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La participation culturelle, un enjeu démocratique

Lundi 27.09.2021
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A Lausanne, deux étudiant·e·s en médiation culturelle ont proposé un projet axé sur la participation à la culture comme expérience de réappropriation démocratique. Une dizaine de femmes et une artiste y ont pris part.

Par Thierry Scherer, médiateur culturel, Destination 27, Genève et Lausanne

Le philosophe John Dewey affirme que « la démocratie est une réalité uniquement si elle est un lieu de vie en commun (...) qu’elle est pour chacun une manière personnelle de vivre » (Dewey, 1997). C’est dans cet état d’esprit que le public du centre socioculturel Pôle Sud, à Lausanne [1], a pris part à un projet de médiation culturelle avec un degré de participation « collaboratif ».

Ce degré de participation « collaboratif » (Carmen Morsh, 2015) ou « impliquant » selon d’autres terminologies, laisse entendre que les participant·e·s ont contribué aux décisions, sont intervenu·e·s dans les contenus, ont décidé des thèmes, des formes mais aussi des méthodes et même des horaires des ateliers. L’objectif global du projet était de co-créer un objet culturel commun, dont la forme serait décidée par iels, et non imposée par les médiateur·trice·s ou l’institution. Les processus de concertations, co-décisions et co-créations autour de cette œuvre ont fait l’objet de cette intention de réappropriation démocratique par le public.

Pôle Sud est reconnu pour ses animations socioculturelles ouvertes à tou·te·s. Leurs activités, comme les cours de langues, la poterie, l’informatique, la peinture ou la création de documentaires, sont centrées sur des pratiques où les participant·e·s « prennent part » davantage qu’iels « n’apportent une part » (Joëlle Zask, 2011). Ces propositions laissent donc au public un degré de participation « réceptif », dans lequel les thèmes et les méthodes sont fixés sans sa concertation.

Le degré collaboratif s’avère relativement compliqué à faire accepter auprès d’une institution, puisque la finalité d’un programme ne peut pas être prédéterminée par un objectif ou un horizon précis. Dans le cas présent, il a donc fallu convaincre Pôle Sud de s’engager dans un projet qui se co-construirait petit à petit. L’idée a fait son chemin, et, finalement, l’institution s’est faite l’ambassadrice de cet objectif auprès de la Fondation pour l’animation socioculturelle lausannoise. Son but ? Donner les ressources nécessaires aux médiateur·trice pour concrétiser leur idée.

De la conception théorique à la création pratique

Un appel à la participation a été lancé sur le site internet du centre socioculturel, ainsi que via des affiches et flyers en interne. C’est donc un public non choisi qui a été invité à s’investir. A la séance d’information, une dizaine de femmes, de 25 à 65 ans, se sont présentées.

En septembre 2019, les premiers ateliers ont porté sur le sens donné à la culture pour chacune d’entre elles. Certaines y voyaient un héritage à transmettre, non sans se l’être approprié ; d’autres y revendiquaient une opportunité de faire passer des messages à des institutions culturelles trop inaccessibles, dans une idée de culture « alternative ».

Une rencontre a été entièrement dédiée au choix des thématiques qui seraient abordées artistiquement. Après de longues délibérations, ce sont « la place des femmes dans la société », « la nature », « l’anticonsumérisme » et « remettre de la beauté dans le quotidien » qui ont été retenus.

Dans l’ultime atelier de cette première phase, les participantes ont finalement choisi sous quelle forme représenter au mieux les quatre thèmes. Bien que disposant en majorité de compétences dans les arts vivants, elles ont décidé de travailler sur une installation. Cet atelier a clos la phase de conception théorique et abouti à une idée globale en vue de la création de l’objet culturel commun.

Une artiste pour guider le groupe

L’historien de l’art Christian Joscke conclut que « la commande définit l’intérêt partagé, et que la nature artistique, elle, garantit la survivance de l’œuvre au-delà du moment fédérateur » (2013). Ainsi, il a été décidé de solliciter une artiste professionnelle pour accompagner le processus de co-création. Et afin que les rôles soient clairement partagés entre toutes les parties prenantes, les cahiers des charges respectifs ont été définis par le groupe dans un diagramme de Venn.

Les médiateur·trice·s ont alors présenté le travail de l’artiste Mathilde Tinturier aux contributrices. Ces dernières l’ont beaucoup apprécié et, à l’aide d’un outil dynamique [2], ont créé des phrases autour de son œuvre « Bois flottant ». Ces textes lui ont été envoyées et l’ont convaincue de se joindre à cette aventure. La Genevoise a accompagné une vingtaine d’heures de travail artistique pratique.

La recherche artistique s’est axée autour de matériaux naturels. Le travail de Mathilde Tinutrier associe en effet éléments organiques et déchets, tels qu’emballages de bonbons, pailles ou sachets de thé. Sa pratique s’est révélée parfaite pour rendre hommage à deux des thèmes, « la nature » et « l’anticonsumérisme ».

Tous les matériaux ont été amenés par le groupe ou récoltés ensemble lors d’une sortie champêtre aux abords de la Louve. Un travail d’allers-retours entre les attentes des participant·e·s et le savoir-faire de la professionnelle a alors commencé. Les gestes, les formes, les couleurs ont été discutés et matérialisés durant toute la phase. En raison de la fermeture de Pôle Sud [3], l’œuvre conséquente prévue en commun s’est transformée en petites créations personnelles. La jeune femme a continué à guider le groupe en visioconférence durant toute la période exceptionnelle qui empêchait le collectif de se retrouver.

Une expo transformée en parapluies déambulants

L’objet culturel devait être « restitué » à un large public de Pôle Sud en janvier 2021, sous la forme d’une exposition intitulée Et vous ? Quelle est votre nature ? Toutefois, un tel évènement ne pouvait pas avoir lieu en raison des mesures sanitaires. Il a donc fallu imaginer un autre procédé pour terminer le processus.

Pole Sud parade parapluie 400© Thierry Scherer

La forme de parapluies a été évoquée durant nos ateliers. Cette structure est apparue comme symbolique de la démarche. Les multiples baleines accrochées aux manches de ces objets métaphorisaient parfaitement l’intention du projet commun : co-construit par des pensées diverses, articulées autour d’un « tronc » collectif. C’est ainsi que quatre des contributrices sont parties à la rencontre des habitant·e·s de Lausanne armées de parapluies dénués de leurs toiles. A leurs extrémités, quelques créations.

Lors de leur déambulation sur la Place de l’Europe et celle de la Riponne, elles ont posé trois questions aux spectateurs et spectatrices involontaires : « Qu’est-ce que l’art pour vous ? », « Et vous ? Quelle est votre nature ? » et « Si vous aviez une baguette magique, que changeriez-vous dans le monde ? » Ce happening a conduit à un documentaire retraçant l’ensemble de l’expérience, monté sur la base d’images d’abord tournées sans intention précise par les participantes. Des plans y ont été ajoutés afin de décrire l’expérience vécue au public. Le film, sous-titré par les médiateur·trice·s en français à l’attention des personnes malentendantes et dans les trois autres langues parlées par les participantes [4], a été projeté à Pôle Sud en mai 2021. [5]

Pole Sud parade parapluie 2© Thierry Scherer

 En plus, une page Facebook a été créée pour favoriser les réactions aux créations du groupe. Cette page est aujourd’hui toujours alimentée par les participantes ainsi que par un public plus large et international.

S’allier par l’intermédiaire des objets

La volonté de créer un projet citoyen à degré de participation collaboratif a pu prendre forme dans le cadre des activités de Pôle Sud. Les médiateur·trice·s ont fait valoir l’objectif de créer une proposition artistique de toute pièce, sans visée prédéfinie.

Les échanges avec l’artiste ont enrichi l’expérience esthétique de chacun·e et apporté un savoir-faire et une approche particulière et personnelle au thème de la « nature », entre autres. Les effets personnels et les matériaux de construction des œuvres leur ont permis de s’allier au-delà des positions individuelles, par l’intermédiaire de l’expérimentation des objets. Ces observations illustrent :

« L’idée selon laquelle les expériences se rencontrent dans un monde d’objets partagés est essentielle dans le travail social. (…) Ce que nous comprenons d’un autre individu est essentiellement la manière dont il expérimente des objets que nous expérimentons aussi. » (de Jonckheere, 2010).

Dans un article retraçant l’histoire de onze dispositifs pour la revue Terrain & Travaux, Beuscart & Peerbaye avancent que :

« ... une des caractéristiques du dispositif est de survivre à l’intentionnalité et aux visions qui ont présidé à sa mise en place : le dispositif se maintient au-delà de l’objectif stratégique initial [...] chaque effet engendré par le dispositif, positif ou négatif, voulu ou non voulu, vient entrer en résonance, ou en contradiction avec les autres et appelle à une reprise, à un rajustement, des éléments hétérogènes. » (2006).

Durant cette année et demie qu’a duré le projet « Et vous ? Quelle est votre nature ? », les participantes se sont affirmées au fur et à mesure des rencontres. Expérimentant l’altérité, elles ont exprimé des opinions hétérogènes, s’opposant parfois entre elles aussi bien sur les objets des rencontres que sur les mesures sanitaires en vigueur. Elles ont défini leurs goûts et se sont ainsi imposées davantage au sein du groupe et auprès de l’institution. Elles ont surtout pu s’allier dans l’objectif de la création d’une œuvre commune les représentant.

Il reste à espérer que les dispositifs à degré « collaboratif » de participation du public se multiplient dans les institutions sociales. Pour rendre possible une certaine émancipation des citoyen·ne·s, et favoriser une véritable réappropriation de leur droit démocratique de « prendre part à la vie culturelle de la communauté et du pays. » [6]

Bibliographie

  • Dewey, J. (1997). La démocratie créatrice : la tâche qui nous attend. Horizons philosophiques, Volume 5 (N°2), 41–48.
  • Mörsch, C. (2015). Le temps de la médiation. Ed. Pro Helvetia.
  • Joscke, C. (2003). Faire art comme on fait société : les Nouveaux commanditaires. Ed. Les Presses du réel.
  • Zask, Joëlle. (2011). Participer. Essai sur les formes démocratiques de la participation. Ed. Le Bord de l’eau.
  • Zaugg, R. (1993). Vom Bild zur Welt, Ed. Buchhandlung Walther König.
  • De Jonckheere, C. (2010). 83 mots pour penser l’intervention en travail social. Ed. IES.
  • Beuscart, J.-S. & Peerbaye, A. (2006). Histoires de dispositif, Terrains & Travaux, (nº11) page 4.

[1] Ce sont deux étudiant·e·s du diplôme d’études supérieures en médiation culturelle à la Haute école de travail social et de la santé Lausanne (HES-SO) qui ont proposé ce projet à Pole Sud, institution partenaire de leur projet de diplôme.

[2] Le jeu Les Mots du Clic est un outil dynamique qui a été créé par le pôle de ressource photographique strasbourgeois Simultania afin de questionner le regardeur. Il est à la fois un jeu d'observation, d'acquisition de vocabulaire et de réflexion. Il favorise l'élaboration de critique d'image.

[3] Au printemps 2020, Pôle Sud a dû fermer ses portes pendant le semi-confinement lié à la pandémie de coronavirus.

[4] Cette traduction a été proposée par considération pour leurs familles ou leurs proches.

[5] Le film est également hébergé sur la chaîne Vimeo de l’institution. Lien de visionnage

[6] Article 27 des droits de l’homme.

Cet article appartient au dossier Chaudron de culture

Comment citer cet article ?

Thierry Scherer, «La participation culturelle, un enjeu démocratique», REISO, Revue d'information sociale, mis en ligne le 27 septembre 2021, https://www.reiso.org/document/7987

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