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L’éducateur·trice, lien entre l’école et l’hôpital

Jeudi 14.03.2024
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Pour soutenir le retour à la vie scolaire et maintenir un lien social même en cas d’hospitalisation des jeunes patient·es, les éducateurs·trices en unité pédopsychiatrique hospitalière jouent un rôle de lien essentiel.

Par Francesca di Giacomo, médecin responsable de la pédopsychiatrie hospitalière, Bernard Volz, éducateur, Silvia Ciaburri, médecin, cheffe de clinique adjointe, et Anne-Laure Germain, éducatrice, Hôpital d’Yverdon-les-Bains, ainsi que Carole Kapp, médecin adjointe, cheffe de filière Hospitalisation Urgence Crise SUPEA (CHUV), Lausanne

L’accompagnement des reprises scolaires depuis l’hôpital est un soin dans lequel les éducteurs·trices de l’unité d’hospitalisation pédopsychiatrique en pédiatrie [1] (UHPP) sont particulièrement engagé·es. Le travail des professionnel·les de cette équipe est transdisciplinaire, car il traverse « les différences des disciplines, les particularités de chaque discipline, les dépasse et les transcende » (Ciccone, 2018, p. 4), dans une position humaniste et éthique, dont le postulat épistémologique est la complexité (Morin, 1994).

L’ensemble des professionnel·les travaille vers des objectifs thérapeutiques communs, chacun·e selon sa formation et son rôle ; par exemple, pour renforcer l’estime de soi d’un·e adolescent·e qui souffre de sentiments de dévalorisation, le psychologue œuvrera en entretien à requalifier les affects, l’éducateur·trice soutiendra la participation aux discussions lors des repas en groupe, l’ergothérapeute encouragera un projet d’activités extrascolaires gratifiantes, et les infirmières proposeront de soins corporels.

L’éducateur·trice, lien entre intérieur et extérieur

La fonction de l’éducateur·trice généraliste dans une unité de pédopsychiatrie hospitalière s’avère transdisciplinaire par définition. Nécessairement « soluble » dans la transdisciplinarité, ces professionnel·les, dont la formation puise dans divers domaines des sciences de la santé et du social, ne peuvent agir qu’en réseau. Travailleur, travailleuse « sociale », il-elle s’intéresse au contexte global de la personne, en l’accompagnant dans ses lieux de vie, faisant avec les limites et les ressources des différentes situations familiales, professionnelles ou de formation.

L’éducateur·trice aide les jeunes à composer avec le principe de réalité, et à l’articuler avec le plaisir (Freud, 1911). Il-elle représente un seuil entre intérieur (l’unité hospitalière, le groupe des patient·es et des soignant·es) et extérieur (la famille, l’école, le foyer socio-éducatif), soutient la nécessité de séjourner temporairement à l’hôpital, mais rappelle prestement qu’il faudra en sortir et affronter les contraintes du monde. Le va-et-vient entre dedans et dehors se concrétise dans les entretiens de famille et de réseau, les visites, les congés, les reprises scolaires, et les activités thérapeutiques, où les jeunes expérimentent ou redécouvrent des plaisirs possibles à l’extérieur : être en groupe, cuisiner, s’adonner au sport ou à des activités artistiques ou culturelles. Tout cela délimite, pour les adolescent·es, une aire transitionnelle de jeu (Winnicott, 1975).

Par son ancrage dans la dimension sociale, le·a professionnel·le de l’éducation soutient la dimension groupale du soin institutionnel, précieuse pour des patient·es avec un registre de fonctionnement principalement borderline, où la fonction du sujet est défaillante. Les éducateur·trices encouragent ces jeunes à utiliser le groupe, et l’institution comme milieu subjectivant pour accéder à une forme plus évoluée de fonctionnement psychique (Biondo, 2022) [2].

Reprendre l’école depuis l’hôpital

Du fait de la complexité des enjeux psychiques de la vie scolaire — investissements libidinaux et agressifs, narcissiques et objectaux, identifications aux protagonistes de sa propre génération et à celles précédentes (Monniello, 2012) —, les jeunes hospitalisé·es présentent souvent des difficultés scolaires : refus anxieux, échec, problèmes relationnels. Dans ces situations, il est précieux de proposer un retour à l’école à partir de l’hôpital, afin de les réintégrer progressivement au milieu scolaire, affiner la compréhension des difficultés, et construire un projet personnalisé avec les parents et le réseau.

Après un temps initial d’hospitalisation, qui permet une première évaluation et une stabilisation des symptômes, les référent·es contactent les professionnel·les scolaires (doyen·ne, enseignant·es, infirmier·ère) pour se renseigner sur le parcours d’étude, les capacités d’apprentissages, les hypothèses de crise, les personnes-ressources à l’école, et réfléchir ensemble aux conditions plus favorables à un retour en classe [3]. Quand les difficultés des patient·es se manifestent par des agissements dangereux ou violents (tentatives de suicide ou troubles du comportement par exemple), les enseignant·es se sentent souvent inquiet·ètes et démuni·es ; il est important d’entendre leurs craintes et limites, et de leur proposer un soutien, pour que les jeunes soient accueilli·es dans les meilleures conditions. Par exemple, les professionnel·les scolaires savent que si l’élève est en souffrance pendant la reprise depuis l’hôpital, ils-elles peuvent appeler l’éducateur·trice, qui reste joignable et se tient, dans un premier temps, à proximité de l’école, selon ce qui est convenu d’un commun accord.

Les éducateur·trices présentent aux jeunes leur réalité scolaire, souvent « mise de côté » durant l’hospitalisation, dans un évitement renforcé par la recommandation bienveillante des parents et des enseignant·es de « ne pas se préoccuper pour l’école, penser plutôt à se soigner ». Une étape importante de ce travail « de réalité » est l’écriture avec le·a patient·e d’un programme de reprise, qui sera partagé avec l’équipe, les parents, les professionnel·les scolaires, ainsi que la préparation de ce qui va être dit à la classe sur l’absence et le retour progressif. Pour les trajets hôpital-école, la collaboration des parents est demandée, mais les premiers trajets sont assurés par l’éducateur·trice, qui, soutenu·e par l’équipe, essaie de sortir de la répétition de l’échec, sans attendre de renversement « miraculeux ».

Ce temps de déplacement offre encore la possibilité d’adapter le programme selon les besoins immédiats du ou de la jeune (par exemple, jusqu’où la personne souhaite-t-elle être accompagnée ?). La vignette clinique qui suit illustre que si ces accompagnements se révèlent plus ou moins « réussis » sur le plan de la reprise de la scolarité, ils présentent toujours le mérite d’ouvrir à une meilleure prise de conscience pour les jeunes, les familles et le réseau.

Lire les messages derrière les comportements

Lou, adolescente de 14 ans, de plus en plus isolée, ne fréquente plus son collège depuis un mois. Ses parents, après un amour passionnel et violent, vivent un divorce très conflictuel. Lou habite avec son père depuis quelques années et voudrait aujourd’hui retourner vivre avec sa mère, ce qui nécessiterait un changement de collège, et que son père refuse. Des procédures judiciaires sont en cours. Le mal-être de la jeune fille s’exprime par des idées suicidaires, des crises d’angoisses, ainsi qu’un sentiment de persécution.

Quand, après quelques jours d’hospitalisation, cette symptomatologie s’estompe, nous proposons à Lou et à ses parents une reprise scolaire depuis l’hôpital, avec l’accompagnement de l’éducateur. Le moment venu, quand celui-ci va la chercher pour l’amener au collège, Lou lui dit : « De toute façon, mon père veut que j’aille à l’école, mais il s’en fiche si je vais mieux ou pas ». Une fois arrivée dans les bâtiments scolaires, l’éducateur parti, Lou pleure, se sent paralysée, incapable de rejoindre sa classe. Elle parvient finalement à se rendre chez la secrétaire, qui appelle l’éducateur pour venir la chercher et la raccompagner à l’hôpital. Dans la voiture, Lou dit : « Vous ne comprenez rien, tout ça n’a rien à voir avec l’école. ».

Le jour d’après, en colère, l’adolescente refuse de quitter l’unité. L’éducateur exprime son découragement lors du colloque d’équipe : il lui est difficile de penser que la reprise scolaire aboutira au vu des fortes réactions de Lou quand elle est concrètement confrontée au retour en classe. L’éducateur ressent des contre-attitudes ambivalentes : il voudrait soit insister et « contraindre » la jeune fille à aller à l’école, soit « laisser tomber ». La réflexion en équipe lui permet de se rendre compte qu’entre l’adolescente et lui se rejoue le conflit qu’elle vit avec son père, signe que le travail thérapeutique est bien engagé, que le transfert s’est installé.

Lors de l’accompagnement suivant, Lou accepte de partir. Mais une fois devant l'école, elle se met à pleurer, et lance à l’éducateur : « C'est la faute de mon père, il a déjà failli tuer ma mère, je ne veux pas lui donner raison en allant à l’école ».

La fréquentation de l’école apparait très clairement comme un enjeu du conflit de loyauté : Lou craint que si elle retourne au collège, elle adhère au projet de son père et trahisse sa mère, qui soutient son déménagement chez elle et sa réaffectation scolaire. Ainsi, en insistant sur le projet de reprise scolaire, l’équipe continue à l’enfermer dans un paradoxe sans issue, contre lequel la jeune fille ne peut se défendre qu’en s’agrippant au symptôme du refus anxieux. Nous décidons d’arrêter de nous battre frontalement contre ce symptôme : le projet de retour à l’école est suspendu, au profit d’un travail, avec Lou, d’appropriation subjective du sens des difficultés. Une rencontre avec les parents et l’assistant social est organisée, afin de mieux cerner les besoins de l’adolescente et de lui fournir un milieu de vie plus propice à son développement.

L’éducateur·trice, référence de confiance

Cette situation clinique montre que l’échec d’un retour à l’école depuis l’hôpital peut revêtir une fonction précieuse dans le processus de soin. Le travail transdisciplinaire et la pensée groupale de l’équipe viennent soutenir l’éducateur·trice dans le dépassement de sa propre déception de ne pas « réussir » le retour à l’école de l’adolescent·e. Cela aide également le·a professionnel·le à se représenter et vivre la mise en acte du projet comme un « jeu » entre le ou la jeune, l’hôpital, la famille et l’école.

L’éducateur·trice s’engage dans l’accompagnement de ce passage entre intérieur et extérieur de l’hôpital, qui devient une figuration concrète de l’articulation entre vie psychique et réalité externe (Winnicott, 1975). Ce rôle permet aux jeunes d’investir l’éducateur·trice comme une référence de confiance, parfois exigeante mais toujours bienveillante, et de s’identifier à une posture psychique d’adulte tant ferme et fiable que souple et compréhensive.

 Bibliographie

  • Biondo D., 2020. Gruppo evolutivo e branco. Milano : Franco Angeli
  • Ciccone, A. (sous la direction de), 2018. Aux frontières de la psychanalyse. Soins psychiques et transdisciplinarité. Paris : Dunod
  • De Coulon, N., 2021. La crise. Lausanne : Antipodes
  • Freud, S.,1911. Formulation sur les deux principes du fonctionnement psychique. In : Œuvres complètes : t.11, pp.13-21. Paris : Payot
  • Choi-Kain L., Sharp C., 2022. Handbook of Good Psychiatric Management for Adolescents With Borderline Personality Disorder. Washington : APA
  • Morin, E., 1994. La complexité humaine. Paris : Flammarion
  • Racamier, P.-C., 1993. Le psychanalyste sans divan. Paris : Payot
  • Winnicott, D.W., 1975. Jeu et réalité ; l’espace potentiel. Paris : Gallimard

[1] L’UHPP, située dans l’hôpital d’Yverdon, accueille depuis son ouverture en 2017 des jeunes qui nécessitent de soins hospitaliers pendant deux à trois semaines, selon un modèle d’intervention de crise (De Coulon, 1999). L’équipe est composée par des psychiatres de l’enfant et de l’adolescent, psychologues, infirmier·ères, une éducatrice, un ergothérapeute.

[2] Par ailleurs, pour les adolescent·es souffrant de trouble borderline, la fréquentation de l’école est fondamentale pour trouver une stabilité et apaiser la symptomatologie : l’un des principes fondamentaux du traitement Good psychiatric management for adolescents (Choi-Khan, Sharp, 2022) est « school before love »

[3] Dans d’autres unités hospitalières du canton de Vaud, ce lien avec les professionnel·les de l’école se fait en collaboration avec un·e enseignant·e intégrée à l’équipe intra-hospitalière.

 


Lire également :

Comment citer cet article ?

Francesca di Giacomo et al., «L’éducateur·trice, lien entre l’école et l’hôpital», REISO, Revue d'information sociale, publié le 14 mars 2024, https://www.reiso.org/document/12175