Quelle intégration scolaire pour les enfants sourds ?
La Fédération suisse des sourds propose quatre priorités afin d’améliorer l’accès des sourds et malentendants à la formation. Car si le droit fondamental à la formation est généralement reconnu, il reste un vœu pieux pour les malentendants.
Par Daniel Hadorn et Eva Hammar, Fédération suisse des sourds
La Journée internationale des personnes handicapées a été proclamée, en 1992, par les Nations Unies. Elle est l’occasion de réaffirmer la reconnaissance de droits fondamentaux tels que l’accès à l’éducation ou à la formation, un droit non garanti pour un grand nombre de personnes handicapées, dont les personnes sourdes et malentendantes.
En Europe, la langue des signes a été interdite – à tort – pendant plus d’un siècle et, aujourd’hui encore, elle n’est pas utilisée partout comme langue d’enseignement. Cette réalité rend très difficile, voire impossible, l’accès des enfants et des jeunes sourds et malentendants à une scolarité et à une formation adaptées à leur potentiel. Ainsi, en Suisse, les jeunes sourds accèdent trop rarement aux formations supérieures. Cette situation n’est pas une fatalité !
Prenons pour exemple les Etats-Unis. Non seulement la langue des signes n’y a jamais été interdite, mais elle est aussi reconnue comme langue d’enseignement. Il existe des universités dont les cours sont donnés en langue des signes, ce qui permet aux personnes sourdes et malentendantes d’avoir accès à des formations supérieures et de devenir médecins ou avocats. Une option quasiment impossible en Suisse !
Dans notre pays, la tendance actuelle consiste à vouloir intégrer les enfants et les jeunes sourds ou malentendants individuellement dans les écoles régulières. Or l’intégration individuelle augmente le risque que la langue des signes soit marginalisée, et donc que ces enfants et jeunes subissent un déficit en informations ainsi qu’un accès à une formation adéquate difficile.
Les expériences à l’étranger montrent que la langue des signes est LA clé ouvrant l’accès des jeunes sourds et malentendants à une formation adaptée à leurs potentialités. Cette langue naturelle a fait l’objet de recherches linguistiques et reste la première langue des sourds et des malentendants. Malgré ce que certains spécialistes prétendent, les progrès médicaux et techniques n’arrivent pas à supprimer la marginalisation de nombreux jeunes sourds et malentendants qui ont décroché au niveau scolaire. Afin de rappeler l’importance de la langue des signes dans la formation, la Fédération suisse des sourds propose quatre priorités à l’adresse des autorités et des responsables de la formation en Suisse :
1. Une formation équivalente à celle des entendants pour les enfants et les adolescents sourds et malentendants grâce à une préscolarisation adaptée et à une intégration/inclusion par groupes (et non pas individuelle) dans les classes régulières.
2. Des cours de langue des signes gratuits pour les parents d’enfants sourds et malentendants.
3. Un accès amélioré à la formation supérieure pour les sourds et malentendants.
4. Une amélioration de l’intégration des sourds et malentendants dans le monde du travail grâce à une large campagne d’information et à un meilleur soutien des employeurs.
Pour atteindre ces buts, la Fédération suisse des sourds estime qu’il serait opportun de créer un centre de compétences spécialisé dans les questions liées à la surdité et la langue des signes.