraz
Dans le canton de Vaud, le projet «Pas à Pas+» démontre l’efficacité d’une collaboration interprofessionnelle santé-social pour remettre en mouvement des personnes sédentaires, avec des résultats probants après quatre ans.