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Le Canton de Fribourg vient de publier une brochure pour aider les personnes dont l’âge avance à réfléchir aux besoins de sécurité dans leur logement. D’autres documents existent pour construire des bâtiments adaptés à une mobilité réduite.
La perte d’autonomie liée à l’avancement en âge implique souvent de devoir changer de logement. Pour aider les personnes concernées à mener une réflexion sur leurs besoins en matière d’habitat, le Canton de Fribourg vient de publier une brochure de 48 pages. Celle-ci met en lumière les éléments essentiels à vérifier lors de la recherche d’un nouveau domicile.
Il s’agit par exemple d’éliminer les sources de danger, de trouver un logement pourvu de suffisamment de lumière et d’un certain nombre de facilités. Les objets ou vêtements rangés dans des meubles, par exemple, doivent être atteignables sans recours à un escabeau. La stabilité des tables et des chaises est essentielle. L’aménagement de la cuisine doit également être adapté.
Cette brochure se base sur différents chapitres, parmi lesquels :
En outre, un chapitre contient les adresses utiles et un autre compile diverses références bibliographiques en la matière.
Cette brochure « Un logement pour des besoins qui évoluent » est un outil utile pour l’accompagnement de personnes âgées ou en situation de handicap. Elle a été élaborée dans le contexte de la mise en œuvre de la politique cantonale fribourgeoise en faveur des personnes âgées Senior+.
Un document élaboré par le Centre spécialisé suisse « Architectures sans obstacles » est également disponible sur internet. Ses directives contribuent à la construction de logements adaptés aux seniors ou aux personnes en situation de handicap. Outre des principes fondamentaux, il contient de manière exhaustive tous les éléments à prendre en compte lors de l’élaboration de tels logements.
(croc / Etat de Fribourg)
La dernière publication de la Collection Médecine Société déploie les enjeux du don d’organe de façon approfondie. Elle répond ainsi à un besoin d’information du grand public pour changer ses représentations.
C’est à une traversée sociohistorique du don d’organes et de la transplantation qu’invite la dernière publication de la Collection Médecine Société. L’imposant ouvrage de 394 pages en parcourt les enjeux historiques et sociopolitiques en Suisse, de 1945 à 2020. Les auteurs et les autrices, réunis sous la direction de Raphaël Hammer, Vincent Barras et Manuel Pascual, fondent leur analyse sur une grande variété de matériaux.
Don et transplantation d’organes en Suisse : Enjeux historiques et sociologiques (1945-2020) s’impose ainsi en ouvrage de référence. Il relève à quel point les changements et les développements ont été nombreux durant le siècle précédent. Les avancées médicales en la matière continuent d’avoir un effet domino sur l’organisation hospitalière, la mobilisation associative, dans la recherche en éthique et en sciences sociales. Depuis 2009, la Suisse connaît une médecine hautement spécialisée et c’est aux cinq hôpitaux universitaires et à l’hôpital cantonal de Saint-Gall que sont attribuées les transplantations.
En Suisse, la pénurie de greffons représente une préoccupation de santé publique majeure. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : à la fin de l’année 2019, on comptait 1’415 personnes en attente d’une transplantation d’organe. Selon « Swisstransplant, Preliminary statistics », 70% concernaient une greffe rénale, 14% une greffe hépatique, 6% une greffe cardiaque, 4% une transplantation du pancréas et 3% des poumons.
Pour saisir la complexité qui sous-tend ces chiffres, la perspective sociologique et historique s’avère importante. Ainsi, les auteurs et autrices rappellent que la greffe, jusque dans les années 1960, demeurait une technique médicale expérimentale, une sorte de pratique ésotérique.
Selon l’anthropologue Margaret Lock, spécialiste du sujet, il n’existe pas de consensus autour du don d’organes. Il y aurait même une crise de confiance du public. Si celle-ci ne s’organise ni en manifestation, ni en association, et encore moins en discours qui remettraient en question le don d’organes, elle n’en demeure pas moins une résistance qui influence l’expérience concrète du transfert d’organes.
Divers travaux scientifiques suggèrent que les donneur·se·s vivant·e·s, les proches de donneur·se·s et les receveur·se·s influencent de façon prépondérante le don d’organes. C’est leur manière d’investir les parties du corps qui va souvent le mettre à mal.
Le monde médical, dans sa vision matérialiste des organes, semble être en décalage par rapport aux conceptions intimes que ressent le public à l’idée de léguer des parties de son corps ou de celles de ses proches. Il y a donc lieu d’enquêter sur l’aspect émotionnel et symbolique de la greffe, dont les enjeux représentent des ressources et des contraintes.
Donner un organe peut être perçu comme un acte de grande générosité, mais ce n’est pas une évidence. Les discours qui valorisent l’altruisme pour le don d’organes n’obtiennent pas forcément de résultats escomptés. Les milieux populaires s'y montrent les moins réceptifs. Les discours publics ambiants mettent peu en avant les aspects plus sensibles tels que l’efficacité de la greffe, la mort cérébrale, l’acceptabilité de l’acte de prélèvement sur une personne décédée ou les limites de la transplantation.
Pour sortir de la fausse question du pour ou contre la greffe d’organe, les scientifiques appellent à développer un débat social. La mise en circulation d’information, la construction d’un dialogue peuvent préparer un terreau à la culture de la transplantation. Après les avancées médicales, légales, organisationnelles, la mise doit se faire à l’heure actuelle sur la création de sens. Don et transplantation nécessitent la construction de représentations de la part de la société. Ainsi, appréhender les enjeux de société relève de la nécessité. Cette appréhension pour saisir un sujet aussi complexe appelle à un travail politique, entendu dans un sens large.
En Europe, l’Espagne fait figure d’exemple. La population espagnole n’est pas plus altruiste qu'ailleurs. Toutefois, le pays bénéficie d’une véritable politique en la matière et par conséquent, d’une organisation hospitalière. Une étude réalisée aux Etats-Unis montre que la disposition au don d’organes ne se réduit pas aux représentations symboliques d’une population, à ses aspects culturels, mais est le produit d’une multitude d’éléments qui composent la chaîne complexe des dons d’organes.
Pour conclure, il faut encore noter que la confiance du public à l’égard des greffes dépend aussi des scandales éthiques dans le milieu médical. La Suisse en reste épargnée.
(LC)
Ouvrage disponible en Open Access ou sur le site web de l'éditeur.
Une Fédération régionale de promotion de la santé, en France, a publié un vademecum sur le porno et la sexualité des jeunes. Un document enrichi d’autres références bibliographiques, qui valorise l'éducation et la formation.
Le porno est-il un incontournable dans la sexualité des jeunes ? C’est la question que se sont posée les auteurs et autrices du vademecum éponyme, publié en février 2021 par Fédération régionale des acteurs en promotion de la santé du Centre-Val de Loire, en France.
Pour tenter d’apporter une réponse, les rédacteurs et rédactrices commencent par définir et contextualiser la notion même de « pornographie ». Outre des chiffres, ils et elles s’arrêtent par exemple sur les codes de la pornographie et l’hypersexualisation, ainsi que sur la stratégie du porno-chic. La deuxième partie est consacrée à la « vie affective et sexuelle, adolescence et « porno », s’intéressant notamment à l’identité sociale et à l’image du corps, aux relations « garçons-filles », aux comportements à risques, aux violences sexuelles ou à l’addiction.
Tout au long de leur document, les auteurs et autrices prennent le parti de « dédiaboliser » la consommation de la pornographie – devenue si facile d'accès avec les moyens numériques – au profit d’un meilleur accompagnement psychoaffectif des jeunes. « Il faut chercher à comprendre pourquoi la pornographie intéresse la jeunesse, pour comprendre que les mesures punitives ne suffisent pas à remplacer une éducation à la vie affective et sexuelle », estiment-ils en ouverture du deuxième chapitre. Pas question toutefois d’en banaliser l’accès. Il est ainsi rappelé que la pornographie et l’hypersexualisation menacent tant les filles que les garçons quant à leur identité sociale et à leur estime de soi.
Dans la conclusion, les quatre signataires avancent qu'il « nous semble qu’un véritable levier à considérer est l’intégration de la question des supports pornographiques et de leurs enjeux au sein des actions d'éducation à la vie affective et sexuelle et des programmes d'accompagnement à la parentalité. » La formation des accompagnant·e·s des parents et des jeunes revêt donc un caractère essentiel.
Sans être exhaustif, ce vademecum propose, pour chaque thématique, des références pour aller plus loin. A noter également que le portail de cette entité française contient une riche documentation en matière de promotion de la santé, au sujet de quinze thématiques, parmi lesquelles figurent « compétences psychosociales », « éducation aux médias », « éducation thérapeutique du patient », « inégalités sociales de santé », « littératie ensanté », ou « santé-environnement ».
(croc)
Lien vers le portail Promotion santé de la Fédération régionale des acteurs en promotion de la santé du Centre-Val de Loire
Le groupe de travail national « Femmes migrantes & violences conjugales » a émis un rapport dans lequel il constate que les femmes migrantes victimes de violences conjugales manquent de protection en Suisse.
La législation actuelle et son application poussent les victimes ayant un statut précaire à rester auprès de leur conjoint violent. C’est le constat du groupe de travail « Femmes migrantes & violences conjugales » dans son rapport publié en juin à l’attention du Groupe d’expert·e·s sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. Ce document a été émis en parallèle au premier rapport de la Suisse sur la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul. Ce groupe de travail compte notamment des représentant·e·s du CSP Vaud, du Bureau information femmes Vaud, du Centre Suisses-Immigrés Valais et de l’Observatoire romand du droit d’asile et des étrangers.
En cas de violences conjugales, la Loi fédérale sur les étrangers et l’intégration permet de prolonger l’autorisation de séjour de certaines victimes étrangères lorsqu’il y a rupture de la vie commune dans les trois années qui suivent leur mariage. Mais, selon le rapport émis par le groupe de travail, la loi ne remplit pas sa mission initiale car elle ne protège pas réellement contre les violences conjugales les conjointes étrangères venues en Suisse par regroupement familial. Pour le groupe de travail, le champ et les conditions de son application s'avèrent trop restreints.
Dans la pratique, affirme ce même groupe de travail, les dispositions légales et la jurisprudence sont appliquées de manière restrictive, voire arbitraire. Les exigences en matière de preuve de la violence sont trop élevées. Les autorités migratoires ne reconnaissent en effet, souvent, les violences qu’en cas de condamnation de l’époux à la suite d’une plainte pénale. Les attestations des psychologues, médecins et services spécialisés sont mises en doute et le fait d’avoir été reconnue comme victime au sens de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infraction (LAVI) ne permet pas non plus de se faire reconnaître systématiquement comme victime.
Toute une série d’actes de violence ne sont, de plus, que trop peu pris en compte, comme les violences psychiques ou les actes commis après la séparation du couple. Ces faits s’inscrivent en parfaite contradiction avec l’art. 3 de la Convention d’Istanbul.
Ce rapport formule encore un autre constat : la formation et la sensibilisation du personnel amené à traiter les situations de migrantes victimes de violences conjugales sont clairement insuffisantes. Méconnaissances des dynamiques liées aux violences conjugales, ignorance des vulnérabilités particulières liées à la précarité du statut et à l’exil, pratiques de condamnation pour séjour illégal de certaines victimes sans statut légal lorsqu’elles font appel à la police : ces éléments empêchent le processus de reconstruction et entraînent des phénomènes de victimisation secondaire.
L’art. 59 de la Convention d’Istanbul prévoit une protection et l’octroi d’un permis autonome pour toutes les victimes dont la résidence dépend de celle de leur conjoint. Or, au moment de la ratification, la Suisse a émis une réserve à cet article, s’arrogeant ainsi la possibilité de ne pas l’appliquer, ou partiellement. L’octroi d’une autorisation de séjour est en effet uniquement accordé aux époux·ses de ressortissant·es suisses et de titulaires d’un permis C. La loi fédérale sur les étrangers et l’intégration instaure ainsi une discrimination entre victimes en fonction du statut du conjoint.
La législation actuelle ne permet pas non plus de protéger sans risque d’expulsion les migrantes sans statut légal et les femmes étrangères vivant en concubinage. De nombreuses victimes n’osent ainsi pas quitter leur conjoint par peur de perdre leur permis de séjour et/ou de se faire expulser. Pour celles qui voient leur permis renouvelé, la peur ne faiblit pas : le fait de toucher une aide sociale reste un motif de révocation du permis et certaines victimes reçoivent des menaces de non-renouvellement dès l’année suivante, alors que leur dépendance à l’assistance publique est étroitement liée aux séquelles des violences subies.
Entre autres recommandations, le groupe de travail « Femmes migrantes & violences conjugales » demande donc à la Suisse d’assurer que les renseignements fournis par les services spécialisés dans le domaine des violences conjugales soient systématiquement pris en compte comme preuves de violences, d’assurer une meilleure formation des professionnel·le·s en contact avec les victimes, de lever la réserve à l’art. 59 de la Convention d’Istanbul et d’ouvrir le droit prévu à l’art. 50 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration à toutes les personnes étrangères victimes de violences conjugales, quel que soit leur statut et celui de leur conjoint. Enfin, le groupe recommande de ne plus permettre que le seul recours à l’aide sociale amène par la suite un retrait du permis des victimes.
(ODAE / CSP / croc)
L’Observatoire romand du droit d’asile et des étranger·e·s lance Panorama. Quatre fois par année, ce magazine proposera un dossier thématique, des analyses, des cas d’applications du droit et des témoignages liés au droit d'asile.
Donner une meilleure visibilité aux questions liées à l’application du droit des étranger·e·s, tel est l’objectif de Panorama. Edité par l’Observatoire romand du droit d’asile et des étrangers, il sera publié quatre fois par année.
Dans ce premier numéro, le dossier thématique est consacré à l’aide sociale, notamment en lien avec la situation sanitaire. « Lorsqu’une personne sans passeport suisse reçoit une aide sociale, son droit de séjour en Suisse peut être remis en cause. Avec la pandémie, de nombreuses personnes étrangères se sont retrouvées sans emploi. Et malgré des assouplissements annoncés par les autorités fédérales, la peur de répercussions sur leur permis les a concrètement empêchées d’accéder à une aide et a conduit à des formes extrêmes de précarité », est-il résumé.
Ce premier numéro est en libre accès sur le site, les suivants seront disponibles sur abonnement.
Lien vers le magazine Panorama
(odae-romand.ch / croc)
Une récente publication des Editions Antipodes donne à comprendre la complexité de l’assistance au suicide. Un travail de terrain en profondeur.
C’est une immersion complète que les Editions Antipodes proposent avec leur nouvelle publication au titre quelque peu interpellant : La mort appréciée. Cette lecture au souffle retenu n’a pas la superficialité du sourire que décroche cette figure de style – un oxymore osé pour un sujet malgré tout encore tabou - mais bien la profondeur d’une étude de terrain impliquant de nombreux·ses partenaires.
La publication a le mérite, avec une juste distance grâce à un travail de narration précis, d’offrir une compréhension du dispositif d’assistance pour la Suisse, ainsi que des enjeux émotionnels et relationnels.
Les 340 pages de cet ouvrage relèvent d’une étude ethnographique. Sa particularité est que les chercheur·se·s ont investi un rôle de participant·e·s durant le long parcours de l’assistance au suicide. Les scientifiques ont rencontré à plusieurs reprises des personnes ayant sollicité une telle assistance, ainsi que leurs proches. Cette présence a parfois duré jusqu’à l’acte même du suicide et à la levée du corps.
Les faits que les scientifiques relatent relèvent de suivis d’environ deux ans, de quinze situations d’assistance au suicide entre 2016 et 2020. Il s’agit ainsi de plus de huitante rencontres formelles et informelles.
Signer de sa présence en tant que scientifique est bien là l’originalité de cette étude. Ce choix, radical, implique des mesures éthiques en termes de participation et de responsabilités. Les auteurs et les autrices mettent en évidence les possibles jeux d’accusation et d’investissement. Le doute d’avoir fait le « bon choix » en étant présent·e demeure en filigrane des diverses situations. Cette remise en question conduit les auteurs et les autrices à aller au-delà des aspects juridiques et ouvre sur une autre interrogation : leur présence, a-t-elle, ou non, facilité l’acte ?
L’institutionnalisation du suicide n’a rien de nouveau. Guy de Maupassant en avait déjà imaginé les grandes lignes. En Europe, la Suisse occupe une place particulière et les médias, la littérature, ne manquent pas de manifester leur intérêt en la matière. Pour résumer, l’assistance au suicide en Suisse s’y déploie dans une zone faiblement délimitée, poreuse et néanmoins séparée de la pratique médicale. Pour reprendre le titre de l’article du juriste Gunther Arzt [1], il s’agit d’une véritable zone grise.
En Suisse, le passage de la vie à trépas se fait dans une « parazone », contrairement aux autres pays où cela se déroule dans un milieu médical ou en privé sans accompagnement spécifique. Et dans cette « parazone », cette étape s’effectue avec la combinaison d’une autorisation médicale et d’un accompagnement réalisé par une association. Dans cet ouvrage, les deux associations qui ont collaboré avec les scientifiques sont Exit pour les cantons romands, et Lifecircle pour la région de Bâle ainsi que les personnes résidant à l’étranger.
Comprendre le choix de quelqu’un qui sollicite une assistance au suicide demande un véritable travail d’ouverture et d’engagement chez les scientifiques. Dans cet ouvrage, c’est un espace ouvert de raisons, de motivations, d’intentions, d’expériences, de craintes et d’événements qui est exploré, décrit. L’imaginaire des scientifiques rentre en résonnance avec l’imaginaire de celui ou celle qui sollicite l’assistance au suicide. Toutefois, les signataires de cette étude ethnographique ont clairement mis de côté la volonté de saisir l’imaginaire de la mort, du suicide d’une collectivité, tenant également à distance l’impressionnante littérature en bioéthique relative à l’assistance au suicide. C’est bien dans une histoire individuelle, unique, que les scientifiques s’immergent. À cet effet, les scientifiques prennent comme postulat théorique la notion du « possible » et donc de « l’imaginaire du possible », toutes deux notions inspirées des réflexions du philosophe Henri Bergson.
Dans la narration de chaque rédacteur et rédactrice se déploie ce qui a été pensable, devient pensable avant d’être actualisé. Dans le cas présent, pour les personnes accompagnées, il s’agit de leur propre mort.
Il est à souligner le remarquable travail d’écriture de cet ouvrage. Pour inviter cet imaginaire à s’ouvrir, les scientifiques ont choisi de rédiger leur texte à la première personne du singulier. Dans la narration des différentes situations, le « je » est pleinement investi, campé sur le fil tendu de l’observation. Il s’y dresse entre un présent foisonnant, un passé qui ressurgit et un futur d’incertitudes, d’interrogations, de soulagement. L’émotion n’est jamais loin. La complexité des situations écrites est redonnée avec une intensité jamais arrêtée dans des conlusions de vérités scientifiques irréfutables.
(LC)
[1] Arzt Gunther (2009), “Sterbehilfe in de Grauzone”, Recht, 6B, 48/2009, Zweiter Basler Fall
Le CSP Vaud vient de publier une brochure gratuite de quatre pages pour expliquer aux jeunes et à toute personne qui souhaite entreprendre une formation comment demander une bourse d’études et d’apprentissage dans le canton de Vaud.
« Pour quelle formation puis-je obtenir une bourse ? Comment procéder ? Quelles sont les conditions à remplir ? Combien vais-je recevoir ? Et si ma demande est refusée ? » Les réponses à ces questions figurent dans Bourses d’études et d’apprentissage. Aide-mémoire à l’intention des personnes en formation, la nouvelle brochure publiée par le Centre social protestant Vaud. Les conditions mentionnées dans ce document ne sont valables que dans le canton de Vaud.
Le Service social Jeunes du CSP Vaud (Jet Service) soutient près de 1000 jeunes et personnes en formation chaque année. Il les conseille notamment dans le domaine des bourses d’études, que cela soit pour les aider à faire leur demande, à déposer des recours ou encore pour vérifier les montants calculés. C’est à la lumière de cette expertise qu’il publie cet aide-mémoire.
Cette publication intervient à temps pour permettre aux jeunes d’en bénéficier pour déposer leur demande, puisque cette démarche doit être accomplie maintenant en vue de l’obtention d’une bourse pour l’année scolaire débutant à la fin du mois d’août.
Lien pour télécharger ce dépliant.
(Source : CSP Vaud)
Réfuter les représentations ambiantes et questionner les discours politiques sur l’allaitement ouvre sur la pesée des critères de choix, les normes, les marges de manœuvre. C’est ce qu’explore le dernier numéro de Nouvelles Questions féministes.
Le monde entier vient de passer de longs mois en confinement ou semi-confinement. De nombreuses personnes ont pris conscience de l’importance de la nourriture. Et si l’on remonte l’histoire individuelle de chacun·e, la première nourriture est le lait maternel. Ou pas.
S’intéresser à l’allaitement est une bonne porte d’entrée pour revisiter les injonctions paradoxales faites aux femmes. Les déterminants socio-économiques du choix de la nature de notre première bouchée prennent toute leur place. Les sacro-saints discours sur la parentalité prennent également le train en marche.
Le Grand Angle de la dernière parution de Nouvelles Questions Féministes propose des pistes de réflexion diversifiées. Celui-ci donne à lire des enquêtes de terrain tout en comparant les lieux de naissance. Une mise en perspective historique accompagne les témoignages.
Allaiter ou pas allaiter tient du choix cornélien et le chemin pour une réflexion sereine pointe à peine son nez. Cette réflexion concerne tout aussi bien les mères que l’ensemble de la collectivité. La chercheuse Christina Young rapporte ainsi cet incident survenu en décembre 2014 à Louise Burns : pendant qu’elle allaite sa fille de douze semaines dans le luxueux Hôtel Claridge de Londres, cette femme est priée de se couvrir d’une grande serviette.
« Couvrez ce sein, que je ne saurais voir. » Tartuffe avait déjà ouvert la voie à toute une florissante gamme de produits cachant cette poitrine nourricière et objet de tant de désir. Toutefois, le désir s’habille d’ambivalence. Comme le souligne Christina Young dans son article « Corporéité « déviante » et acte d’allaiter : une théorisation », l’ambivalence produit une déviance implicite. Considérer les seins allaitants comme à la fois sexuels et nourriciers revient à effacer l’accommodante dichotomie culturelle entre la maternité et la sexualité. C’est la porte grande ouverte aux sentiments de rejet dont Louise Burns, entre autres, a fait les frais.
En analysant le regard sexuellement objectivant sur les femmes qui allaitent, la scientifique fait le lien avec la timidité des campagnes de santé publique. Ces dernières se limitent en effet à encourager l’allaitement maternel. Par contre, elles échouent à prendre en compte la complexité du contexte culturel dans lequel les mères sont amenées à faire leur choix.
D’autres déconstructions s’en suivent, comme le regard biomédical. La décision de ne pas allaiter est considérée comme un choix irresponsable au vu des bénéfices sur la santé du bébé. Personne n’échappe aux campagnes de l’OMS en la matière et il semble bien difficile de pouvoir faire abstraction des messages de promotion de la santé dans les discours ambiants.
Ce « biopouvoir », pour reprendre les termes de Michel Foucault, révèle une autre composante importante de l’analyse du contexte. Dans la société néolibérale, tout porte à croire que les choix des personnes reposent sur la seule volonté individuelle. Or, analyser les différents « regards » avec lesquels chacun·e conjugue, bon an mal an, ou se construit, tout aussi bon an mal an, pousse la politisation intense et passionnelle de l’allaitement hors de son impasse.
L’article de Caroline Chautems et Irene Maffi, intitulé « Mère et pères face à l’allaitement : savoirs experts et rapports de genre à l’hôpital et à domicile en Suisse » prend en compte la questions du contexte. Les deux chercheuses concluent que le contexte socio-politique génère une homogénéité inattendue entre les savoirs pratiques d’allaitement des sages-femmes, qui adhèrent au modèle de naissance naturelle, et ceux du personnel soignant qui travaille en contexte hospitalier.
Les deux chercheuses mettent également en lumière que les pères restent encore exclus du savoir et des pratiques de l’allaitement. Quant aux mères, elles sont toujours prises dans une naturalisation de leur rôle. Il est ainsi aisé de pathologiser leurs comportements. Troubles somatiques ou psychiques trouvent, dans cette logique, leur origine dans la pensée qui est ancrée dans le corps des mamans.
L’introduction récente du congé paternité pourra peut-être amener une redistribution des rôles, des savoirs, des responsabilités, même en matière d’allaitement. Quand les politiques familiales bougent, le quotidien voit ses gestes changés.
(LC)
Nouvelles questions féministes, vol. 40, N°1, Alix Heiniger, Marianne Modak, Clothilde Palazzo-Crettol, Isabelle Zinn : Editions Antipodes, 2021, 229 pages
L’étude de l’OFSP « Crise COVID-19 : analyse de la situation des personnes âgées et des personnes vivant en institution » pointe la nécessité impérieuse d’agir. Les conditions-cadres doivent être revues.
Curaviva Suisse et Insos Suisse résument les premiers résultats de l’enquête menée par l'OFSP en ligne entre janvier et février 2021, dont REISO s’était fait le relais. Les responsables d’EMS et d’institution, les membres du personnel et leurs proches ont été sollicités pour s’exprimer au sujet de la crise sanitaire. Résultats ? La situation liée à la pandémie de Covid-19 laisse de nombreuses traces, à différents niveaux.
L’enquête brosse un panorama différencié de l’impact subi par les EMS et par les institutions d’encadrement pendant les deux premières vagues de la pandémie. Les résultats amènent à une compréhension de la gestion du Covid-19 dans le contexte institutionnel. De ces premiers constats émergent avec force un appel à agir.
D’une manière générale, l’étude montre que les directions, le personnel et les proches ont perçu les défis de la crise comme plus importants pendant la première vague que lors de la deuxième.
Au cours du premier épisode, la grande majorité des institutions a appliqué les mesures sanitaires de façon systématique. Port du masque, restriction des cours et des activités, contrôle quotidien des symptômes ont été appliqués au pied la lettre.
Durant la deuxième vague, les institutions ont favorisé des solutions individuelles. Cette souplesse a conduit à mieux répondre au dilemme entre la protection collective et les droits de la personnalité. D’autre part, une distinction plus marquée entre les recommandations destinées aux EMS et celles pour les institutions d’encadrement a été prise en compte.
L’étude met en lumière que les autorités ont quelque peu oublié la situation particulière des enfants, des adolescent·e·s et des personnes en situation de handicap.
L’étude montre que la moitié des institutions ont autorisé des visites dans les cas particuliers. Elles ont lancé des programmes d’animation internes supplémentaires et ont aussi proposé la vidéotéléphonie. De plus, l’étude relève que dans 80% des institutions, le personnel a fait preuve d’une plus grande affection envers les résident·e·s durant cette période particulière.
Quelque 70% des personnes vivant en institution ont été très éprouvées de ne pas voir leurs proches. Pour la majorité d’entre elles, il a été particulièrement éprouvant de ne pas pouvoir les toucher.
Constat attendu, la crise a mis à mal l’ambiance de travail. Au moins deux tiers des collaborateur·trice·s indiquent avoir travaillé davantage. Tant durant la première vague que durant la deuxième, les facteurs de stress ont été l’accroissement des tâches de coordination, de prestations de soins et d’accompagnement.
Cette charge de travail élevée n’est pas sans conséquence : 58% des collaborateur·trice·s du domaine des soins et 36% dans le social souhaitent une augmentation du personnel qualifié en prévision de nouvelles vagues ou pandémies.
L’enquête fait émerger une demande venant plus particulièrement des institutions d’encadrement. Il s’agirait de disposer d’un·e interlocuteur·trice en cas de surmenage, psychique ou physique. 35% du personnel requiert également des règles plus claires concernant les relations avec les résident·e·s et les collègues de travail.
La moitié des directions des institutions d’encadrement constate une détérioration de leur situation financière. Dans les EMS, ce chiffre grimpe à 80%.
De nombreuses institutions qui ont répondu à l’enquête témoignent du fait que les deux vagues ont influencé tant la qualité des soins que la prise en charge. 60% des EMS s’inquiètent de voir une diminution effective du nombre de nouveaux et nouvelles arrivantes. Les lits restent vides.
Plus de 70% des directions d’institutions souhaitent une meilleure coordination dans le cadre de la collaboration avec les autorités. Elles adressent leur appel aux cantons, premiers interlocuteurs en situation de crise.
Enfin, 60% des directions appellent de leurs vœux la création d’une stratégie nationale et de mesures uniformes. Il s’agit d’avoir des règles de visite et de sortie aussi claires et uniformes que possible. En parallèle, les institutions apprécient d’avoir une marge d’autonomie en fonction de la situation épidémiologique.
(LC)
Lien vers les résultats de l’enquête.
La professeure Anne-Françoise Allaz a travaillé pendant 30 ans au Centre de la douleur des Hôpitaux universitaires de Genève. Elle publie un ouvrage substantiel et accessible, sur un domaine qui a beaucoup gagné en importance au cours des récentes décennies.
Recension par Jean Martin, médecin de santé publique et bio-éthicien
« Si des différences culturelles de perception et de réponse à la douleur sont observées, elles sont en réalité souvent battues en brèche par les déterminants sociaux. Les facteurs ethniques et culturels ont, en revanche, été associés à une prise en charge inégalitaire, sans doute en lien avec divers stéréotypes. » Issue du livre Douleurs et Émotions - Intégrer les émotions dans le traitement de la douleur, cette citation rappelle que les inégalités restent un problème majeur des systèmes de santé. Et illustre la vaste exploration du lien entre émotions et douleur que la professeure Anne-Françoise Allaz a menée.
Son ouvrage est divisé en quatre chapitres: « Comprendre la douleur » ; « La douleur chronique - une maladie en soi » ; « Quelles approches pour soulager les douleurs » et, enfin, « Intégrer les dimensions émotionnelles ».
La première partie rappelle utilement, sans jargon, ce que l'on sait aujourd’hui de la douleur, de ses causes (quand on les connaît), de ses caractères, y compris au plan physio-pathologique. Suit une immersion progressive, somatique-technique et psychologique-empathique, dans l'expérience professionnelle et académique de l'autrice, assortie de brèves vignettes cliniques. Son exposé demeure marqué par l'humanité toujours nécessaire, particulièrement devant des tableaux chroniques complexes, mais aussi par le réalisme.
La Professeure Allaz souligne l'importance d’une prise en charge multimodale intégrée, tant dans l’évaluation de la situation que dans le développement de la démarche thérapeutique. Elle se place ici bien loin des notions one size fits all (un traitement standard) ou la recherche de la magic bullet (balle-miracle). Au-delà des aspects physiques, elle rappelle l'importance des composantes psychologiques et émotionnelles et de la relation avec le·a soignant·e.
La nécessité de penser multimodal s'étend ainsi à la diversité des méthodes qui peuvent être invoquées. Cela inclut les possibilités complémentaires ou alternatives, auxquelles la scientifique consacre une section. Cet intérêt basé sur les bénéfices confirmés que ces méthodes, utilisées à bon escient, peuvent apporter se manifeste aujourd’hui plus largement, en milieu universitaire aussi [1]. Pour les moins jeunes d'entre nous, cette volonté d'ouverture et de respect à l'endroit de moyens « différents » contraste avec un certain dogmatisme médical étroit il y a un demi-siècle.
Le dernier chapitre discute l'intégration des dimensions émotionnelles dans la pratique, du côté des thérapeutes, du côté des proches, du côté des personnes souffrantes. En ce sens, l'axiome « Pour que la rencontre thérapeutique soit féconde, l'intérêt pour le système de référence de l'autre est essentiel » - s'avère majeur. Et, pour l'autrice, d'aller plus loin: « L'accueil du patient et de sa souffrance est au centre de toute offre de soins (...) Les expériences de vie des patients - dont leurs relations avec le système de santé - ont souvent renforcé leurs craintes de ne pas être crus, ou leur impression d'être rejetés. » On observe des réticences de certain·e·s quand l'éventualité de prescription d'antidépresseurs est évoquée, à cause de la connotation psychologique que cela convoque, alors même que ces substances sont souvent utiles dans le traitement des douleurs (pages 76-77).
Lecture recommandée pour toutes disciplines, tant les notions d'ouverture et de multimodalité sont fondamentales
Anne-Françoise Allaz livre un message essentiel, lorsqu'elle affirme que : « Il est important de savoir expliquer que, en médecine algologique, le modèle de soin est celui de la réhabilitation, où la séquence linéaire traditionnelle diagnostic-traitement-guérison n'est pas applicable.» Et, à propos des thérapies dites humanistes, elle cite leur initiateur Carl Rogers: « Le curieux paradoxe, c'est que quand je m'accepte comme je suis, alors je peux changer ».
L'autrice est didactique, conviviale avec le lecteur comme elle l'est avec ses patient·e·s. Son ouvrage s'avère bien structuré et bien écrit. On en recommande la lecture aux thérapeutes de toutes disciplines, tant les notions d'ouverture - d'esprit et pratique -, sans jugement, et de multimodalité sont fondamentales. La lecture de Douleurs et Émotions apporterait d'ailleurs beaucoup à un stade précoce dans la formation.
Douleurs et Émotions - Intégrer les émotions dans le traitement de la douleur
Anne-Françoise Allaz
Paris: Editions Vigot, 2021, 127 pages
[1] Au CHUV, à Lausanne le 11 mars dernier, la prof. Chantal Berna Renella présentait sa leçon inaugurale sur l'intégration des médecines complémentaires à l'hôpital. Lire son interview dans REISO
Une émission diffusée sur France Culture donne la parole à deux personnes dépendantes à la morphine. Lorsque la douleur est telle qu’elle engendre une spirale infernale, le danger de l’addiction est réel.
Tant les mots de Laura que ceux de Jean-Marie expriment la détresse face à la douleur et la renaissance trouvée dans les opioïdes. Prescrits par leur médecin, ces médicaments leur ont donné, pour quelques instants, la liberté d’un corps sans souffrance. Mais tous deux expliquent avec authenticité comment cette liberté se transforme vite en calvaire.
Dans « Dépendance sur ordonnance », l’émission de France Culture Les Pieds sur terre aborde donc un sujet de santé publique qui inquiète les milieux de la prévention. Les chiffres de dépendance aux opioïdes sont alarmants. En 2019, quelque 130 Américain·e·s en sont mort·e·s chaque jour. Aux Etats-Unis, cette addiction représente même la première cause des décès « évitables » avant 50 ans. Elle précède les accidents de la route et les décès par armes à feux. Ainsi, depuis les années 2000, plus de 300'000 décès par surdose y ont été enregistrés.
En Suisse, la situation reste un peu plus floue. Un article publié en 2018 dans la Revue médicale suisse [1] indiquait qu’entre 1985 et 2015, la consommation suisse d’opioïdes forts était passée de 18 à 421 mg par habitant·e et par année. Cela faisait de notre pays le septième consommateur mondial d’opioïdes. Les auteurs et autrices expliquaient cette hausse par « une meilleure prise en charge de la douleur, mais aussi une prescription plus libérale d’opioïdes pour des indications non démontrées. » Ils recommandaient ainsi « une prudence accrue » aux praticien·ne·s lors de telles prescriptions.
Ce message de prévention ressort fortement dans l’émission de France culture. Tour à tour, un homme et une femme détaillent leurs douleurs poignantes et incessantes, la prescription des premiers antidouleurs puis le passage à la morphine. Pour faire face à l’insupportable, les doses augmentent petit à petit. La dépendance à ces antalgiques s’installe.
Ainsi de Jean-Marie, un quinquagénaire rongé par des maux de dos durant de longues années, dont le patron lui reproche sa « fainéantise » et lui demande de « prouver » sa douleur. Une malformation finalement diagnostiquée, il essaie nombre de médicaments avant de passer à la morphine. Les doses augmentent, les pilules deviennent sa « nourriture », au point de lui faire perdre le lien avec la réalité : « On est plutôt dans les nuages que sur terre. On ne mange plus, on perd le sommeil et la notion de vie de famille : on est là sans être là. » Un week-end, il n’a plus de pilule à disposition, mais se dit qu’il peut tenir jusqu’au lundi. Vomissements, diahrrées, décompensation : la crise de manque est violente. « Même ma femme avait peur », se souvient-il. Il s’est aujourd’hui libéré de cette addiction, mais reste soumis à de violentes douleurs et à la consommation de remèdes. Et surtout à un peu de rancœur : « J’en veux aux médecins qui n'informent pas du danger que représente la prise de ces médicaments sur un long moment. » [2]
De son côté, Laura, une mère au foyer de 28 ans, raconte sa consommation de morphine pendant plus de trois ans pour faire face à des douleurs insoutenables. Elle se souvient des premières absorptions : « C’est un soulagement, on a l’impression de renaître. C’est le premier jour de notre nouvelle vie. Je n’ai plus mal, ça y est ! » Mais petit à petit, il en faut toujours plus. Les problèmes de santé s’accumulent, les doses continuent à croître. Son médecin traitant se trouve désemparé face à son corps qui s’est habitué au produit et que rien ne semble plus pouvoir soulager. « Quand on est maman, on doit tenir la barre, donc c’est l’escalade », reconnaît-elle. Lorsqu’on lui annonce qu’elle est enceinte de six mois, c’est le choc. Emerge beaucoup de culpabilité face à ce déni de grossesse et pour ce petit être nourri in utero « aux cachetons ». Pour pouvoir allaiter son bébé, Laura fini par trouver du soutien auprès d’une addictologue et d’un médecin de la douleur.
Si elle a pu réaliser son souhait de nourrir son nouveau-né grâce à la méthadone, elle n’a pas retrouvé une vie normale. Ses douleurs sont telles qu'elle ne peut quasiment plus marcher et doit se déplacer principalement en chaise roulante. Malgré cela, elle témoigne d’une longue remise en question: « Est-ce que je n’aurais pas pu tenir la douleur un peu plus et rester sous un médicament moins fort ? », se demande-t-elle régulièrement. Le souvenir de ses idées suicidaires l’aident à avancer : « Je n’avais pas le choix. C’était de la survie. C’était ça ou rien. Mais je n’aurais jamais pensé que moi, une femme que tout le monde trouvait forte et résistante à la douleur, je passerais par là. C’est dur quand ça nous arrive à nous. C’est très très dur. »
(Céline Rochat)
« Dépendance sur ordonnance », Les pieds sur terre, France culture, 2021
[1] Ruchat, David et al. « Consommations d’opïodes entre 1985 et 2015 : chiffres suisses et mise en perspective internationale ». Revue médicale suisse. 2018, 14 :1262-4
[2] Pour des raisons de lisibilité, REISO adapte légèrement les citations orales lors de leur transcription écrite.
Lire aussi :
Interview de la Pre Chantal Berna Renella, responsable du Centre de médecine intégrative et complémentaire du CHUV : « Médecine complémentaires au CHUV : défis et opportunité », REISO, Revue d’information sociale, publié le 11 mars 2021.
L'Office fédéral des assurances sociales vient de publier les statistiques 2020 de l'AI. On y apprend que 56% des 453'000 bénéficiaires ont touché une rente, 50% une mesure de réadaptation individuelle et 12% une allocation pour impotent.
La statistique annuelle de l’Assurance-invalidité donne, sur la base d’une matrice fixe, une vue d’ensemble du volume et de l’évolution des prestations dans les différents domaines de l’AI. Elle porte sur la structure et l’évolution des bénéficiaires de rentes en Suisse et à l’étranger, mais aussi sur les prestations en nature de l’AI. La statistique donne une image du système à un instant donné, illustre les évolutions annuelles et fait apparaître des tendances.
Ainsi, en 2020, l’Assurance-invalidité fédérale a octroyé des prestations à 453'000 personnes. Les comptes 2020 se sont soldés par un déficit de 0,4 milliard de francs (résultat de répartition) pour des dépenses de 9,6 milliards de francs. Avec 5,3 milliards, les rentes représentent la plus grande part des dépenses.
Sur l'ensemble des bénéficiaires de prestations en 2020, 420’000 étaient domicilié·e·s en Suisse et 33’000 à l’étranger. A fin de décembre 2020, l’AI a ainsi versé 247'000 rentes d’invalidité, pour un total de 352 millions de francs. En plus, s'y sont ajoutées 67'000 rentes pour enfant (rentes pour les enfants de bénéficiaires adultes de rente AI), équivalentes à 35,8 millions de francs.
Les mesures individuelles ont été octroyées à environ 211’000 assuré·e·s pour un coût total de deux milliards de francs environ. Les mesures médicales concernent 110’000 prestations (fournies essentiellement à des enfants atteints d’infirmités congénitales), suivies par la remise de moyens auxiliaires, à 65’000 bénéficiaires. Enfin, l’AI a fourni à 47’000 personnes des prestations visant la réadaptation professionnelle, pour un montant de 790 millions de francs.
Le rapport publié par la Confédération, disponible en ligne, contient de nombreux tableaux présentant les chiffres majeurs.
(communiqué / croc)
Depuis 40 ans, le sida est majoritairement associé, en Europe, à une population masculine et homosexuelle. Vanessa Fargnoli prend le contre-pied et donne la parole à trente femmes séropositives hétérosexuelles. Des témoignages poignants.
« Que signifie « vivre avec le VIH » à long terme, quand on est une femme qui n’appartient pas à un groupe cible et dont l’expérience n’a pas été problématisée dans l’histoire du sida ? » C’est autour de cette question principale que Vanessa Fargnoli a orienté sa thèse de doctorat, effectuée en sciences de la société à l'Université de Genève. Le résultat de ses travaux figure dans l'ouvrage InVIHsibles : trajectoires de femmes séropositives, paru aux éditions Antipodes.
Pour trouver des réponses à sa question, l’autrice a interrogé, entre 2013 et 2016, trente femmes infectées par le VIH et n’appartenant pas à des groupes cibles tels que définis par l’OFSP [1]. Si les parcours de ces « femmes hétérosexuelles et blanches » s'avèrent complètement différents, un point commun les lie : « toutes se pensaient hors d’atteinte de la menace du VIH/sida », rapporte Vanessa Fargnoli.
Ces témoignages révèlent la violence de l’annonce d’un diagnostic de VIH, qui implique un changement d’identité : ces femmes acquièrent soudain « une identité médicale de « séropositive ». Une fois passé le choc de l’annonce, elles font face à la colère et à la révolte, ainsi qu’à d’autres événements traumatisants : solitude, perte d’un emploi, couple et rêves brisés, angoisses à affronter, perspectives de la mort à apprivoiser. Toutes se sont également retrouvées face au choix de dire ou de taire la maladie. Certaines, comme Ingrid, contaminée par son conjoint qui se savait séropositif mais ne le lui a pas dit, choisissent de se battre devant les tribunaux pour être « reconnues » comme « personne abusée ».
Petit à petit, le processus de « redéfinition de soi » a permis à certaines de transformer le VIH en une « ressource ». Les propos de ces femmes, chargés de résilience et d'abnégation, viennent alors frapper au coeur. « Si c’est juste pour subir, ça ne vaut pas la peine, donc il faut essayer d’en faire quelque chose ! », témoigne en effet Coralie. Zoé voit l’infection au VIH comme un « cadeau » qui lui a permis de vivre différemment : « Je n’aurais jamais eu la vie que j’ai eue. (...) Surtout ça m’a fait me dépasser, ça m’a fait sublimer tout ça d’une belle manière ! Je ne sais pas si j’aurais réussi à faire aussi bien sans ! » Pour Charlotte, le virus lui a « plus offert que pris ».
En Suisse, un quart des 20'000 personnes vivant avec le VIH sont des femmes. Pourtant, celles-ci sont longtemps restées absentes des statistiques et des recherches. Cette invisibilité engendre « trois conséquences », selon la sociologue genevoise. « La première est que la plupart des femmes auraient intériorisé le message « ce n’est pas notre épidémie », leur donnant un faux sentiment de sécurité ». Ensuite, elles subissent de la discrimination au sujet de leur comportement, catégorisé comme « léger » et de « mauvaise vie » puisque, dans les catégories à risque figurent les prostituées. Enfin, les spécificités féminines n’ayant pas été prises en compte dans les essais cliniques, leur santé générale « en a pâti ».
Ainsi, en liant des intérêts scientifiques et sociaux, Vanessa Fargnoli permet de donner une voix à ces femmes restées jusqu’alors invisibles. En outre, l’angle critique féministe adopté par l’autrice contribue à une lecture différente de cette maladie mondiale. Enfin, dans la préface, la professeure Claudine Burton-Jeangros tire une parallèle avec la situation sanitaire actuelle : « Les constats présentés dans cet ouvrage plaident pour la nécessaire mobilisation des sciences sociales dans la gestion, collective et individuelle, des maladies infectieuses. Quels que soient les moyens médicaux et techniques disponibles, les virus et les maladies s’inscrivent au cœur des rapports sociaux. Les maladies ne doivent donc pas seulement être pensées sous l’angle des réponses médicales, mais bien comme des crises qui marquent des trajectoires individuelles, mais aussi exacerbent les rapports de force préexistants au sein de la société. »
(Céline Rochat)
[1] Vanessa Fargnoli rapporte, en page 14, que l’OFSP définit ainsi les groupes cibles : « Les hommes gays et les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) ; les personnes orginiaires de pays à prévalence de VIH élevée, notamment les régions subsahariennes ; les consommateurs et consommatrices de drogue par injection ; les travailleurs et travailleuses du sexe. »
L’Académie suisse des sciences vient de publier le Code d’intégrité scientifique. Ce document prend en compte les évolutions du monde scientifique et vise à renforcer le contrôle de qualité dans le domaine de la recherche.
Référencement insuffisant de contributions significatives dans des publications scientifiques, manque d’objectivité dans l’évaluation de projets de recherche ou encore atteinte à la liberté de recherche dans le cas de subventions privées : les comportements incorrects potentiels s’étendent à l’ensemble du domaine des découvertes scientifiques, de leur réalisation à leur transmission. Le nouveau code d’intégrité scientifique, publié en mai 2021 par l'Académie suisse des sciences, vise à lutter contre ces comportements, mais surtout à présenter ce qui constitue une bonne pratique dans le travail scientifique.
Quatre principes de base fondent une bonne pratique du travail scientique: la fiabilité, l’honnêteté, le respect et la responsabilité. Un groupe d’expert·e·s représentant swissuniversities, le Fonds national suisse, Innosuisse et l'Académie suisse des sciences a donc mis à jour les principes et les règles de procédure relatifs à l’intégrité scientifique, en incluant les « changements considérables » survenus dans le champ scientifique ces dernières années. Le précédent règlement, « Principes de base et procédures concernant l’intégrité dans la recherche scientifique », datait de 2008.
Pour réaliser leur mandat, les expert·e·s ont tenu compte du code de conduite européen ALLEA (2017). « L’intégrité scientifique forme l’épine dorsale d’une culture scientifique saine. Ce n’est que lorsque l’ensemble de la communauté scientifique partagera ces principes de base que la société et la politique nous considéreront comme crédibles et nous accepteront », a déclaré Marcel Tanner, président des Académies suisses des sciences.
Le code recommande également que les étapes de la procédure, telles que la conciliation, l’enquête, la sanction et l’appel, soient clairement définies et distinguées les unes des autres par des règles de procédure correspondantes. La manière dont ces normes sont ancrées dans leurs propres règlements et mises en œuvre de façon concrète relève de la responsabilité des hautes écoles et des organismes de financement.
Fruit de plus de deux années de travail, le code a été adopté par les organes compétents des Académies, du Fonds national suisse, de swissuniversities et d’Innosuisse. « L’intégrité scientifique nous concerne tous, de la direction des hautes écoles aux étudiant·e·s de première année et des chercheurs·euses aux personnes qui attribuent les fonds », souligne Edwin Constable, président du groupe d’expert·e·s.
Le contenu du code est divisé en cinq chapitres majeurs : « Objectifs et destinataires », « Principes fondamentaux de l’intégrité scientifique », « Mise en œuvre des principes fondamentaux », « Violation de l’intégrité scientifique » et « Organisation et principes procéduraux ».
(croc / communiqué de presse)
Une étude mandatée par Avenir Social montre que le risque d’épuisement émotionnel chez les professionnel·le·s du travail social a fortement augmenté depuis 2020.
« Des résultats préoccupants ». C’est ainsi qu’AvenirSocial qualifie l'issue de l’étude empirique réalisée à la fin de 2020 par la Haute école du travail social du Nord-Ouest, à Olten. Celle-ci se base sur les réponses données en ligne par 3'507 professionnel·le·s du travail social. Cette recherche « fait le portrait d’une profession fortement marquée par la pandémie de coronavirus », détaille l’Association suisse. AvenirSocial demande ainsi à la Confédération et aux cantons de mettre plus de ressources à disposition pour l’exercice du travail social.
Les conditions de travail actuelles placent un·e professionel·le sur trois face à un risque élevé d’épuisement émotionnel. En Suisse romande, c’est même une personne sur deux qui est concernée. « Les responsables politiques doivent enfin prendre note de ces résultats alarmants et partir de cette prise de conscience pour toute décision à venir », commente Stéphane Beuchat, co-secrétaire général d’AvenirSocial.
L’étude révèle par ailleurs que la communication entre les professionnel·le·s et les bénéficiaires a fortement évolué. Une croissance de la demande du côté des usager·e·s en est une raison. D’autre part, les transformations des processus et conditions de travail conduisent à une quantité de travail supplémentaire. Ces changements sont généralement vécus de manière négative.
L’étude indique aussi qu’une grande partie des professionnel·le·s maîtrise bien l’évolution des technologies numériques et les réorganisations qui en découlent, comme par exemple le télétravail. Pour AvenirSocial, il est toutefois clair que dans un avenir proche, la surcharge présagée dans l’aide sociale et le stress chronique dans les champs du travail sociopédagogique placeront le travail social face à des défis considérables. « Les travailleur·euse·s sociaux·ales ont atteint leurs limites », relève Annina Grob, co-secrétaire générale de l’association. Et de revendiquer : « Des charges supplémentaires seraient intenables et doivent être évitées. Il faut davantage de ressources, sous la forme de personnel et de moyens financiers. »
(croc / communiqué)
Les résultats de l’étude sont disponibles sur ce lien, uniquement en allemand.
La communication en milieu médical : un labyrinthe donne aux soignant·e·s et aux patient·e·s les moyens de mieux appréhender les situations de communication dans lesquelles ils et elles se trouvent impliqué·e·s.
« On ne peut pas ne pas communiquer », clamait le sociologue Paul Watzlawick. C’est sur cette maxime connue que les auteurs Pascal Signy et Gilles Merminod ouvrent le deuxième chapitre de leur ouvrage La communication en milieu médical : Un labyrinthe. Interrogeant brièvement la notion de communication, ils rendent les lecteurs et lectrices attentif·ve·s à la notion de signes, ces petits éléments qui détiennent « le pouvoir de tout exprimer ».
Paru dans la collection Savoir Suisse des Presses polytechniques et universitaires romandes, ce petit ouvrage ambitionne de permettre aux patient·e·s et aux membres du personnel médical de réfléchir aux enjeux particuliers résidant dans les échanges en milieu médical. Il évoque le poids des mots, les différents canaux et codes impliqués dans la communication ou encore les enjeux liés aux identités des individus prenant part à l’échange. La présence d’un tiers ou la question de la technologie sont également abordés.
S’appuyant sur les sciences du langage, ce bouquin donne aux acteurs et actrices de la santé comme au grand public les moyens de mieux appréhender les situations de communication dans lesquelles ils et elles se trouvent impliqué·e·s. Il s’appuie sur les recherches menées sur la communication médicale et « se conçoit comme une vue d’ensemble des enjeux communicationnels ».
Pascal Signy est spécialiste des sciences du language et directeur du centre de recherche au Service de psychiatrie de liaison du CHUV. Il est professeur de sociolinguistique à la Faculté de biologie et médecine de l'Université de Lausanne.
Gilles Merminod est enseignant et chercheur en linguistique. Il travaille au CHUV et à l'Université de Lausanne.
(croc / Savoir Suisse)
L’Office fédéral de la statistique vient de publier son rapport 2021 sur les familles en Suisse. On y apprend que 13% des enfants vivent dans un ménage monoparental dont le risque de tomber dans la pauvreté et de dépendre de l’aide sociale est plus élevé.
A quoi ressemble la vie des familles en Suisse ? Quelles sont celles qui sont davantage menacées par la pauvreté ? Les échanges intergénérationnels sont-ils nombreux et quelles formes prennent-ils ? Quelle est l’attitude de la population envers l’homoparentalité ? Publié le 11 mai 2021, le rapport de l’Office fédéral de la statistique « Les familles en Suisse » est une nouvelle édition de la partie statistique du rapport de la famille 2017. Il est composé de 18 chapitres, qui explorent l’ensemble des éléments liés à la vie de famille.
Ainsi donc, le focus est mis par exemple sur les « Ménages et formes de vie en commun », « Les relations de couple » ou l’« Accueil extrafamilial des enfants ». Les problématiques financières sont explorées dans plusieurs chapitres, notamment à travers « Pauvreté, aide sociale et protection sociale ». Les questions de santé, de violence domestique ou d’« Attitude concernant les rôles de genre et la vie familiale » font également l’objet de parties distinctes. Une comparaison entre les données de la Suisse avec celles de l’Europe conclut ce document.
En Suisse, près d’un ménage privé sur trois compte des enfants de moins de 25 ans et la grande majorité des enfants vit avec ses deux parents. 13% des enfants de moins de 25 ans vivent dans un ménage monoparental et 6% dans une famille recomposée. Nombreux sont ces ménages monoparentaux dont la situation financière est tendue : 23% d’entre eux ont des difficultés voire de grandes difficultés à joindre les deux bouts, alors que c’est le cas de 13% des ménages de couples avec enfants et de 7% de ceux formés d’un couple de moins de 65 ans sans enfant. Les ménages monoparentaux, comme les personnes vivant seules, sont particulièrement exposés à la pauvreté en termes de revenu. 21% bénéficient de prestations de l’aide sociale. C’est nettement plus que pour les autres formes de ménages.
Pour les parents élevant seuls des enfants, il est souvent difficile de concilier obligations familiales et activité professionnelle, et le parent qui a la garde (en général, la mère) ne peut souvent exercer une activité professionnelle que de manière limitée. Le revenu provenant de cette dernière ne peut pas toujours être complété de manière suffisante par des pensions alimentaires.
La situation familiale, et notamment le fait de vivre en couple, influe grandement sur la santé des membres du ménage et sur leur bien-être. Les personnes en ménage monoparental et celles qui vivent seules déclarent moins souvent être en bonne ou en très bonne santé (respectivement 75% et 78%) que celles vivant dans un ménage de couple avec enfants (83%) ou de couple sans enfant (81%).
De plus, la part des personnes qui se disent très satisfaites de leur vie actuelle est nettement plus basse (24%) chez les personnes vivant dans un ménage monoparental et chez celles de moins de 65 ans qui vivent seules que chez les personnes qui vivent en couple, avec ou sans enfant (respectivement 38% et 41%). Cela vaut pour le degré de satisfaction par rapport aux relations personnelles autant que par rapport aux conditions de logement.
18% de la population de 25 à 80 ans apporte son aide au moins une fois par semaine à une personne limitée pour des raisons de santé dans les activités de la vie quotidienne. Quel que soit le groupe d’âge, les femmes sont plus actives que les hommes dans ce domaine (20% contre 15%).
L’âge des personnes qui fournissent de l’aide a une forte influence sur la catégorie de personnes aidées. Les 25 à 44 ans et les 45 à 64 ans soutiennent avant tout leurs parents ou beaux-parents malades ou limités pour des raisons de santé (respectivement 48% et 65%).
En Suisse, plus d’un tiers des enfants de moins de trois ans sont confiés à une garde extrafamiliale formelle. Cela correspond à la moyenne européenne de 35%. Outre les structures de garde formelle telles que les crèches et les familles de jour affiliées à un réseau, d’autres formes de garde occupent une place importante: 40% des enfants de moins de trois ans sont pris en charge exclusivement par leurs grands-parents, d’autres particuliers ou des familles de jour non affiliées à une organisation ou le sont en combinaison avec une garde formelle. La moyenne européenne se situe à 28%.
(croc / communiqué OFS)
Promotion santé suisse a mis à jour son argumentaire. Ce document vise à encourager les décideur·se·s et les professionnel·le·s impliqué·e·s dans des domaines touchant à la santé à en intégrer la promotion dans leurs activités.
« Les mesures de promotion de la santé et de prévention des maladies nécessitent une approche intersectorielle qui renforce les environnements favorables à la santé et oriente les comportements », affirme Promotion santé suisse dans sa communication liée à la publication de son argumentaire Promouvoir la santé et prévenir les maladies.
Ainsi, afin d’encourager toutes les personnes impliquées dans des activités ayant (potentiellement) des conséquences sur la santé – comme la protection de la jeunesse, la promotion de la santé à l’école, la santé et la sécurité au travail, l’action sociale, le soutien au logement, la promotion de l’intégration, l’aménagement du territoire, la gestion de la mobilité ou encore la protection de l’environnement – la fondation nationale a mis à jour un argumentaire dont la précédente version datait de 2010. Les décideurs et décideuses ainsi que les professionnel·le·s de tous les domaines y trouveront des arguments sur la manière et les raisons de mettre en œuvre la promotion de la santé dans des mesures, des activités ou des projets.
L'argumentaire montre la nécessité d'agir, les mesures efficaces et les défis futurs de la promotion de la santé et de la prévention des maladies. Il souligne pourquoi il est important de façonner les conditions cadres à tous les niveaux politiques de manière à promouvoir la santé par des mesures structurelles. Les messages principaux sont également résumés dans dix infographies et autant de courtes vidéos explicatives.
L’argumentaire est séquencé en huit chapitres thématiques, en plus de la conclusion, de la bibliographie et de la documentation complémentaire:
Parmi les infographies mises à disposition, citons les « Déterminants de la santé », « Comportement en ligne », « Santé au travail » ou encore « Egalité des chances ».
(croc / communiqué)
Lien vers la page de l’argumentaire, contenant les infographies et les vidéos
Privé·e·s de socialisation, les 15-24 ans subissent de plein fouet les effets collatéraux de la pandémie. Un reportage souligne combien la situation leur pèse et inquiète professionnel·le·s de la santé, parents et enseignant·e·s.
« Ça va finir quand ? Je n’ai plus d’espoir de la vie. » Ces mots poignants résument ce que ressens une jeune apprentie anéantie par la solitude. Ils disent aussi ce que vivent de nombreux·ses jeunes en marge de la pandémie de Covid-19. Cette situation inquiétante gît au cœur de l’émission Temps Présent diffusée le 22 avril 2021 sur RTS 1. Intitulée « Pandémie psychique, les jeunes sont aux soins intensifs », elle montre la profonde détresse d’une population peu prise en compte depuis le début de la crise sanitaire, car considérée comme moins vulnérable face au virus.
De nombreux·ses professionnel·le·s romands détaillent leurs inquiétudes pour ces « sacrifiés du Covid ». Une étude de l’Université de Bâle estime que les 15-24 ans sont en effet les plus affecté·e·s par cette pandémie : des 7% de jeunes souffrant de symptômes dépressifs sévères avant la crise, ils sont maintenant 29%. Les consultations explosent auprès des services de santé psychique pour adolescent·e·s et des pédiatres. Prise de poids et troubles du comportement alimentaire augmentent, tout comme les crises d'angoisses, les idées noires et les tentatives de suicide.
Les multiples témoignages qui parsèment le reportage illustrent combien les écolier·e·s, les adolescent·e·s et les jeunes adultes subissent cette situation qui dure. L’incertitude quant à l’avenir ajoute une pression pour nombre d’entre elles et eux. Apprenti·e·s privé·e·s de cours pratiques qui craignent un diplôme estampillé Covid, étudiant·e·s scotché·e·s devant un écran toute la journée : toutes et tous parlent de la souffrance liée à l’isolement, à une étape de la vie où la socialisation est pourtant un élément nécessaire au bon développement de l’humain. Un appel au secours dramatique.
(croc)
Lancée en 2013 par la Confédération, l’application « Women’s Human Rights » a été mise à jour. Dotée d'une liste de mots-clés complétée en continu, elle a déjà été téléchargée des dizaines de milliers de fois à travers le monde.
C'est une nouvelle étape pour l’application visant à renforcer les droits des femmes. Développée par le Centre suisse de compétence pour les droits humains et le Département fédéral des affaires étrangères, elle a fait l'objet d'améliorations lancées en ce début de 2021. Depuis son lancement en automne 2013, cette application a suscité de l’intérêt partout dans le monde : elle a été téléchargée des dizaines de milliers de fois.
Grâce à « Women’s Human Rights » (W’sHR), les utilisatrices et utilisateurs accèdent à une banque de données compilant les principaux textes de droit international concernant les droits des femmes. Au moyen des 147 mots-clés prédéfinis, plus de 650 documents peuvent être facilement parcourus. Pour chaque terme recherché, une définition est donnée, ainsi que des passages pertinents des résolutions des Nations Unies et des conventions internationales. D’autres documents utiles en rapport avec ces mots-clés sont également affichés.
L’application couvre un large éventail de sujets, comme « Covid-19 », « avortement », « femmes handicapées », « orientation sexuelle et identité de genre » ou encore « violence domestique ». La liste des mots-clés est sans cesse complétée.
L’application, en anglais, est gratuite et disponible dans les magasins d'applications. De plus, l’accès sur la banque de données peut se faire via le site internet womenshumanrights.ch.
L’ouvrage collectif Pouvoir discrétionnaire et pratique réflexive ; La « position paradoxale des « faiseurs » d’action publique est paru dans la collection Res Socialis. Dirigé par le professeur Marc-Henry Soulet, il propose un bilan critique de l'autonomie des agents en contact avec le public.
Jusqu’où le modèle de la street level bureaucracy de Michael Lipsky et de son pouvoir discrétionnaire est-il effectif à l’heure de la nouvelle gestion publique ? En quoi la marge de manœuvre des praticiens réflexifs chers à Donal Schön provient-elle du flou et de l’impraticabilité des objectifs de l’action publique ou, davantage, de la profusion des règles et de leur caractère contradictoire ? La publication Pouvoir discrétionnaire et pratique réflexive ; La position paradoxale des « faiseurs » d’action publique propose un bilan critique de l’autonomie des agents en contact avec le service public. Dirigé par Marc-Henry Soulet, professeur ordinaire de sociologie, titulaire de la Chaire de travail social et politiques sociales de l’Université de Fribourg, l’ouvrage collectif s’attache à mettre en perspective de nombreuses interrogations dans le contexte contemporain de l’action publique, marqué notamment par l’émergence de nouvelles formes de contrôle et de mobilisation des professionnels.
Plusieurs auteurs et autrices romand·e·s ont contribué à la rédaction de ce livre. Marc-Henry Soulet signe, outre l’introduction, le chapitre « Retour sur la discretion » et « Le pouvoir discrétionnaire et le praticien réflexif face aux nouvelles normes managériales ». Jean-Christophe Contini, éducateur spécialisé, docteur ès Lettres de l’Université de Fribourg, contribue à la réflexion dans « Déterminé pour ne pas l’être » : peut-on parler d’un agir discrétionnaire, entre éducation spécialisée et travail social ? ». La professeure et directrice de la Haute école de travail social de Genève, Joëlle Libois, invite à s’interroger sur les « Défi et force du travail social : penser et agir à partir de la complexité des paradoxes ». Quant au directeur de l’Institut de recherche et de documentation pédagogique de Neuchâtel, Bernard Wentzel, il propose « Vers une injonction de réflexivité : ébauche pour une lecture critique ».
La Chaire de travail social et politiques sociales de l’Université de Fribourg dirige la collection Res Socialis dans laquelle sont édités des ouvrages originaux et des traductions de textes classiques.
(croc)
Les pratiques, enjeux et différences en matière d’animation socioculturelle enfance et jeunesse ont été passés au crible dans l’ensemble de la Suisse pour la première fois. Une publication en dévoile les résultats.
« Cette initiative rend visibles les réalités de l’action professionnelle et dévoile les enjeux qui en découlent. Elle renforce les savoirs sur le travail social au sens large et contribue activement à sa reconnaissance. » Ces propos sont ceux de Yuri Tironi. Le professeur associé à la Haute école de travail social et de la santé Lausanne (HES-SO) signe le « Préambule de la Suisse romande » de l’ouvrage « Animation socioculturelle enfance et jeunesse ; Résultats de la première enquête nationale suisse », publié en trois langues aux éditions Seismo.
Ce recueil est le fruit d'un travail mené dans l'ensemble des cantons. Les buts étaient notamment de « combler le manque de connaissances sur l'animation socioculturelle enfance et jeunesse en Suisse et de procéder pour la première fois au niveau national à une analyse de ce champ d’activité. » Pour ce faire, les auteurs et autrices ont cherché à interroger tous les centres d’animation socioculturelle enfance et jeunesse, dans l'ensemble des régions linguistiques du pays.
Pour mener leur travail, les chercheur·se·s ont agendé leurs questions en quatre niveaux d'analyse : une analyse descriptive de l’offre, l’identification des besoins et de l’identité professionnelle des animatrices et animateurs socioculturels, l'analyse de la création d’opportunités d’éducation et de participation et, enfin, l'analyse des différences et points communs entre régions linguistiques et entre types de communes.
Les résultats empiriques sont présentés en sous-chapitres thématiques, comme les formes d’offres, les axes de travail, les caractéristiques du personnel et des bénéficiaires ainsi que des différentes structures de financement, de pilotage et d’assurance qualité. Chaque point contient une contextualisation, une discussion et une interprétation. Puis, après une analyse transversale portant sur les différences entre les régions linguistiques notamment, l'ouvrage conclut sur un chapitre « discussion et perspective d’avenir ».
Jusqu’à aujourd’hui, il n’existait pas de recueil systématique de connaissances sur l’animation socioculturelle enfance et jeunesse en Suisse. Cette publication peut donc désormais servir de « compendium de l’état actuel des recherches », ainsi que le mentionnent les cinq auteurs et autrices.
(croc)
Sept centres romands spécialisés dans le suivi de personnes discriminées ont publié un ouvrage basé sur l’expérience d’individus confrontés au racisme. Il contient aussi une analyse des différentes pratiques de terrain.
Les centres romands de consultation liés au racisme et à l'intégration* se sont associés pour publier l'ouvrage « A l’écoute des personnes confrontées au racisme ». Les données qui figurent dans l’ouvrage permettent de mettre en lumière la réalité du racisme dans les sept cantons romands. Selon le communiqué de presse accomagnant cette publication, ce travail constitue une mise en exergue d’un phénomène menaçant la cohésion sociale et qui atteint la dignité de celles et ceux qui le subissent. Les centres romands espèrent ainsi donner de la visibilité aux personnes confrontées au racisme, mais également favoriser et consolider les actions de sensibilisation et de prévention.
Ce document permet également de rendre compte du travail diversifié des centres de consultation, qui se décline en plusieurs niveaux et avec différentes facettes sociales, juridiques, pédagogiques, voire politiques. Il montre leurs missions, eux qui assurent une écoute et donnent la possibilité aux personnes confrontées au racisme de s’exprimer dans un cadre neutre.
Celles et ceux qui s’adressent à ces ressources espèrent obtenir reconnaissance du tort subi, justice et réparation ou souhaitent dénoncer un fait qui les offense. Ainsi, une analyse scientifique des cas accompagnés par les bureaux romands a permis de dresser un constat des incidents de discrimination reportés, leur évolution dans le temps, ainsi qu’une vue d’ensemble des différentes prestations et pratiques offertes par les centres.
« A l’écoute des personnes confrontées au racisme » s’adresse à tou·te·s, aussi bien la population que les personnes professionnellement engagées dans l’action et la réflexion contre la discrimination raciale, qu’il s’agisse des instances politiques, sociales, de l’éducation, la santé, les administrations, la justice, les associations ainsi que les ONG. Il est disponible en ligne.
* Sont partenaires de « À l’écoute des personnes confrontées au racisme » :
Ils sont associés à l’Institut des sciences sociales des religions de l’Université de Lausanne (UNIL), l’Université de Genève (UNIGE) et le réseau de centres de conseil pour les victimes de racisme.
Pour améliorer la santé, accroître les opportunités et permettre à chacun·e de s’épanouir tout au long de sa vie, l'OMS s'engage dans une lutte mondiale contre l'âgisme. Afin de « créer ensemble un monde pour tous les âges ».
« L’âgisme nuit à notre santé et à notre bien-être et constitue un obstacle majeur à l’adoption de politiques et de mesures efficaces pour un vieillissement en bonne santé. » Face à ce constat, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a lancé en ce mois de mars 2021 une campagne mondiale contre l’âgisme. Celle-ci s’inscrit dans le cadre de la Décennie pour le vieillissement en bonne santé 2021-2030, qui prévoit la mise en place de partenariats multisectoriels et multipartites. Le but est de créer les conditions favorables à la compréhension et à l’amélioration de la qualité de vie des personnes âgées, comme à la valorisation de leur rôle dans la société.
Dans son rapport de 173 pages, actuellement disponible uniquement en anglais, l’institution fournit un cadre d'action pour réduire l'âgisme et émet des recommandations spécifiques pour les gouvernements, les organisations de la société civile ou du secteur privé. Le document rassemble les preuves disponibles sur la nature et l'ampleur du phénomène, ses déterminants et son impact. Il décrit les stratégies efficaces pour le prévenir et le contrer, identifie les lacunes et propose de futures pistes de recherche pour améliorer la compréhension de ce sujet.
Selon l’OMS, « l’âgisme prend différentes formes au cours de la vie. Un adolescent peut, par exemple, subir des moqueries pour avoir lancé un mouvement politique ; des personnes plus âgées ou plus jeunes peuvent se voir refuser un emploi en raison de leur âge ; ou une personne plus âgée peut être accusée de sorcellerie et chassée de sa maison et de son village. »
Le rapport est accompagné d’un guide de 21 pages intitulé « Lancer un dialogue sur l’âgisme ». Disponible en français, en anglais et en espagnol, il contient de nombreux thèmes et questions vouées à encourager les un·e·s et les autres à s’exprimer et à s’écouter à ce sujet. « Un dialogue ouvert et continu peut nous aider à reconnaître les idées reçues et les stéréotypes que nous avons tous intériorisés tout au long de notre vie, à reconnaître l’âgisme lorsque nous le rencontrons et à comprendre que l’élimination de la discrimination exige une action collective », estime l’OMS. Elle précise également que « remettre en cause les idées reçues et les attitudes est le premier pas vers l’épanouissement à tout âge et vers l’exploitation du potentiel de tous les membres d’une communauté. Le dialogue encourage en outre le genre de transformations personnelles et politiques nécessaires pour construire un monde où tous les âges ont leur place. » Les posts des réseaux sociaux liés à cette campagne peuvent utiliser le hashtag #AWorld4AllAges.
Le résumé contient des précisions sur les caractéristiques et les déterminants liés à l’âgisme. Il en précise l’ampleur, l’impact, donne des stratégies pour le réduire et des recommandations relatives aux mesures à prendre.
En Suisse, la Fédération des Associations des retraités et de l'entraide Suisse, la FARES, se réjouit de cette campagne, comme le mentionne sont président Bea Heim: « Nous devons lutter ensemble contre la discrimination fondée sur l’âge en devenant un mouvement, un mouvement qui transcende les générations. »
Lien vers la page de la campagne mondiale et l’ensemble des documents.
Une brochure vouée à favoriser la santé des proches aidant·e·s vient de paraître. Conçue par Promotion Santé Suisse, elle est destinée à ces personnes ressources, mais aussi à leur entourage et à toute la population.
Publiée en trois langues, la brochure « Prendre soin de soi et de son proche. Pour les personnes qui apportent aide et soin à un·e proche » vise à favoriser la santé des proches aidant·e·s en les encourageant à ne pas s'oublier. Elle présente des suggestions et des pistes utiles en réponse aux questions telles que « Qu’est-ce qui vous fait du bien? », « De quoi pouvez-vous être fier·ère? » ou encore « Comment pouvez-vous être soutenu·e par d’autres personnes? ». Conçue sur mandat de Promotion Santé Suisse, elle vient de paraître en français, en allemand et en italien, dans un langage simple et compréhensible. Un groupe de suivi composé de professionnel·le·s et de représentant·e·s de proches aidant·e·s en ont soutenu le développement.
Cette publication s’appuie sur la parole de personnes directement concernées. Les proches aidant·e·s y trouvent des impulsions encourageantes provenant de femmes et d'hommes vivant des situations identiques à la leur.
La brochure se veut également informative pour la population en général. Un chapitre entier est consacré aux principales attentes des proches aidant·e·s vis-à-vis de leur entourage. Ce document invite à la réflexion et la compréhension incite à la discussion.
Lien pour télécharger la brochure « Prendre soin de soi et de son proche. Pour les personnes qui apportent aide et soin à un·e proche ».