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Une étude menée notamment par Unisanté, à Lausanne, se penche sur les conséquences environnementales de l'utilisation des masques. Résultats ? Le meilleur compromis entre protection sanitaire et environnement est la stratégie du « semainier ».
Des masques chirurgicaux au bord des routes, dans les forêts, emmêlés sur des animaux maritimes. Des masques jetables produits dans des conditions parfois inconnues à l’autre bout du monde, et importés par cargos ou par avions. Des masques portés par la population suisse là où la Confédération les a rendus obligatoires, dans le but de lutter contre la pandémie de Covid-19. Si l’urgence sanitaire a, jusqu’à présent, prévalu sur les considérations écologiques liées à la production et à l’usage de ces dispositifs sanitaires, Unisanté et Environmental Action ont mené une recherche pour connaître l’impact environnemental de l’usage quotidien de masques. Le but final ? Déterminer quelle solution de protection est la plus efficace en termes écologique et sanitaire.
Ainsi, pour répondre aux enjeux de durabilité tout en maintenant l’efficacité protectrice de ces dispositifs, les deux instituts concluent qu’il s’agit de privilégier la « stratégie d’attente et de réutilisation » ou « semainier ». Celle-ci implique de laisser « reposer » son masque chirurgical à l’air libre pendant sept jours avant de le réutiliser, ce qui permet de diminuer par dix le nombre de masques utilisés. « Cette solution est à la fois efficace, avantageuse et durable », assure Unisanté.
Les résultats de la recherche sont présentés dans une infographie réalisée par Environmental Action, une société de conseil en recherche à but non lucratif visant à « faire progresser la science et les indicateurs pour concevoir un avenir durable. » Celle-ci fait partie de Reffnet, le Réseau suisse pour l'efficacité des ressources, lancé il y a quatre ans par l'Office fédéral de l'environnement.
Cette publication résume de manière visuelle les enjeux écologiques cachés derrière la production et l’emploi des masques. Cette infographie indique par exemple que l’usage de masques médicaux durant un an, en Suisse, engendre quelque 45'303 tonnes d’empreinte carbone. Sur les 9'295 tonnes de déchets plastiques générés, quelque 186 tonnes se retrouvent dans la nature.
Une section porte sur les potentiels d’action et leurs conséquences. L’emploi d’un masque médical jetable réutilisé après sept jours d'attente permet de diminuer l’empreinte carbone de 90% et d’autant celle de l’empreinte plastique par rapport à un usage unique. Un masque en coton lavable, fait maison, réduit de 97% l’empreinte carbone et de 100% l’empreinte plastique.
Au final, Environmental Action estime que si 10% de la population suisse utilisait soit la stratégie d’attente et de réutilisation des masques chirurgicaux, soit un masque en tissu fait maison, environ 4'240 tonnes d’émissions de CO2 (l'équivalent de 5'600 vols individuels Paris-New York) et 18 tonnes de plastique (correspondants à 10'000'000 bouchons de bouteilles) pourraient être économisées.
Unisanté précise encore que « bien que les masques dits chirurgicaux soient normalement destinés à un usage unique, il a été démontré que certains traitements tels les UV, les micro-ondes ou la chaleur sèche peuvent les décontaminer efficacement, sans altérer significativement leur capacité barrière ». Ils peuvent donc soit être exposés pendant au moins trente minutes à 70 degrés, lavés cinq à vingt fois à 60 degrés ou réutilisés jusqu’à dix fois après sept jours de conservation à l’air libre.
En strict matière de protection contre le virus, Unisanté affirme que « les masques chirurgicaux contribuent plus efficacement que les masques en tissu à la protection collective, en réduisant les émissions de gouttelettes et, dans une moindre mesure, les émissions d'aérosols des porteurs infectés ». C’est la raison pour laquelle leurs conclusions se tournent vers la méthode du semainier: « Le meilleur compromis entre l'impact environnemental et l'efficacité de la protection est l’utilisation de masques chirurgicaux avec une stratégie d'attente et de réutilisation ». Et de compléter : « Une telle approche permettrait non seulement de réduire l'impact environnemental des masques, mais aussi de rendre le système de santé publique plus résiliant en cas de pénurie. Enfin, la stratégie d’attente et de réutilisation des masques est économiquement plus avantageuse car elle permet de limiter l’achat de masques à usage unique, ce qui est important pour l’accès aux mesures de protection des personnes ayant des ressources financières limitées. »
(croc)
Lien vers l'infographie en français
Lien vers les résultats détaillés de l’étude