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Recette inédite pour migrant·e·s peu scolarisé·e·s

Jeudi 14.10.2021
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À Epalinges, une mesure originale favorise l’insertion sociale des personnes réfugiées grâce à un programme de formation basé sur la confection de jus de fruits. Ou comment transformer activités pratiques en un atout andragogique.

Par Gabrielle Michel et Eva Roth-Kleiner, mesure Smoothie Intégration, Epalinges

Pour les personnes migrantes, l’apprentissage de la langue du pays d’accueil occupe une place prépondérante dans le processus d’intégration. En effet, il leur donne accès à de nombreux autres domaines d’inclusion, tels que le marché du travail, un réseau social local, ou la compréhension de codes sociaux et culturels.

En Suisse, après quelques années de résidence, ces hommes et ces femmes bâtissent généralement des projets et aspirent à « aller plus loin ». Durant cette phase, il peut arriver qu’ils et elles se heurtent plusieurs fois à la même réponse : « votre niveau de français n’est pas suffisant ». Pour certain·e·s, cet impératif institutionnel de connaissances linguistiques s’avère décourageant, contre-productif, et entraîne à son tour une perte de confiance en soi et un isolement (Gout 2015 : 139). Pour d’autres, le chemin de l’appropriation de la langue apparaît comme semé d’embûches et de difficultés, en raison notamment d’une scolarité écourtée, de traumatismes encore vifs, ou de problèmes d’ordre privé accaparant l’énergie et la concentration.

De plus, pour ce public allophone, l’apprentissage de la langue française n’est pas un but en soi ; ces personnes ne sont pas venues en Suisse pour étudier la langue (comme des apprenant·e·s dans le cadre d’un échange linguistique, par exemple), mais cherchent à obtenir les moyens de l’utiliser de façon efficace et appropriée dans la vie de tous les jours. Dès lors, le français représente un outil de (sur)vie et d’intégration, qui nécessite des méthodes d’enseignement spécifiques.

Smoothies et apprentissage

Il s’agit donc de trouver des solutions de formation capables de redonner des perspectives et de la motivation. Telle est l’une des lignes directrices de la mesure Smoothie Intégration, basée à Epalinges (Vaud). Créée en 2017, elle propose une approche innovante destinée à des réfugié·e·s qui progressent peu dans les cours aux méthodes d’apprentissage scolaires. Le programme vise à redonner le goût d’apprendre et la confiance nécessaire pour s’améliorer.

Pour ce faire, la démarche est centrée sur la communication et les activités manuelles. À travers la confection de jus de fruits (smoothies) et d’autres produits artisanaux, les participant·e·s sont amené·e·s à pratiquer le français oral et écrit, les calculs, et la planification. L’étape suivante est d’endosser le rôle de vendeurs et vendeuses. Ils et elles distribuent alors ces produits sur un petit stand dans l’espace public ou dans le cadre d’événements festifs ou culturels locaux. L’apprentissage se fait ainsi par immersion dans la langue : par le choix et la lecture de recettes, les achats à l’aide d’une liste de courses créée soi-même, la coupe des fruits, le calcul des quantités, la préparation du matériel, ou encore la mise en pratique des normes d’hygiène.

Les ventes deviennent alors des plateformes d’échanges et de communication, dans lesquelles les participant·e·s ont un rôle actif et valorisant : ce sont elles et eux qui présentent leurs produits, qui expliquent les ingrédients utilisés, le goût, la texture. En contact avec la population locale, dans un cadre réel et concret mais sécurisant, les apprenant·e·s expérimentent les calculs de prix et le rendu de la monnaie, la présentation soignée des produits et de leur personne, et développent leurs compétences orales au fur et à mesure des interactions.

Lorsque la saison (ou une situation sanitaire particulière…) ne se prête pas à l’organisation de ventes, d’autres activités viennent compléter les cours en classe : la cueillette de fruits chez des habitant·e·s ou agriculteurs·trices, des sorties culturelles, la visite de la bibliothèque du quartier, ou encore l’approfondissement de thématiques spécifiques à travers un suivi individualisé.

Implication et co-construction

Les participant·e·s sont souvent issu·e·s de cultures dans lesquelles la pédagogie est axée davantage sur la transmission orale de connaissances et de compétences. Ce programme d’intégration aspire ainsi à créer un cadre d’apprentissage qui combine formation, activités et liens sociaux. En effet, les études en didactique des langues ont souligné l’importance de l’affectif dans les processus d’apprentissage (voir par exemple Stevick 1980). Ainsi, au-delà du contenu enseigné, des facteurs individuels comme l’anxiété et l’estime de soi, ou encore les liaisons interpersonnelles et la qualité des interactions en classe, revêtent toute leur importance. Comme le souligne Gout (2015: 140), « avec ce public migrant [...], la relation, la mise en confiance, la création d’un climat bienveillant apparaissent comme une condition sine qua non de leur apprentissage linguistique ».

Sur la base de ces constats, un point central de la philosophie de Smoothie Intégration est d’instaurer une atmosphère conviviale et rassurante dans le cadre de la classe, dont la taille est relativement limitée : environ huit participant·e·s sont accueilli·e·s pour des sessions de six mois. Ils et elles sont instruit·e·s par trois formatrices à raison de cinq demi-journées par semaine. Cette configuration favorise les échanges, ainsi que le suivi rigoureux de l’évolution de chacun·e.

Les contenus et activités du programme font appel à un maximum de sens ; il faudra par exemple observer et goûter un smoothie avant de pouvoir le décrire, donner son avis et parler des améliorations possibles avec ses collègues, puis utiliser ses mains pour peser, couper, et rajouter tel ou tel ingrédient. Ce faisant, le vocabulaire est assimilé sans avoir de liste écrite sous les yeux ; il se construit à partir d’objets concrets et de situations pratiques. Vu la force des sensations premières, il n’est pas rare que le parfum d’un ingrédient ou le goût d’un fruit exotique ravive des souvenirs, délie les langues, évoque des émotions, permette d’accéder à des dimensions surprenamment profondes de partages, de récits et de solidarité entre les personnes présentes.

La répétition occupe une place importante dans le processus d’apprentissage. Ainsi, une réflexion est menée pour trouver les techniques de mémorisation qui conviennent à chacun·e, et pour inscrire la progression de l’apprenant·e dans la perspective plus large de ses projets d’insertion socioculturelle et professionnelle. Une formatrice référente est donc attribuée à chaque participant·e. L’usage systématique d’une feuille de route individualisée contribue à visualiser les objectifs didactiques, tout en accompagnant la progression de manière personnelle.

Dans la mesure du possible, l’on favorise les interventions et activités co-construites. L’impulsion est généralement donnée par les formatrices, qui sont conscientes des ressources et du réseau sur lesquels il est possible de s’appuyer. Chacun·e reste toutefois impliqué·e dans l’ensemble des étapes de la mise en œuvre. Souvent, les participant·e·s sont expert·e·s dans des domaines particuliers ; que ce soit pour effectuer la coupe astucieuse d’un ananas, une tâche culinaire, la création d’un baume hydratant pour les mains, ou une activité de ménage, ils et elles apportent et réalisent leurs idées.

Saisir, prendre, comprendre, apprendre… Quelle évidence que l’appropriation manuelle et cognitive sont intimement liées. Rien de surprenant par conséquent que, plus d’une fois, des migrant·e·s aient fait les remarques suivantes : « Avant, je n’ai pas compris. Maintenant, je comprends ». Ou encore « Smoothie Intégration, c’est très bien pour moi. Avant, ma bouche était fermée, maintenant elle est ouverte ! »

Défis et réalités

Bien sûr, malgré ces retours encourageants, il existe des défis dans cet accompagnement sur-mesure de personnes réfugiées. Par exemple, il faut parfois les rendre attentives à certaines réalités, notamment concernant les envies d’insertion rapide sur le marché du travail. Les attentes sont souvent grandes dans ce domaine, particulièrement pour les plus jeunes. Il s’agit alors de les sensibiliser à la nécessité de ne pas brûler les étapes, d’avancer petit à petit, tout en maintenant l’encouragement et la motivation. La fragilité physique et psychologique souvent présente ne facilite pas non plus une insertion rapide dans une société et une économie basées sur une notion occidentale de performance.

La grande hétérogénéité des participant·e·s, en termes d’âge, de nationalité, de situation de vie et de famille, de religion ou de capacités cognitives, est perçue à la fois comme une grande source de richesse, de diversité et d’inspiration, mais aussi de défis et de remise en question.

Ainsi, les préceptes de Johann Heinrich Pestalozzi, dont on fête le 275ème anniversaire en 2021, demeurent plus appropriés que jamais. Le célèbre pédagogue suisse affirmait que l’apprentissage passe aussi bien par la main et le cœur que par la tête. Ce principe de formation holistique retrouve soudain une nouvelle pertinence andragogique de nos jours, dans son impact observé dans la formation de personnes de tous âges, issues de la migration.

Bibliographie

  • Arnold, J. (2006). Comment les facteurs affectifs influencent-ils l’apprentissage d’une langue étrangère ? Ela. Etudes de linguistique appliquée, 4(144), pp. 407-425.
  • Gout, M. (2015). Quatre approches didactiques pour la formation linguistique des migrants nouveaux arrivants. Migrations Société, 6(162), pp. 139-154.
  • Stevick, E. (1980). Teaching Languages: A Way and Ways. Rowley, MA: Newburry House Publishers.

Comment citer cet article ?

Gabrielle Michel et Eva Roth-Kleiner, «Recette inédite pour migrant·e·s peu scolarisé·e·s», REISO, Revue d'information sociale, mis en ligne le 14 octobre 2021, https://www.reiso.org/document/8074

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