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La performance à toutes les étapes de la vie

Jeudi 18.12.2014
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Qu’il soit à l’école ou sur le marché du travail, chaque individu est sommé de s’adapter et de s’activer. Les « élèves » de la contemporanéité sont individuellement responsables de leur sort.

Par Sabrina Ianniello, éducatrice sociale et étudiante à l’Université de Fribourg, domaine Sociologie, politiques sociales et travail social

Tout individu, quel que soit son âge, son sexe, son statut social, son mode de vie, sa profession, est appelé aujourd’hui, dans nos diverses sociétés contemporaines, à être l’auteur de sa propre existence, de sa propre destinée. Cette norme, toujours implicite, somme l’individu à « devenir », à « être », à « se réaliser en tant que », ayant pour « souci [final] d’impliquer les individus en tant qu’acteurs à leur ″redressement″, leur ″amélioration″, leur ″soin″, leur ″rattrapage″, leur ″épanouissement″ ou leur ″développement″. » [1] Nous retrouvons cette injonction tant dans les divers milieux professionnels que les écoles ou encore les diverses politiques d’inclusion qui somment le travailleur, l’écolier/l’étudiant, le bénéficiaire à participer, s’impliquer, « s’activer ».

Mais l’être humain, en plus d’être soumis à l’injonction d’agir, « suppose [qu’il] se sente, toujours et partout, responsable non seulement de tout ce qu’il fait (notion de responsabilité), mais également de tout ce qui lui arrive (principe de responsabilisation). […] l’individu doit toujours être capable de s’ « adapter » à toutes les situations ou imprévus. » Ainsi, que le sujet agisse ou n’agisse pas, il sera de toute évidence responsable des principales conséquences de ses actes (ou de ses actes manqués). Ce dernier doit assumer la conséquence de son action réalisée ou de son manque d’initiative, « conséquence ″inévitable″ d’une société étant devenue ″incertaine″. » Il a pour exigence de se prendre en charge et, par conséquent, d’être responsable de ce qu’il fait ou de ce qu’il ne fait pas, la perception des phénomènes sociaux étant de plus en plus individualisés. Il en résulte alors une individualisation des expériences où, par conséquent, en cas d’obstacle ou de non réussite, un processus de singularisation des échecs se met en œuvre [2].

Le culte de la performance

L’individu, par exemple l’élève ou l’étudiant, se retrouve dans une quête systématique et incessante de la performance. De là, réside une pluralité de pressions à laquelle l’enfant est déjà soumis : la pression sociale, la pression familiale (parentale), la pression scolaire et la pression intrinsèque, celle liée à son propre soi, à l’individu, celle de devoir réussir sa propre vie. Cette pression intrinsèque résulte de toutes ces autres pressions sociétales qui ont des attentes implicites à l’égard de l’individu. Comme Alain Ehrenberg le souligne, l’être humain est dans cette idée du dépassement de soi permanent et de la démonstration systématique de la réussite, soit l’idée d’être en action et de le montrer. Ainsi, tout un chacun est « emprisonné » dans ce mode de fonctionnement, l’engrenage étant tel qu’il se retrouve dans cette tourmente de « […] l’obsession de gagner, de réussir, d’être quelqu’un […] » [3].

Un paradoxe résulte de ce mode de fonctionnement avec un décalage entre le temps social et le temps historique [4] que l’on retrouve déjà précocement chez les adolescents, si ce n’est déjà chez les enfants placés dans un contexte de concurrentialité de plus en plus tôt. Sophie Le Garrec et Eléonore Marbot font référence au concept de « détraditionnalisation » [5], soit « […] le déphasage entre les réalités sociales et la manière dont les ‘générations’ précédentes continuent de socialiser les plus jeunes sur une image révolue. » L’école, la famille, les instances sociales et politiques continuent d’éduquer les enfants et adolescents sur un mode de socialisation antérieure. Aujourd’hui pourtant, les jeunes doivent faire de plus en plus précocement des choix déterminants pour l’avenir alors même qu’ils résident dans une société où ils ne peuvent plus se projeter sur le long terme.

Nous sommes passés d’une société pérenne et stable dans son contexte socio-économique à une période marquée par le changement constant et l’incertitude. On pense la socialisation sur du long terme alors que l’on vit de manière permanente sur du court terme. Boltanski et Chiapello parlent d’ailleurs de société connexionniste où la longue durée est obsolète et où le court terme prime. « […] les jeunes et les personnes dans la force de l’âge auraient de plus en plus de difficultés à se ‘projeter dans l’avenir’ du fait de l’incertitude (au sens de F. Knight, qui l’oppose au risque probabiliste) affectant toutes les relations qui les rattachent au monde et aux autres. » [6] Ainsi, la stabilité et la pérennité sont toujours autant valorisées alors que nous sommes sur un mode de société différent où règnent l’insécurité, la fragilité et l’incertitude de l’avenir.

La précarisation des carrières

De fait, la société (école, famille, politique) est dans un rapport de fausses promesses avec la jeunesse. Se former ne garantit plus l’accès à un emploi. « ″Sans le bac on n’a plus rien, et avec non plus !″ : au moment où la grande majorité des jeunes et de leurs familles centrent leurs investissements sur l’école, ses promesses leur semblent s’échapper. » [7] Il est demandé aux jeunes de penser sur le long terme, avec le modèle dit « traditionnaliste » alors que tout renvoie à l’instabilité et à l’insécurité. On se focalise sur l’individu en occultant les contextes socio-économiques et les dynamiques collectives. Pourtant, la pression parentale a sa légitimité : l’idée de performance à tout prix résulte du besoin de préparer ses enfants à un avenir sombre, à un avenir en crise en les armant au mieux. Si nous observons les agendas des adolescents, voire même des enfants, nous pourrons constater à quel point ces derniers sont dans des rapports d’ultra performance aujourd’hui.

« Un métier pour toute la vie est également devenu un oxymore de notre hypermodernité caractérisée par la mobilité professionnelle (choisie ou subie), la non-durabilité et la précarisation des carrières. » [8] Aujourd’hui, la précarité des carrières touche tout individu, du plus qualifié ou moins qualifié, du fait que : « […] cette précarité est devenue la norme d’entrée dans le monde du travail des moins de 25 ans puisqu’une dizaine d’années en moyenne est nécessaire actuellement pour contracter un travail stable à durée indéterminée, même pour les plus qualifiés. » Par conséquent, accéder au marché de l’emploi est devenu quelque chose de l’ordre du parcours du combattant puisque mêmes les plus diplômés et les plus qualifiés se retrouvent dorénavant dans ces situations de précarisation des carrières.

Revenons aux situations scolaires où l’enfant est en échec. Quand bien même les enseignants et d’autres professionnels rattachés au monde scolaire auront collectivement mis toutes leurs ressources en œuvre pour l’aider, l’enfant sera rendu responsable de son propre échec. Ce processus d’intériorisation de l’échec est alors vécu comme une faute personnelle. Dans notre société, les adolescents sont confrontés de plus en plus tôt, dans une injonction de visualisation de leur propre avenir, à des choix déterminants pour leur propre projet professionnel et social. Sophie Le Garrec rappelle d’ailleurs qu’on parle très souvent de la violence des jeunes mais que la violence qui leur est infligée socialement est rarement questionnée.

Entre liberté et insécurité

Certes, si les jeunes bénéficient ainsi aujourd’hui d’une liberté d’esprit, d’une liberté d’entreprenariat en matière de choix, d’orientation – professionnelle, scolaire, mode de vie – cette liberté a néanmoins un prix : celui de l’insécurité, de l’instabilité et du court terme. Le modèle d’expérimentation s’est substitué depuis plusieurs décennies au modèle d’identification, passant « […] d’une société fondée sur le long terme, la discipline collective, la sécurisation des parcours par la stabilité et l’interdiction, à une société basée sur le court terme, l’autonomie, l’initiative individuelle et l’impératif d’action. ». Ne serait-ce donc pas là, comme l’affirme Alain Ehrenberg, une « […] pesante liberté qu’est l’autonomie. » [9] ?

[1] Martuccelli D., « Figures de la domination », Revue française de sociologie (Vol.45), 2004/3, en ligne sur Cairn, consulté le 8 octobre 2014. Même source pour les deux citations du paragraphe suivant.

[2] MARTUCCELLI D., Classes, pouvoir & conflit, Université de Fribourg, cours semestre de printemps, 2014.

[3] EHRENBERG A., Le culte de la performance, Paris : Hachette, Coll. Pluriel, 2012, p.257

[4] « […] le temps social qui comprend les codes et les normes liés à l’âge et développés par une société » et « […] le temps historique qui correspond à la période dans laquelle s’inscrit l’histoire de l’individu » in LE GARREC S. & MARBOT E. Les âges existent-ils ? Charmey : Ed. de l’Hèbe, Coll. La question 79, 2014.

[5] Concept étudié par plusieurs auteurs comme Olivier Galland, Ulrick Beck, Basil Blackwell ou encore Zygmunt Bauman.

[6] BOLTANSKI L. & CHIAPELLO E., Le nouvel esprit du capitalisme, Paris : Gallimard, Coll. NRF essais, 2010, p.507

[7] TERRAIL J-P. & POULLAOUEC T., Ecoles et divisions sociales in Le retour des classes sociales : inégalités, dominations, conflits, Paris : La Dispute, Coll. Etats des lieux, sous la dir. De Paul Bouffartigue, 2004, p.167

[8] Pour les deux citations de ce paragraphe et la citation du dernier paragraphe : LE GARREC S. & MARBOT E., op. cit.

[9] EHRENBERG A., op.cit., p.259

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