Tout le monde peut jouer au Rafroball
Ce sport s’inspire du foot, du handball et du basket. Inventé en Valais il y a une quinzaine d’années, il permet à toute personne, handicapée ou valide, de jouer en équipe et de participer à un championnat national.
Par Aurore Martinez, coach de Rafroball et étudiante à la Haute Ecole fribourgeoise de travail social, Givisiez
A l’origine du Rafroball : quatre amis qui voulaient faire du foot ensemble. Mais quand on est en chaise roulante, ce n’est pas facile. Alors ils ont pris des morceaux de jeu dans le foot, le handball et le basketball, inventé quelques règles originales et formé une équipe. Pour donner un nom à ce nouveau sport accessible à tous, Thierry RApillard, Lionel et Jonas FROssard, Prince BALLestraz ont ensuite mélangé leurs noms de famille et le « Rafroball » était né.
L’objectif du Rafroball est de permettre aux sportifs et aux sportives valides ou non de pratiquer un sport et d’y prendre du plaisir. Il n’impose aucune limite d’âge. Seules conditions strictes : respecter l’esprit sportif, le fair-play et l’égalité. Ce nouveau sport fait découvrir aux personnes valides la mobilité en fauteuil roulant et aux personnes en situation de handicap la pratique d’un sport partagé. Il a pour but de cultiver les amitiés et l’intégration.
Les premières journées de Rafroball ont eu lieu dès 1996. Au fil des années, le règlement est devenu plus précis. Une équipe est constituée de cinq membres dont un maximum de deux joueur·se·s valides qui ont l’obligation de jouer en chaise roulante et d’un minimum de trois joueur·se·s en situation de handicap (déficiences motrices, sensorielles, visuelles, auditives ou autres). Trois arbitres officient à chaque match : l’arbitre principal qui siffle sur le terrain de jeu, le juge arbitre qui note les scores et l’arbitre assistant qui signale avec son drapeau d’éventuelles fautes de jeu.
L’égalité des chances au centimètre près
Les deux mi-temps du match durent chacune 15 minutes. Toutes les règles sont adaptées. Des avantages sont donnés aux joueur·se·s selon leurs besoins (avantage d’un mètre pour faire une passe par exemple). Une personne ayant besoin d’une aide pour se déplacer, lancer et/ou attraper la balle bénéficie d’un « moteur », c’est-à-dire de l’aide d’une personne valide. Ces deux personnes forment un réel binôme : quand le sportif ou la sportive a besoin d’aide pour lancer la balle, le « moteur » peut l’aider par une guidance physique de la main et/ou un support adapté (tablette sur les genoux par exemple). Les dimensions des buts sont mesurées au centimètre près afin de créer une égalité des chances entre les gardiens qui peuvent être piéton, en chaise ou à genoux. Une zone de gardien est délimitée et personne mis à part le gardien ne peut la franchir. Les passes se font à la main mais les déplacements balle en main sont interdits, sauf dans le cas d’un joueur en chaise qui reçoit une passe et qui profite de son élan pour avancer en ligne droite.
Depuis 2006, l’Association Rafroball s’active pour promouvoir ce sport partout où des personnes à mobilité réduite ont peu de possibilités de pratiques sportives. C’est elle aussi qui organise chaque année le championnat national. Depuis 2008, un camp d’été est organisé en juillet. En 2012, le championnat a compté onze équipes, soit 148 joueurs et 24 arbitres. La compétition comprend deux ligues différentes.
- La ligue FUN est composée de six équipes débutantes et/ou d’équipes n’ayant pas la possibilité de s’entraîner. Rafro Vaches Fribourg, Sport Up Blue et Sport Up Red de Lausanne, Rafro Band Club FUN de La Chaux-de-Fonds, Super-Potes de Sierre et Rafro-Potes, équipe composée de joueurs venant d’horizons différents et n’ayant pas d’équipes de Rafroball dans leur région.
- La ligue SPORT comprend quant à elle cinq équipes ayant déjà une bonne expérience du jeu et pouvant s’entraîner : Payerne Amine, Vita Payerne, Rafro Veveyse pour la région de Châtel-St-Denis, RafrolaTchaux et Rafro Band Club Sport à La Chaux-de-Fonds.
Toutes les équipes sont actuellement basées en Suisse romande, mais des démarches sont en cours afin de développer le Rafroball en suisse alémanique.
Le Rafroball et le travail social
D’un point de vue sociologique, le sport est souvent considéré comme un moyen efficace d’intégration sociale pour les personnes en marge de la société et pour les personnes en situation de handicap en particulier [1]. Pour Gasparini et Talleu [2], le sport, par le rôle social qu’il définit, apparaît comme un vecteur d’intégration, de reconnaissance de soi-même, de respect des autres et de dépassement de soi. Le sport a aussi une influence positive sur d’autres plans : il favorise l’apprentissage de règles pécises, la ténacité, l’esprit d’équipe. Ce qui est appris lors d’activités sportives est transposable dans la vie en société, dans la famille, à l’école ou ailleurs.
Pour J. Gaillard [3], le sport constitue un pilier important de la vie sociale, source d’engagement et d’épanouissement personnel, encourageant le partage et le sens de la communauté. Le sport facilite également les échanges interpersonnels lorsque l’on trouve sa place dans un club qui accepte de promouvoir le droit à la différence. Selon I. Vykhodetf [4], il est essentiel que les organisations publiques et sociales favorisent le développement et le renouvellement du sport incluant les personnes en situation de handicap, afin de favoriser la santé, le bien-être et la qualité de vie de tous.
Précisément conçu dans cette perspective, le Rafroball est un sport accessible à tous et à toutes. Venez le découvrir lors d’une prochaine journée de championnat [5] !
[1] Marie Ruffieux et Aurore Martinez : « Intégration sociale : l’influence du sport vue par les personnes atteintes de la sclérose en plaques », titre du travail de bachelor en cours, HEF-TS, Givisiez.
[2] GASPARINI, W., TALLEU, C., Sport et discrimination en Europe, Strasbourg, Publishing Editions (Conseil de l’Europe), septembre 2010.
[3] GAILLARD, J., « Défi personnel, défi sociétal, le sport pour accepter la différence vers une compréhension mutuelle », in GAILLARD, J (ss la direction), Pratiques sportives et handicap, « Ensemble, sportons-nous bien », Lyon, Chronique Sociale, 2007, p. 17.
[4] VYKHODETF, I., Améliorer la qualité de vie des personnes handicapées en Europe : participation pour tous, innovation, efficacité, Actes de la conférence Saint-Pétersbourg, Fédération de Russie, 21-22 septembre 2006, Conseil de l’Europe, 2007.
[5] L’Association Rafroball organise une journée Fair-Playades en automne 2013, à la Halle des Fêtes de Payerne. Ce tournoi amical est ouvert à tous et à toutes. En attendant, consulter le calendrier 2013 sur le site internet de l’Association. Ndlr : l’auteure de cet article, Aurore Martinez, est le coach de l’équipe de Rafroball de Payerne Amine.