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Au revoir et MERCI, chère Marylou!

Lundi 01.02.2021

Avec le départ à la retraite de Marylou Rey, c’est une page qui se tourne aujourd’hui pour REISO. La rigueur et l’engagement de celle qui a été rédactrice en chef durant 12 ans ont fait de la revue un organe de référence en Suisse romande.

Marylou depart retraite© AC

« Marylou ? C’est une personne très persévérante, dotée d’une belle ouverture d’esprit ». Si les mots sont ceux de Jean-Pierre Tabin, professeur à la Haute école de travail social et de la santé de Lausanne et contributeur régulier à REISO, ils reviennent souvent dans les propos de celles et ceux qui ont croisé la route de Marylou Rey. « Elle a témoigné d’une vision claire de ce qui était possible et la foi que ça l’était, complète Anne Jacquier-Delaloye. Elle a avancé pas à pas, en trouvant les moyens financiers pour faire vivre la revue sans perdre les objectifs et les valeurs de départ. » La directrice de la Haute école de santé Valais tient à faire part de sa reconnaissance à la journaliste qui quitte aujourd’hui le monde professionnel. « J’ai beaucoup d’estime pour l’engagement dont elle a fait preuve pour passer les hautes vagues du début et tenir sur la durée. Il fallait de l’inventivité, une bonne dose d’optimisme, le tout teinté d’un humanisme indéniable. »

De la ténacité, il lui en aura effectivement fallu. En 2009, la revue électronique ayant succédé au magazine papier Repère Social prend l’eau et son comité envisage de fermer le site. Mais c’est sans compter sur la détermination de Marylou qui met alors toute son énergie pour s’entourer d’un nouveau comité. Elle définit une ligne éditoriale, formule l’ambition de faire de REISO un carrefour entre les acteurs et actrices des domaines social et de santé publique, qu’ils ou elles soient issu·e·s de la recherche, du monde institutionnel ou associatif. Son assiduité paie. En 2013, de nouveaux statuts sont adoptés, et l’audience dépasse les 10'000 visites mensuelles.

Aujourd’hui, REISO est reconnue comme une revue unique en Suisse romande, dont la force réside justement dans son indépendance et son approche interdisciplinaire. « On me demande souvent s’il existe un pendant de REISO en Suisse alémanique, mais je n’en ai jamais trouvé », souligne modestement Marylou Rey.

« Marylou adore se marrer »

Née à Sierre, la jeune femme déménage dans la capitale vaudoise lors de ses études en sciences sociales et politiques à l’Université de Lausanne. Inscrite au registre professionnel des journalistes depuis 1983, elle exerce ensuite dans plusieurs titres romands, dont 24 Heures, L’Hebdo et Femina. « C’est là que je l’ai connue, se souvient Virginie Confino. Elle faisait de l'édition et recevait les journalistes dans notre bureau commun pour parler de leur article pendant que je m'occupais des photos pour le magazine. » L’actuelle coordinatrice de REISO se souvient d’une ambiance à la fois joyeuse et sérieuse. « Marylou adore se marrer et a un rire communicatif. Mais elle devient très studieuse quand elle est plongée dans un texte. »

Cette activité d’édition aura été au centre de son travail. « Elle adorait sa fonction, bien qu'elle soit dans l'ombre, poursuit Virginie Confino. Elle avait à cœur de mettre en valeur le texte des auteurs et autrices, en espérant ne pas les froisser avec ses suggestions de corrections. » Tout au long de ses douze ans à la tête de la revue, Marylou Rey aura donc inlassablement agi hors du feu des projecteurs. « Il y a un énorme effort invisible qui est accompli pour que ça marche », confirme Gilberte Voide-Crettenand. Représentante de Santé sexuelle suisse au comité de REISO de la première heure et jusqu’à l’an passé, elle complète : « Grâce à l’accompagnement caché qu’elle a offert à des contributeurs et contributrices peu rompu·e·s à l’écriture, elle a participé à augmenter le partage de connaissances. Sans ce coaching, certain·e·s auraient sans doute renoncé. »

A côté de cette tâche primordiale, la rédactrice en chef n’a jamais cessé de conserver l’oreille tendue et l’œil ouvert. « Elle s’est toujours montrée attentive à ce qui se passe dans le domaine social », certifie Laurent Wicht. Le professeur associé à la Haute école de travail social de Genève et membre fondateur de REISO souligne le rôle essentiel qu’elle a joué : « Elle a sans cesse manifesté l’envie de valoriser les travaux qui avaient du sens pour le travail social en Suisse romande, même s’ils étaient mineurs dans le champ de la recherche. » Son de cloche identique auprès de Jean-Pierre Tabin : « Elle a eu le souci de la relève, en donnant pareillement la parole à des personnalités reconnues qu’à des jeunes. » Pour Bernard Manguin, chargé de communication à l’Hospice général à Genève, « Marylou Rey a continuellement témoigné d’une empathie importante à certains sujets. Son soutien a été très estimable. »

Engagée pour l’égalité et l’équité

Les voix concordent lorsque l’on se tourne du côté de la santé publique. « Grâce aux articles de REISO, notre spécialité, qui était encore peu explorée à l’époque, a pu faire entendre sa voix. » De leurs discussions au sujet de santé sexuelle, « un domaine au cœur de la santé psycho-sociale », Gilberte Voide-Crettenand gardera de belles images. « Marylou, c’est un personnage haut en couleurs. Elle aime les gens, elle aime comprendre. Elle a de grandes compétences et une sensibilité qu’elle cache parfois. »

L’attention qu’elle porte à l’équité et à l’égalité s’est aussi appliquée à la rédaction de REISO. « C’est une valeur très importante pour elle », confirme Margaux Délez Salvi, coordinatrice de la revue entre 2014 et 2017. « Nous sommes plusieurs étudiant·e·s à avoir eu la chance de travailler à ses côtés. Elle a toujours fait preuve d’un regard critique qui visait à nous faire progresser. »

Toutes et tous ont ainsi passé des heures « au Cerisier », la toute petite rédaction de REISO installée... dans l’appartement de Marylou et de son compagnon, dont la vue sur le Léman est à couper le souffle. « Quand j’ai appris que tout se passait chez elle, j’ai été surprise car je pensais que la revue était beaucoup plus grande », sourit celle qui est aujourd’hui collaboratrice scientifique prévention chez Addiction suisse. Si le cocon de l’attique lausannois était propice à la tâche, la dirigeante s’est néanmoins faite précurseuse en offrant depuis longtemps la possibilité de télétravailler.

De Japonophile à badiste

Amatrice d’Arte, de littérature, de cinéma et d’informatique, Marylou Rey a en outre longtemps foulé les courts de badminton. « La première image qui me vient en tête quand je pense à elle, c’est sur un terrain, raquette à la main », révèle pudiquement Jean-Pierre Tabin, qui est également un ami proche de la toute jeune retraitée. « Nous avons longtemps fait perdurer notre tradition du jeudi. Tous ces matchs partagés sont de bons souvenirs. »

Son affection pour les chats — « pas n’importe lesquels, les Bengal de ses voisins », plaisante Margaux Délez Salvi — et son amour de l’Asie lui ont également offert de riches conversations avec ses coordinatrices. « Elle m’avait ramené du Japon une tasse que j’utilise encore tous les jours », sourit l’ancienne collaboratrice.

A l’inverse des habituels « Repose-toi bien, c’est mérité ! » souvent recommandés aux néo-retraité·e·s, celles et ceux qui ont côtoyé Marylou Rey tiennent des propos aussi dynamiques que sa personnalité. « J’espère qu’elle pourra profiter au maximum de réaliser les projets qui lui tiennent à cœur », confie Bernard Manguin. Et Margaux Délez Salvi de renchérir : « Je suis enchantée pour elle de cette nouvelle phase de vie qui sera au moins autant remplie que son quotidien professionnel, mais la tête et le cœur plus léger. » Gilberte Voide-Crettenand, elle, l’encourage à entreprendre un voyage sans avion, différent : « Je lui souhaite de continuer son chemin en se sentant vivante. Qu’elle aille à l’intérieur d’elle-même et trouve ce qui lui fait du bien, ce qui la fait vibrer. »

En fin connaisseur de son amie, Jean-Pierre Tabin se réjouit du temps dont va désormais disposer Marylou. « Qu’elle continue d’être active et de faire ce qui lui plaît. » Cet encouragement serait-il de bon augure ? Il colle en tout cas avec les desseins de la fringante sexagénaire qui prévoit, en plus d'un voyage en Asie – si le coronavirus le permet – de se mettre au japonais et de se former au montage vidéo.

Céline Rochat

 

Les mots de Joseph Coquoz, président de REISO depuis 2010

« La revue REISO n’existerait pas aujourd’hui si elle n’avait pas bénéficié de la très grande générosité de Marylou Rey, qui a accepté de travailler sans salaire ou avec de maigres indemnités durant plusieurs années. Cette abnégation, son talent pour renouveler le site internet ainsi que son entregent pour solliciter des auteurs et autrices et valoriser leurs textes a progressivement élevé la revue au niveau de reconnaissance dont elle bénéficie désormais. Ce sont également ses qualités qui ont contribué à accroître le nombre d’abonné·e·s et les ressources financières.

Marylou a une très grande capacité à écouter ses interlocuteurs et interlocutrices, et à les faire se livrer. Cette posture en retrait, qui est probablement le propre d’une très bonne journaliste, a conduit la revue à pouvoir compter sur plus de 900 auteurs et autrices, dont plusieurs sont resté·e·s fidèles depuis dix ans.

Marylou savait être très convaincante quand il s’agissait de présenter REISO à des conseillers d’Etat, à des directions de Hautes écoles ou d’institutions sociales ou sanitaires, ou encore à de potentiel·le·s contributeurs et contributrices. Elle était aidée en cela par l’excellente qualité des articles publiés dans la revue et sa parfaite connaissance de tout ce qui y était paru. Elle pouvait ainsi indiquer en séance à tel·le professionnel·le combien d’articles étaient déjà parus sur sa spécialité dans REISO, en citant de mémoire les noms des rédacteurs et rédactrices. »

Commentaires
 
Jean Martin le 02.02.2021

Tout à fait excellent billet de "Au Revoir" et remerciements à Marylou (nos compatriotes alémaniques disent "Würdigung"), plein de choses justes et méritées. Pour ma part j'ai eu très grand plaisir et intérêt à collaborer activement avec REISO et avec elle au cours de ces années. Formidable, ce qu'a fait la formidable Marylou.

Jean Martin, Echandens

olivier kahn le 03.02.2021

« Départ » de Marylou Rey (…ne des journalistes). Pour l'avoir suivie – de l'agence AIR où l'on faisait du 4 X 4 tout-terrain à l'hypersocial REISO via « 24 HEURES » , « L'Hebdo » , « Fémina » , « Générations » ou les colloques des samedis matins aux Echelettes – voire parfois aussi subie comme cheffe-éditeuse-organisatrice-relectrice-réviseuse-coupeuse d'adverbes et d'adjectif en quatre-incitatrice-stimulatrice d'idées comme il y en a peu, et même découverte comme «fund-raiser» (sans jamais concéder un millimètre de son éthique), je voudrais savoir chanter (comme Jonasz sauf erreur) : « J'veux pas qu'tu t'en ailles aille, aye aïe, aïe, aïe... » ! Mais croyant savoir que ses suites ou relève à REISO sont plus que tracées-assurées, je m'éjouis de continuer à lire la revue désormais « en ligne » tout en continuant de trouver sa marque, sa patte et sa griffe ailleurs et autrement. MERCI.

Olivier Kahn, Lausanne

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