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Présentée au Musée de la main à Lausanne, « Bébé en tête » vise à libérer la parole sur les difficultés qui peuvent survenir durant la période périnatale, et à ouvrir le dialogue entre scientifiques, professionnel·le·s et grand public.
Par Céline Rochat
« Parler des tabous qui règnent autour de la périnatalité, c’est les légitimer. C’est une première étape essentielle dans la prise de conscience collective. » Et c’est exactement l’objectif de l’exposition inaugurée ce jeudi 2 novembre 2023 au Musée de la main, à Lausanne, intitulée « Bébé en tête ». En d’autres termes que ceux de la sage-femme Julie Bourdin, cette exposition ambitionne, de manière « dynamique, poétique et colorée », de casser l’image d’Épinal qui demeure autour de la périnatalité, laquelle consiste encore trop souvent en une femme enceinte épanouie, un papa heureux, et un bébé rose et gazouillant. « C’est très courageux de monter une exposition sur thème, et surtout très bénéfique pour diminuer la stigmatisation des personnes concernées, favoriser la recherche d’aides et briser l’isolement social qui peut s’installer durant ces mois », complète la cheffe des salles d’accouchement du CHUV.
Cet événement représente l’aboutissement de plus de deux ans de travail pour le Groupe de recherche périnatale de Lausanne (UNIL-CHUV), dirigé par la professeure Antje Horsch et Anne-Sylvie Diezi, ainsi que l’ensemble de leurs partenaires. « Cette exposition est née de la volonté de créer un dialogue autour des difficultés vécues pendant la période périnatale, c’est-à-dire des premiers questionnements sur le désir d’enfant à la fin de la première année post-partum », détaille Antje Horsch.
Infertilité, fausse couche, deuil périnatal, diagnostic prénatal, accouchement traumatique, dépression post-partum, charge mentale sont autant de tabous mis en lumière. Les particularités liées aux modèles familiaux contemporains, avec les familles arc-en-ciel, sont évoquées, tout comme les injonctions sociétales à une « bonne » parentalité, lesquelles induisent une pression excessive pouvant menacer la santé mentale des couples et des jeunes parents. « Il n’existe pas de chemin tout tracé vers la parentalité. Chaque histoire est unique et mérite d’être entendue », rappellent les conceptrices et concepteurs de cette exposition soutenue, entre autres, par le Fonds national suisse pour la recherche scientifique.
Concrètement, « Bébé en tête » est construite autour de cinq espaces thématiques : le désir (ou non) d’enfant, la grossesse, l’accouchement, les premiers mois du bébé et, enfin, la recherche d’un nouvel équilibre. Des installations interactives, immersives et ludiques illustrent les enjeux liés à chacune de ces périodes, alors que des panneaux informent des connaissances scientifiques les plus récentes. En outre, un QR code encourage les visiteurs et visiteuses à approfondir la thématique à l’aide de documents en ligne. « Avec cette scénographie, nous avons voulu vulgariser les connaissances, et faire entendre la parole et les points de vue de toutes les personnes impliquées, pour que chacun·e puisse mieux se comprendre », explique Coralie Peguet, coordinatrice générale de l'exposition. Un espace « ressources » complète ces cinq scènes.
Ainsi, le jeu de plateau géant représentant la période de l’accouchement met en résonance les pensées que rencontrent les parents dans ce moment crucial et empli d’attentes et de représentations, avec celles des soignant·e·s, qui vivent la naissance avec l'éventualité d'urgences vitales à gérer. Les injonctions sociétales, la charge mentale et l’équilibre à trouver lors de l’arrivée d’un enfant sont symbolisés par de très représentatifs étendoir à linge et parcours de bille géant.
Dialogue entre personnes concernées et professionnel·le·s, conscientisation des tabous et difficultés rencontrées par les couples dans cette période de périnatalité, mise à jour des connaissances scientifiques : Antje Horsch et Anne-Sylvie Diezi recommandent la visite de cette exposition à toutes celles et ceux qui travaillent dans les domaines de la santé et du social. « Le fait que chacune des cinq étapes présentées mette en perspective des témoignages de parents et de professionnel·le·s rappelle que chacun·e aborde une situation en fonction de son point de vue, de ses attentes et de ses perspectives, estime Anne-Sylvie Diezi. Mieux comprendre ce que les parents vivent dans ces moments contribue à ajuster sa communication professionnelle, pour le bien de tous les partenaires. »
Infos pratiques
- « Bébé en tête », Musée de la main, Lausanne (Rue du Bugnon 21)
- Jusqu’au 24 mars 2024, entrée gratuite, bilingue français-allemand. Au printemps 2024, l’exposition entamera une itinérance en Suisse.
- Parmi les nombreux événements organisés autour de l’exposition (tables rondes, café-rencontre, cours, ateliers, visites guidées, etc.), le colloque « Santé mentale, parentalité et vulnérabilité » s’adresse plus particulièrement aux professionnel·le·s. Mardi 6 février 2024, 13 h 30-17 h 30.
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