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Le patrimoine numérique, un danger pour le deuil?

Jeudi 17.10.2024
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La gestion de la mort est, elle aussi, touchée par le développement des outils numériques, ce qui soulève de nombreuses questions: que deviennent les traces numériques d’une personne décédée? Comment influencent-elles le deuil et le souvenir? Une étude fait le point.

Par Francesca Bosisio, Haute école d’ingénierie et de gestion du Canton de Vaud (HES-SO), Ralf J. Jox, Institut des humanités en médecine et Chaire de soins palliatifs gériatriques, Anca-Cristina Sterie, Chaire de soins palliatifs gériatriques et Service de soins palliatifs et de support, CHUV, et Jean-Daniel Strub, Ethix – Laboratoire d’éthique de l’innovation

Tout au long de leur existence, les personnes sèment, intentionnellement ou pas, de nombreuses traces numériques. En fin de vie, des outils numériques se révèlent utiles pour prévoir le déroulement des événements après son décès et/ou de décider ce qui sera transmis aux survivant·es. En phase de deuil, ils aident à trouver du soutien. Certaines applications vont même jusqu’à recréer une version numérique de la personne décédée, afin que les vivant·es puissent rester en communication avec des défunt·es.

L’étude « Mort à l’ère numérique » (1), mandatée par la Fondation suisse pour l’évaluation des choix technologiques (TA Swiss), s’est penchée sur les opportunités et les risques du numérique dans le domaine du décès et du deuil. Ce travail a ainsi recensé différents outils, acteurs et perspectives, investigué les usages et leur influence pour la personne décédée et ses proches, et évalué les enjeux éthiques et juridiques de ces applications et utilisations. Ces recherches ont débouché sur la publication de douze recommandations s’inscrivant dans quatre champs d’action (cf. encadré). Cet article résume les résultats principaux et les messages-clé.

Recommandations et champs d'action

L’étude « Mort à l’ère numérique » a débouché sur douze recommandations dans quatre champs d’action. Celles-ci sont destinées aux professionnel·les, au législateur et aux utilisateurs et utilisatrices de technologies numériques en prévision de leur décès ou dans le cadre d’un deuil.

Champ d’action 1 : Accompagner l’adoption de ces technologies et en mitiger les risques en prévision d’un décès

1.     Sensibiliser la population et les professionnel·les concerné·es aux risques et opportunités associés aux données numériques durant notre vie et après notre décès.

2.     Inclure la gestion du patrimoine numérique dans les thématiques de sensibilisation visant à améliorer la culture numérique au sein de la population.

3.     Sensibiliser la population aux avantages d’une réflexion et une gestion anticipée de son patrimoine numérique.

4.     Déterminer dans quelle manière la prévoyance numérique pourrait s’intégrer dans les décisions et l’accompagnement de fin de vie.

5.     Encourager des projets de recherches approfondies pour mieux cerner les domaines d’action et les évolutions souhaitables du cadre législatif.

6.     Encourager un débat public sur la désirabilité et la pertinence sociale d’une diffusion accrue des applications et outils visant la survie numérique.

Champ d’action 2 : Améliorer l’accès à des technologies numériques à but spécifique de bonne qualité

7.     Elaborer des standards élevés en termes de sécurité et de protection et stockage des données, notamment pour éviter la perte ou l’utilisation de celles-ci par de personnes mal intentionnées après le décès des personnes utilisatrices.

8.     Améliorer le financement de prestations favorisant la gestion anticipée du patrimoine numérique, la prévoyance funéraire et d’autres dispositions telles les directives anticipées.

Champ d’action 3 : Améliorer le soutien aux personnes endeuillées

9.     Améliorer l’accès à un soutien ou une prise en charge adéquate et financièrement abordable pour les personnes endeuillées.

Champ d’action 4 : Développer un cadre normatif permettant de protéger les données d’une personne décédée

10.  Les développeurs d’agents conversationnels permettant de « discuter » avec une personne décédée (deadbots, deep fakes) doivent informer de manière transparente les personnes utilisatrices du caractère artificiel des conversations et de toute altération des contenus originaux des défunt·es

11.  Ces mêmes développeurs doivent renoncer à toute altération des traits de personnalité et de l’apparence (voix ou représentation du corps) de la personne imitée par le biais de la technologie et respecter les volontés des personnes décédées, qu’elles soient présumées ou documentées

12.  Les développeurs d’agents conversationnels ou d’autres technologies d’interaction numérique post-mortem doivent assurer un « droit à l’oubli » tant pour les personnes anticipant leur décès que pour les survivants.

Outils, acteurs et perspectives

Un inventaire a mis en évidence quatre types d’outils numériques et d’applications utiles dans des circonstances de fin de vie et de décès. Le premier concerne les services de gestion d’informations et de prévoyance funéraire, c’est-à-dire les plateformes qui donnent la possibilité aux utilisateurs et utilisatrices de sauvegarder et de stocker en un seul endroit et de manière centralisée les informations et les dispositions relatives à leur décès et à leur présence numérique après leur mort. Les services de commémoration en ligne, tels que des cimetières virtuels ou des sites de commémoration qui contribuent à créer des espaces virtuels pour le souvenir, représentent la deuxième catégorie. Le troisième groupe est constitué par les offres qui servent à envoyer des messages aux survivant·es. Il s’agit là de services qui permettent de rédiger en avance des messages à l’intention des proches, messages qui sont alors envoyés à des moments prédéterminés ou en lien avec des événements ultérieurs de leur vie, par exemple lors d’un mariage, d’une naissance, de l’obtention de la majorité, etc. La quatrième et dernière catégorie regroupe des outils grâce auxquels les utilisateurs et utilisatrices peuvent continuer à mener une existence virtuelle, au-delà de leur mort. Dans cette catégorie figurent les deadbot, un service de chat permettant de « discuter » avec la personne décédée, et des deep fakes (2), qui autorisent la création d’avatars de la personne décédée avec différent niveaux de réalisme, et les réseaux sociaux qui, après le décès de la personne, fonctionnent comme des mémoriaux.

Influence de la virtualité sur le rapport à la mort et au deuil

Le deuxième volet de l’étude a exploré la littérature et les utilisations concrètes de ces outils en Suisse au travers d’entretiens [1] dans les trois régions linguistiques. Dans ce contexte, il a été mis en évidence que l’utilisation de technologies numériques en lien avec un décès a augmenté de manière significative durant la pandémie de Covid-19 et que certaines pratiques développées pendant cette même période, comme la retransmission de cérémonie à distance ou la conversion des réseaux sociaux en mémoriaux, perdurent. Retransmettre des obsèques inclut la participation des personnes non-mobiles ou trop éloignées à la commémoration du ou de la défunte et au partage du deuil. Les réseaux sociaux, pour leur part, permettent à des personnes qui ne font pas partie du cercle social immédiat de la famille (collègues ou ami·es moins proches) de commémorer la ou le défunt, et de participer au deuil collectif. Les réseaux sociaux sont également utilisés par les personnes qui ont l’impression de ne pas recevoir suffisamment de soutien durant leur deuil pour entrer en contact avec des personnes qui ont vécu des expériences similaires (par exemple des proches de personnes qui sont décédées de manière violente ou soudaine, ou des parents ayant perdu un enfant).

L’usage de plateformes, comme Facebook ou X/Twitter, ou applications qui ne sont pas spécialement dédiées au deuil est relativement courant. Par contre, l’utilisation de technologies spécifiquement conçues pour être utilisées en prévision de son décès ou en lien avec un deuil (mémoriaux, cimetières virtuels, deep fakes ou deadbots) se révèle beaucoup plus marginale.

De manière globale, cette étude souligne que l’utilisation d’application numériques en prévision d’un décès reste marginale, pour l’heure en Suisse. Ce constat peut être expliqué, d’une part, par le fait que dans les pays occidentaux, les personnes tendent à procrastiner les démarches en lien avec leur mort. De manière générale, ce sont le plus souvent celles qui ont vécu une expérience négative d’un décès qui recherchent des solutions leur permettant de prolonger leur pouvoir d’agir au-delà de leur existence, ou de diminuer le fardeau décisionnel porté par les proches. D’autre part, les individus qui se sentent concernés par ces démarches sont souvent plus âgés et moins à l’aise avec ce type de technologies. Ils préfèrent alors se référer plutôt à un·e notaire ou à leurs proches pour déléguer ou prendre en charge un certain nombre de démarches après leur décès.

Aspects éthiques et juridiques

D’un point de vue éthique et philosophique, l’étude observe que bien que les morts ne puissent pas, d’un point de vue ontologique, bénéficier des mêmes protections que les vivants, il existe néanmoins des obligations éthiques importantes pour les survivant·es et la société en ce qui concerne le traitement des données des défunt·es. La protection des personnes vivantes qui recevraient des messages non sollicités d’une personne décédée doit être aussi envisagée, puisque des risques de péjorer le deuil ou de compliquer des relations entre les survivant·es existent. Ces obligations consistent, par exemple, à respecter un refus de la personne décédée de ne pas utiliser ses données personnelles après sa mort, ou de ne pas la « réanimer » sous forme, par exemple, d’un avatar.

La question de comment traiter le droit à l’effacement des données personnelles après la mort, mais aussi l’équilibre entre le souvenir et l’oubli, éminemment important dans le contexte du deuil et de la mort, a fait l’objet de nombreuses discussions. Dans une perspective juridique, l’étude souligne ainsi l’importance de l’oubli, ainsi que la nécessité d’un contrôle suffisant des données personnelles après la mort afin de ne pas porter atteinte à la mémoire du défunt et aux survivant·es.

Risques et opportunités

Sur la base des considérations qui précèdent, l’étude discute quelques aspects centraux à prendre en compte pour tout travail futur lié aux technologies appartenant au domaine de la Digital Afterlife.

Ce travail met d’abord en évidence le rôle éminent que jouent les professionnel·les lorsqu’il s’agit d’équilibrer les avantages et les risques de l’utilisation des outils numériques dans le domaine de la fin de vie et du deuil. Il appartient ainsi aux notaires, au personnel des pompes funèbres et à toute personne impliquée dans l’accompagnement psychologique ou spirituel au décès et au deuil d’améliorer l’accès à un soutien et aux technologies, afin de minimiser les risques et amener un bénéfice aux utilisateurs et aux utilisatrices. Grâce à leurs connaissances et à leur rôle, ces personnes pourraient contribuer de manière importante à ce que l’autonomie et la santé psychique des personnes qui préparent leur décès à l’aide d’outils numériques et des personnes endeuillées qui hériteront des traces numériques de leurs défunt·es puissent être préservées.

En attendant le cadre législatif, émettre ses volontés

Cette étude met en évidence que chacun·e est susceptible de laisser ou d’hériter, intentionnellement ou non, de traces numériques. Compte tenu des risques et des opportunités décrits, il importe de se préoccuper de ce que deviendront ces traces après son décès.

Dans l’attente d’un cadre législatif plus précis en ce qui concerne la gestion des données numériques après la mort, notre recommandation principale aux utilisateurs et utilisatrices d’applications numériques est, par analogie au testament et aux directives anticipées, de discuter avec les proches de ses souhaits sur la gestion de ces données. Il s’avère également utile, dans ce contexte, de nommer une personne de confiance qui pourra accéder aux contenus numériques du ou de la défunte pour s’en occuper de manière cohérente avec les souhaits formulés en fin de vie. Discuter avec la famille est aussi important pour comprendre ce qui les préoccupe et en tenir compte lors de cette planification anticipée.

Références

  • Strub, J-D, Bosisio, F, Jox, RJ, Rochel, J, Sterie, A-C, 2024. Mort à l’ère numérique. Chances et risques du Digital Afterlife. VdF Hochschulverlag (version gratuite en ligne : link ; livre payant : link)
  • Une autre étude de TA-Swiss se penche sur ces technologies. Cette étude est rédigée en allemand mais un résumé est disponible en français : link

[1] Dans le cadre de cette partie de l’étude, quinze personnes ont été interrogées : trois professionnel·les du funéraire, trois clébrants laïques, deux psychologues psychothérapeutes, quatre personnes endeuillées, deux personnes qui utilisent des applications pour gérer leur patrimoine numérique et le fondateur d’un cimitière virtuel. Cinq résident en Suisse alémanique, quatre en Suisse romande et six en Suisse italienne.

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Comment citer cet article ?

Francesca Bosisio, «Le patrimoine numérique, un danger pour le deuil?», REISO, Revue d'information sociale, publié le 17 octobre 2024, https://www.reiso.org/document/13244

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