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La sociologie, ça sert à quoi ? La question a guidé la création d’une bande dessinée vouée à « démystifier » la discipline. Trois questions à l’un de ses auteurs, Thomas Jammet, adjoint scientifique à la HETS-Fribourg.
(REISO) Dans la genèse de l’histoire, le personnage explique vouloir créer une bande dessinée sur la sociologie pour que l’ouvrage soit lu. La sociologie est-elle donc si méconnue dans la population ?
(Thomas Jammet) Cette première scène expose en effet l’ambition de l’ouvrage et rappelle l’origine du projet, qui a amené deux « jeunes » sociologues à réfléchir à un moyen de promouvoir leur discipline d’une manière originale et accessible. Le fait est que la sociologie est largement méconnue du grand public. D’une part, les ouvrages et articles scientifiques publiés par des sociologues sont rarement lus au-delà du cercle (relativement fermé) des spécialistes de la discipline. D’autre part, dans de nombreux pays, dont la Suisse, la sociologie n’est pas enseignée au gymnase/lycée, et demeure donc mystérieuse pour les étudiant·e·s qui commencent leur cursus de formation. Plus largement, les connaissances produites par les sciences sociales sont souvent critiquées dans l’arène médiatique, au prétexte qu’elles excuseraient des comportements problématiques dont elles cherchent à comprendre et à expliquer les mécanismes. La bande dessinée nous est apparue comme un bon format pour favoriser l’accès aux savoirs sociologiques : le dessin de LDUD participe incontestablement à rendre les explications plus « parlantes » et permet d’introduire un humour visuel qui renforce l’autodérision dont font preuve les auteurs.
À quel point votre quotidien vous a inspirés dans la création des planches ?
Avec Daniel Burnier, nous avons cherché à ancrer les scènes dans le quotidien pour montrer la manière dont les questionnements des sociologues partent souvent de situations ordinaires, en apparence banales, qui permettent d’interroger diverses facettes de la vie sociale. De nombreuses scènes sont inspirées de situations vécues, que nous avons accentuées et déformées de manière humoristique. C’est notamment le cas de la scène où une journaliste pose des questions étranges sur les animaux de compagnie, ou encore de celle où les deux sociologues s’agacent devant les demandes de révision adressées à l’un de leurs articles.
Notre souhait est que cet ouvrage puisse donner envie à des gens d’en apprendre plus sur les sciences sociales et les questionnements auxquels elles invitent.
La plupart des scènes montrent surtout des événements courants de la vie quotidienne qui suscitent des interrogations chez une petite fille, auxquelles son papa sociologue cherche à répondre… de manière parfois un peu compliquée. Il faut dire aussi que certaines scènes se moquent (gentiment) des petits défauts des sociologues, qui tendent souvent à être très sérieux et peu intelligibles. Ce livre n’est pas un manuel illustré de sociologie, mais plutôt une lecture personnelle et décalée de sa pratique.
Qu’aimeriez-vous que les lectrices et lecteurs conservent en mémoire lorsqu’elles et ils referment votre bande dessinée ?
Notre BD a l’ambition d’être à la fois drôle et instructive. C’est la raison pour laquelle douze notes illustrées figurent à la fin de l’ouvrage, pour présenter une poignée de sociologues qui nous ont marqués ainsi que certaines notions importantes qui peuvent éclairer la compréhension de la société dans laquelle nous vivons. Notre souhait est que cet ouvrage puisse donner envie à des gens d’en apprendre plus sur les sciences sociales et les questionnements auxquels elles invitent.
(Propos recueillis par Céline Rochat)
Burnier D., Jammet T., et LDUD. « Au secours, mon papa est sociologue ! », Ed. Livreo-Alphil, 2022, 60 pages