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L’altruisme des uns et des autres en fin de vie

Jeudi 18.01.2018
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La réflexion sur les soins médicaux en fin de vie soulève des questions subtiles. Marqué par une sagesse pratique acquise au lit du malade, Gian Domenico Borasio donne des pistes claires et concises pour repenser cette phase de l’existence.

Par Jean Martin, médecin de santé publique et bio-éthicien

Patron des soins palliatifs au CHUV de Lausanne, le professeur Gian Domenico Borasio est un avocat convaincant de sa cause, aux progrès de laquelle il a apporté de grandes contributions, d’abord en Allemagne puis en Suisse depuis 2011. Après son ouvrage «Mourir» [1], il publie «L’autonomie en fin de vie» [2] qui complète ainsi sa réflexion. A son sens, malgré les progrès récents, la médecine et les soins palliatifs ne reçoivent pas l’attention ni les ressources qui devraient leur être dédiées. « Quand il ne s’agit plus que de savoir si l’on est pour ou contre [l’aide à mourir], on perd de vue l’enjeu essentiel. » Plusieurs termes dans les débats autour de la fin de vie lui paraissent ainsi nécessiter des clarifications et des précisions afin d’en tirer des enseignements pour la pratique.

Le spécialiste pose d’emblée le cadre de la signification de l’euthanasie dans une société multiculturelle et pluraliste. « La médecine palliative dérange le système médical parce qu’elle pose la question ‘tout ce qui est faisable est-il toujours utile ?’ Ce dont la médecine a en urgence besoin, c’est de redécouvrir la mort naturelle et ce qu’on pourrait appeler une abstention bienveillante en fin de vie. » Il souligne que « la médecine palliative se différencie de la curative uniquement par son objectif, améliorer la qualité de vie plutôt que viser sa prolongation, et non par les moyens qu’elle met en œuvre. » Dans ce contexte, le professeur rappelle que les soigants ne sont jamais dans une voie à sens unique ; ils peuvent toujours arrêter une démarche donnée ou la modifier. « Pour un médecin en soins palliatifs, c’est un privilège d’accompagner des personnes dans la dernière étape de vie. On découvre une réalité complexe très éloignée des simplifications et généralisations. »

Les balises déontologiques

Des principes de base sont mobilisés dans la réflexion. Ainsi, toute intervention médicale, qu’elle soit diagnostique, thérapeutique ou autre, n’est licite que si le patient a donné son consentement. Ce qui peut être grave, écrit l’auteur, « c’est que la plupart des médecins n’ont pas vraiment conscience que le consentement n’est que la deuxième condition à remplir. La première, souvent pas explicitement thématisée, c’est l’indication médicale. » Ce point est fondamental en fin de vie. L’argument « il faut bien faire quelque chose », est une échappatoire qui n’est pas recevable ; tout geste médical doit poursuivre un objectif clair, justifiable et en quelque sorte suffisant. Ainsi : « La loi allemande exige que le médecin contrôle l’indication médicale avant même d’établir la volonté du patient. »

Sur le thème de l’assistance au suicide, le spécialiste estime que « c’est un choix individuel qu’il faut respecter, mais ce n’est de loin pas la solution pour tous (environ 1% des décès aujourd’hui en Suisse). Il faut par contre réglementer cette pratique par une loi ». Sur ce point, ajoutons que, à deux reprises, le Conseil fédéral n’a pas jugé nécessaire de légiférer. A l’inverse, Vaud puis Neuchâtel ont effectivement adopté récemment une disposition légale. A l’origine du livre de Borasio se trouvent justement les débats qui ont eu lieu en Allemagne sur une loi destinée à poser le cadre du suicide assisté, qui n’apparaissait pas dans le Code pénal. Le résultat a été un compromis, insatisfaisant pour l’auteur, entre une version conservatrice et une plus libérale à la rédaction de laquelle il avait collaboré. En dépit de son ouverture à l’assistance au suicide, le professeur exprime sa préoccupation que trop d’accent puisse être mis sur l’autonomie du patient, avec le risque que l’exigence de bienveillance du soignant soit négligée.

Faut-il admettre l’euthanasie active directe ? Borasio n’y est pas favorable. Il l’estime inutile dans la mesure où est admis le suicide assisté. Dit en toute humilité, le sous-signé partage la même opinion. Maintenir l’interdiction du meurtre sur demande de la victime, comme précisé par l’art. 114 du Code pénal suisse, a pour effet de garantir que la décision de mettre fin à ses jours a été mûrement réfléchie jusqu’au dernier moment. Ce qui est le cas si, comme pour le suicide, c’est l’intéressé et non un médecin qui fait le geste ultime. Les différentes formes d’euthanasie et leurs circonstances sont clairement définies dans l’ouvrage, ainsi que la sédation palliative et le suicide par le jeûne, sujet qui a retenu l’attention récemment.

Le temps du dialogue avec le patient

Quant aux directives anticipées et à la planification anticipée des soins, elles sont aujourd’hui nettement moins fréquentes en Suisse, et encore moins en Suisse romande, qu’en Allemagne. Le professeur tient donc à inciter les professionnels et les institutions sanitaires à en parler systématiquement à leurs patients, en prenant le temps nécessaire, souvent long, pour expliquer de quoi il s’agit. Un conseil, qui vaut sur le plan général : « Aller chercher le patient toujours exactement là où il se situe. » Si la rédaction de directives précises est complexe, une directive relativement simple consiste à désigner un représentant thérapeutique, à qui est confié un «mandat pour cause d’inaptitude». Il tombe sous le sens que ce représentant est en principe une personne que le patient connaît bien et en qui il a toute confiance.

Comment se préparer à la fin de vie ? Sur cette question délicate, Borasio a une approche subtile nourrie d’expérience professionnelle. « Chaque jour, je vois à quel point la meilleure préparation à une bonne mort est d’avoir vécu une bonne vie. Cependant, la définition de ce qu’est une bonne vie - ou mort - est complètement individuelle et ce n’est pas aux autres de porter un jugement (…) Le miracle, c’est d’observer comment les gens gèrent leur fin de vie de façon cohérente avec leur biographie. »

Sur ce thème, il confiait récemment dans un entretien : « Se préparer à mourir est la meilleure façon d’apprendre à vivre. » [3] Une phrase forte, capable de faire réfléchir tout un chacun à n’importe quel âge. Et il précisait : « Je suis toujours aussi surpris de constater que, si chaque personne est différente face à la mort, il y a une constante presque immuable : un déplacement des valeurs personnelles de l’égoïsme vers l’altruisme. Presque tous ceux dont la fin est proche découvrent l’importance des autres […] Quotidiennement, nous observons combien ce changement d’échelle des valeurs est récompensé par une meilleure qualité de vie durant le temps qui reste. »

Un poids pour les proches ?

A propos d’une éventuelle pression familiale ou, plus largement, d’une pression sociétale qui pousserait les personnes âgées à se suicider, elle est à prendre très au sérieux. Mais là encore, Borasio parvient à montrer la complexité et la subtilité de l’enjeu: « Concrètement, une personne mourante peut légitimement exprimer le désir de ne pas être un poids pour ceux qui l’entourent. Il est difficile de juger ce désir éthiquement irrecevable. » Cette position mérite elle aussi de retenir l’attention. Et de citer la phrase d’un proche aidant : « On pense que ce sont les vivants qui ferment les yeux des mourants mais ce sont les mourants qui ouvrent les yeux des vivants. »

L’auteur tient des propos fermes, qui ne sauraient plaire à certains, sur le rôle de l’industrie. « Celui qui croit qu’on ne rencontre que des personnes altruistes et désintéressées s’aveugle. Dans les faits, trois facteurs principaux guident l’action du système de santé moderne : 1) l’argent ; 2) l’argent ; 3) l’argent. » Fortes paroles dans un ouvrage sérieux publié par une maison d’édition académique !

Sur ce point, une étude suisse récente a montré que la probabilité de recevoir une chimiothérapie dans le dernier mois de vie est deux fois plus élevée pour les patients disposant d’une assurance privée que pour ceux qui ont uniquement l’assurance maladie obligatoire. Le médecin pousse le raisonnement plus loin : « Si j’étais lobbyiste pour les pharmas, j’investirais beaucoup d’argent pour prolonger le débat sur l’euthanasie. Plus il fera les gros titres, mieux ce sera. C’est le moyen le plus efficace de détourner l’attention des vraies atteintes à la dignité en fin de vie : un acharnement thérapeutique omniprésent. » Afin de lever toute ambiguïté, il précise dans un entretien ce qui se passera si le tournant nécessaire vers une médecine d’écoute n’est pas pris : « Le système risque d’évoluer vers une situation à deux vitesses, avec des patients ‘sous-soignés’ et d’autres ’sur-soignés’. Afin de ne pas risquer l’acharnement, mon conseil, vers la fin de sa vie, est de déchirer sa carte d’assurance privée ». C’est écrit en 2017 alors qu’on croyait ce genre d’acharnement révolu.

En résumé, un ouvrage substantiel tout en restant concis, très bien informé, considérant les problématiques de manière objective et marquée par la « sagesse pratique » acquise au lit du malade, loin des positions dogmatiques. Hautement utile et nécessaire.

[1] Gian Domenico Borasio, «Mourir», Lausanne : Presses polytechniques et universitaires romandes, collection « Le savoir suisse », 2014.

[2] Gian Domenico Borasio, «L’autonomie en fin de vie», Lausanne : Presses polytechniques et universitaires romandes, collection « Le savoir suisse », 2017, 160 pages. Ouvrage publié en langue allemande en 2014, avec une adaptation à la situation suisse pour la présente version française. A noter que ce livre contient d’intéressantes vignettes cliniques.

[3] Le Temps (Lausanne), 4 novembre 2017, p. 10-11. Interview par Sylvie Logean.

Comment citer cet article ?

Jean Martin, «L’altruisme des uns et des autres en fin de vie», REISO, Revue d'information sociale, mis en ligne le 18 janvier 2018, https://www.reiso.org/document/2579

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