René Knüsel, un politologue humaniste de proximité
© UNIL
Éminent sociologue romand, René Knüsel a marqué le paysage du travail social et des politiques sociales en Suisse romande par la diversité de ses sujets de recherche. Hommages.
Par André Berchtold, professeur associé, et Jacques-Antoine Gauthier, maître d’enseignement et de recherche, Institut des sciences sociales, Université de Lausanne
Natif des bords du Léman, René Knüsel a fait ses études à l’Université de Lausanne (UNIL), où il a développé son intérêt pour les sciences politiques et les problèmes sociaux. Étudiant brillant, il reçoit le prix Whitehouse pour son mémoire de licence intitulé : « Les assurances sociales : La Lex Forrer » en 1980 et le prix François Hauser couronne sa thèse de doctorat : « Les Minorités ethnolinguistiques autochtones à territoire : l'exemple du cas helvétique ». L’UNIL le nomme logiquement professeur ordinaire en 2004, poste qu’il quittera à sa retraite en 2020. Durant ces années, il aura notamment été directeur de l’Institut des sciences sociales de 2005 à 2009 et doyen de la Faculté des sciences sociales et politiques de 2010 à 2012. Son fort attachement pour le terroir vaudois ne l’a pas empêché de traverser le Jura, pour développer des activités académiques à Paris (Sorbonne).
Très présent dans les médias depuis de nombreuses années, René Knüsel propose une lecture éclairante de thèmes liés à l’exclusion et à la (re)production des inégalités sociales, auxquels il a consacré une part importante de ses recherches avec des publications telles que Chômeurs et exclus du marché de l’emploi : ruptures ou solidarité ? ou encore Lutter contre les pauvres. Les politiques face à la mendicité dans le canton de Vaud. Valorisant également les potentielles applications pratiques de la recherche universitaire, René Knüsel a entretenu des liens étroits avec la Haute école de travail social de Fribourg. Cela a mené à la publication, seul ou en collaboration, de nombreux ouvrages en lien avec le travail social. On mentionnera en particulier L’intervention sociale… Entre institutions, professions et formations [1], Les risques du métier. La santé dans le travail social [2]. Lutter contre les pauvres, Les politiques face à la mendicité dans le canton de Vaud [3], et Qui châtie bien…. Mauvais traitements envers les enfants et contexte culturel [4].
Élargissant encore davantage le cadrage interdisciplinaire nécessaire, il a également mis ses compétences au service de l’Observatoire de la maltraitance envers les enfants (OME) de l’UNIL, dont il a été directeur de 2009 à 2019. Son action dans ce domaine visait à documenter et à quantifier ce phénomène peu visible et difficile à saisir, notamment à travers la réalisation du volet suisse de l’étude internationale Optimus.
Attaché au « faire » et non au « paraître », René n’a pas désiré se draper une dernière (première ?) fois dans la toge académique pour prononcer des adieux officiels et empesés. Il faut dire que la crise du Covid lui a facilité les choses en lui permettant de danser un pas de côté incognito. Mais il était dit qu’il ne s’en tirerait pas à si bon compte et c’est pourquoi nous avons proposé à quelques ancien·ne·s collègues, au court comme au long cours, de prolonger encore un peu le cheminement commun. Il en est issu cet ensemble de réflexions parlant moins de travail que d’êtres humains, mais mettant toujours en avant une passion commune pour la justice et la discussion. Bonne lecture René !
[1] Éditions EESP (2003)
[2] Éditions EESP (2010)
[3] Editions d'en bas (2014)
[4] Antipodes (2021)