Pour réunir les savoirs
et les expériences en Suisse romande
S'abonner à REISO
Le système de santé suisse est aux urgences… Le professeur Stéphane Rossini passe en revue les problèmes structurels qui ont généré cette gabegie. D’abord, les responsabilités sont diluées et très mal coordonnées entre la Confédération, les cantons et les communes. Ensuite, les lois se sont confusément empilées les unes sur les autres au fil des décennies. De plus, les primes sont déterminées sans prendre en considération la situation économique de l’assuré et chaque canton adopte sa propre pratique de réduction pour les personnes à faible revenu. N’en jetez plus ! Tous ces dysfonctionnements aboutissent à des inégalités de traitement, à des injustices dans l’accès aux soins, à des comportements irrationnels coûteux. Un exemple parmi tant d’autres : il est plus avantageux pour une personne de rester à l’hôpital que de séjourner dans un home.
Dans sa synthèse de dix pages (disponible ci-dessous), Stéphane Rossini décrit cinq grands axes de réforme. Ils s’articulent autour de plusieurs principes de base, notamment la justice sociale, l’égalité de traitement, la régulation du service public plutôt que le renforcement de la libéralisation qui instaure des concurrences parfois néfastes. L’auteur met les médecins au cœur de toute la stratégie. Ils ont un rôle déterminant « dans la lutte contre la surconsommation, contre les interventions inappropriées, contre le gaspillage. »
Un Secrétaire d’Etat et un pool des hauts risques
En plus des mesures pour harmoniser les lois, les modalités de financement et d’assurance, l’auteur propose la création d’un poste de Secrétaire d’Etat à la santé et la protection sociale qui aurait un rôle de rassembleur. Des mesures intéressantes et novatrices sont également suggérées pour la médecine de pointe, le secteur hospitalier ou la régulation des progrès technologiques.
Stéphane Rossini souligne l’importance d’une parfaite coordination des soins pour une prise en charge rigoureuse et optimale des patients. Il imagine aussi un « pool des hauts risques » qui serait financé par tous les assureurs en fonction du nombre de leurs assurés. Ce pool serait un élément-clé contre la déplorable chasse aux bons risques à laquelle se livrent les assureurs. Il répondrait également à cette donnée méconnue : « Environ 10% des patients, souffrant notamment de maladies graves ou chroniques, induisent plus du trois-quarts des coûts des assurances maladie. »
Le professeur et conseiller national souligne la dimension sociale de tout l’édifice et donne des pistes pour renforcer la solidarité, lutter contre le dumping des caisses ou contre les effets pervers des franchises élevées. Et il propose un objectif : « Aucun ménage ne devrait allouer plus de 8% de son revenu pour s’assurer contre la maladie. »
Retrouver l’envie d’agir
Contrairement aux déclarations tonitruantes de certains qui ne pensent qu’à réduire les coûts de la santé, Stéphane Rossini vise un objectif autrement plus ambitieux : « des soins de qualité, en quantité et à des coûts adéquats ». C’est probablement ce noble but qui rend les réformes proposées plus cohérentes et stimulantes pour tous les acteurs concernés : autorités, institutions hospitalières ou de soins, assureurs, assurés, médecins, vous, moi… Au lieu de dénoncer les coupables de la hausse des coûts de la santé, cette vision stratégique et sociale nous met tous, à égalité, devant les vrais défis. Bref, elle donne envie d’agir ensemble et non plus les uns contre les autres.
Marylou Rey
Télécharger l’article en format word