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Mangez des fruits et des légumes ! Faites de l’exercice physique ! Arrêtez de fumer ! Arrêtez de boire de l’alcool ! Depuis plus de 30 ans, les campagnes de santé publique nous dictent notre vie quotidienne. Mais ces injonctions sont-elles efficaces ? L’accumulation de ces messages n’est-elle pas devenue contre-productive ? La bonne santé est-elle l’ennemie du plaisir ?
Pour le Dr Laurent Chambaud, la prévention ne doit pas rimer pas avec privation et injonction. Elle doit au contraire prendre en compte la notion plaisir. Le directeur de l'Ecole des hautes études en santé publique défend des actions qui s'adressent à l'individu au plus près de son environnement. L’émulation, l’engagement sont, selon lui, les bons leviers d'une politique de réduction des risques.
En marge des conférences principales, une session parallèle m’a particulièrement intéressé, intitulée « Sterben ist (k)eine Kunst », ou Mourir est/n’est pas un art. Les responsables de deux institutions y ont présenté leurs pratiques en matière de soins palliatifs et de fin de vie. J’aimerais évoquer ici des éléments apportés par Theres Meierhofer, directrice de la Erlenhaus d’Engelbert (OW), qui est aussi membre du Groupe de travail Palliative Care de son canton[1]. Son institution héberge 50 résidents et doit assumer le décès, chaque année, de 40% d’entre eux environ, une proportion semblable à celles d’autres établissements.
La relation. L’action est basée sur la relation en tenant compte des ressources et intérêts de chacun et de la vie en commun dans la maison. L’équipe oeuvre avec le résident et ses proches conformément à une devise « En sécurité pendant la vie – en sécurité au moment de mourir ». L’équipe de Erlenhaus s’efforce par exemple de trouver, avec les patients, l’occasion de revisiter leur histoire, de parler de ce qu’ils ont vécu et de ce qu’ils vivent dans la maison. Avec les proches aussi, chaque fois que c’est possible. Ces échanges montrent, aux côtés d’autres moyens bien sûr, un effet bénéfique sur les symptômes.
Les rituels. Leur importance est centrale. Il n’est pas question, comme cela a pu être le cas dans le passé, de traiter une mort au sein du home de manière aussi discrète que possible, voire à la sauvette. « On sort par la grande porte », dit-elle, décrivant comment a été institué un cérémonial particulier à la sortie du cercueil de la maison, en présence du personnel. Une réunion a lieu aussi avec les résidents, pour parler du disparu et de ce que son départ suscite chez chacun·e.
Les proches. Beaucoup d’attention leur est portée. Theres Meierhofer a noté que cela permettait à l’équipe de moduler/adapter les contacts avec les proches de manière plus fine, en fonction par exemple de difficultés éventuelles connues au sein de telle famille, ce qui est évidemment plus malaisé à réaliser en milieu urbain. Au lendemain d'un décès, on leur offre le petit-déjeuner - on est dans une communauté rurale, avec sa vie locale et ses caractéristiques, où tout le monde se connait. Après les différentes phases de la prise en charge, il y a une rencontre de l’équipe où est discutée cette question : «Tout au long du séjour de ce résident, et particulièrement à la fin de sa vie, avons-nous fait juste ? »
La formation de base et continue en soins palliatifs de tous les acteurs est fondamentale. Elle est inspirée par le principe « Accompagner dans la vie et dans la fin de vie est notre activité centrale » (Kerngeschäft – core business). Formation où il s’agit de débattre de l’attention à l’autre ; d’apprécier et de prendre en compte des valeurs, les siennes et celles des autres ; d’attitudes professionnelles et personnelles. La dimension spirituelle y tient une place. Des journées de formation ont été organisées aussi pour le Conseil de fondation du home, où a également été traitée la question de l’assistance au suicide.
Le chef d’orchestre. Enfin, à propos de travail interdisciplinaire et des relations avec les résidents : ce qui se passe autour et avec un patient ressemble à la vie d’un orchestre, avec de multiples intervenants, chacun jouant sa partition. A cet égard, l’oratrice dit que, dans la mesure du possible, c’est le patient lui-même qui devrait être le chef d’orchestre pour ce qui le concerne, les professionnels ayant pour but de lui permettre de l’être. Défi interpelant !
[1] Relevons que, à plusieurs reprises, elle a fait référence aux Recommandations de Bigorio émanant d’un groupe d’experts de Palliative.ch. En format pdf
Le 6 septembre 2017, la Haute école de travail social Fribourg (HETS-FR) a organisé le colloque national «Sexualité et transactions sexuelles entre jeunes en Suisse: représentations, pratiques, enjeux et perspectives d’actions».
La conférence inaugurale de la journée a eu pour thème : «Des intérêts à porter le regard sur le caractère négocié des relations sexuelles contemporaines». Le conférencier, Philippe Combessie, est professeur et directeur de l’Unité de recherche en sociologie, philosophie et anthropologie politiques à l’Université Paris Nanterre. Cette conférence est disponible en ligne
La journée a permis de présenter la recherche «Sexe, relations… et toi ?» qui met en lumière le point de vue des jeunes sur leurs expériences sexuelles. Recherche menée par Annamaria Colombo, professeure ; Myrian Carbajal, professeure ; Marlene Carvalhosa Barbosa, collaboratrice scientifique ; Cédric Jacot, collaborateur scientifique ; Marc Tadorian, collaborateur scientifique.
La journée a été attentivement suivie par les quotidiens et les radios.
Le 6e Congrès du European Interprofessional Education & Network (EIPEN) s’est tenu du 6 au 8 septembre 2017, à l’Institut et Haute Ecole de la Santé La Source, à Lausanne. Il a eu pour thème la pratique de l’enseignement interprofessionnel dans le domaine social et la santé.
Une centaine de participants, venus des quatre coins du monde, se sont penchés sur la pratique et l’enseignement interprofessionnel dans la santé et le travail social. Les résultats des recherches et les observations sur le terrain montrent que le niveau et la qualité de la collaboration entre les différentes professions de la santé ont un impact indéniable sur la qualité des soins et la sécurité des patients. Une meilleure collaboration passe par des changements dans la conception et les représentations que chaque profession de la santé ou du social se fait des autres acteurs avec lesquels elle interagit.
Pour faire face aux défis socio-sanitaires d’aujourd’hui comme de demain, travailler la dimension interprofessionnelle sur le terrain ne suffit pas; elle doit être intégrée à la formation pour comprendre les activités et responsabilités des uns et des autres, et élaborer ensemble des plans d’interventions répondant aux besoins des patients. Ainsi pourront s’établir des synergies, émerger des réflexions et des pratiques dépassant la logique du niveau d’études ou les idées reçues. Les hautes écoles de santé et du travail social l’ont bien compris et ont renforcé leurs efforts dans ce sens-là.
Au terme de ces trois jours, l’EIPEN et ses partenaires sont très satisfaits des actions et des perspectives prometteuses que le Congrès a permis de dessiner.
Ces deux auteurs sont bien connus en Suisse romande. Bernard Crettaz, ancien conservateur au Musée d’ethnographie de Genève, a créé le concept de «Cafés mortels» où on échange informellement sur la mort. Il a animé une centaine de ces réunions et son idée a été reprise dans plusieurs pays. Jean-Pierre Fragnière, qui a enseigné la sociologie à l’Ecole d’études sociales et pédagogiques de Lausanne et à l’Université de Genève, a eu une intense activité d’éditeur depuis plus de trente ans. Les deux sont originaires du Valais, dans un milieu rural au cadre catholique strict.
A la retraite mais très actifs, ils écrivent sur la mort ; Crettaz enrichi par son expérience des Cafés mortels ; Fragnière notamment sur la base de son expérience personnelle de traitements anti-cancéreux et de transplantation qui lui a fait vivre une succession de périodes médicalement lourdes et de retours vers une santé relativement restaurée. C’est dire que, tout académique que soit leur parcours, les auteurs sont des explorateurs de la mort sur des plans très pratiques.
La société ancienne et la nouvelle. «Nous avons été élevés entre le catéchisme, le régent, voire le gendarme. Tout cela sous l’œil vigilant de la voisine occupée à assumer le contrôle social, l’efficace ancêtre de nos caméras modernes. On apprenait très tôt qui était habilité à définir les règles, à arbitrer les tensions et à trancher les conflits. […] La rapide fragilisation de ce système a ouvert des espaces béants au marché de la gestion des comportements et des prestations de soutien à la vie privée. Des cohortes de professionnels ont offert leurs services […] On observe une véritable marchandisation de la mort, sous de multiples formes. Parmi d’autres, les croque-morts en sont les éminents représentants. Ils ont pris la place des clergés.»
Deux types de cheminements sont évoqués. Crettaz se décrit comme vivant le vieillissement «par glissade», comme une descente de la pente sous le poids des ans: «Je me trouve très seul à l’heure où les faits me signifient que je suis vieux, lorsque des tremblements viennent gripper les gestes de la vie quotidienne, quand la sauce tache ma chemise, lorsque je me mets à jauger un appartement en fonction de l’accessibilité des toilettes.» Fragnière parle de lui et d’autres comme de survivants et décrit une «vie et mort en escalier», un «cache-cache avec la mort» avec des sursis. «Qui n’a pas un survivant dans son entourage ? Toutes ces personnes qui bénéficient de ces sursis se trouvent en situation d’apprentissage […] Chacun sait que dans l’escalier il existe la dernière marche.»
L'approche de la fin. «Sur les rivages de la fin, nous ressentons une forte invitation à desserrer les liens, à faire le vide, à laisser place aux interrogations. Nous devinons qu’il sera impossible d’échapper à l’hésitation et aux incertitudes.» La décision de s’en aller quand la vie devient trop lourde avec l’éventualité du suicide assisté est évoquée: «Pourtant, ils reviennent à la charge, tous ceux qui veulent nous inviter à souffrir en silence, à vivre notre déchéance jusqu’au bout. Ne pas succomber à la tentation de mettre fin au calvaire. Au nom de quel argument: il ne faut pas faire de peine à ceux qui restent.»
Pour chacun, ce livre apporte du grain à moudre, il fait se poser des questions, en particulier se demander si on ne devrait pas consacrer plus d’attention à la mort qui va venir. Cela est fait sans alarmisme/stridence ni «dirigisme», sur le mode du dialogue, fourmillant d’expériences et de sentiments personnels, intimes souvent. Un ouvrage proche de la vie pratique - et de la mort pratique, dans des pages relevant ce qu’il fau(drai)t préparer en vue de sa propre mort ou décrivant, parfois en détail, des démarches funéraires. Pour finir, cette parole de Sénèque:
Personne ne se soucie de bien vivre mais de vivre longtemps, alors que tous peuvent se donner le bonheur de bien vivre, aucun de vivre longtemps.
La seconde édition du Rapport social vaudois présente une vue d’ensemble de la situation socio-économique de la population cantonale, en portant une attention particulière sur la pauvreté et les populations vulnérables. Fondé sur l’observation de l’évolution de divers indicateurs au cours des dix dernières années, il mesure pour la première fois un taux de pauvreté à l’échelle du canton, ainsi que l’impact des aides sociales sur le revenu des ménages.
Ce rapport présente en détail les dispositifs de prévention et de lutte contre la pauvreté qui ont été mis en place. Dans les années à venir, le canton appuiera en priorité les mesures favorisant l’obtention d’une formation qualifiante, tels que les programmes FORJAD (jeunes adultes en difficultés) et FORMAD (adultes en difficulté), ainsi que l’insertion socio-professionnelle et l’accès au logement. Le rapport social permettra également au Conseil d’Etat de fonder son prochain programme de législature sur les problématiques émergentes comme les personnes de 50 ans et plus exclues du marché de l’emploi.
Sous le titre «La Suisse handicape. Nous montrons où et en quoi», Inclusion Handicap a tiré la sonnette d’alarme le 29 août 2017 à Genève. L’association a remis un rapport alternatif à celui établi par le Conseil fédéral en 2016 sur l’avancement de la mise en œuvre de la Convention relative aux droits des personnes handicapées. La palette des obstacles est large. Citons-en quatre parmi d'autres:
La mise en œuvre systématique de la Convention nécessite une stratégie concrète, élaborée par la Confédération et les cantons de concert avec les organisations de personnes handicapées. Or à ce jour, pour Inclusion Handicap, une telle stratégie n’existe pas, autre réalité traitée de manière complaisante et incomplète dans le Rapport étatique publié par la Confédération en été 2016.
«Des mesures sont requises dans tous les domaines de la vie», a affirmé Pascale Bruderer, conseillère aux Etats et présidente d’Inclusion Handicap. «La volonté politique requise fait défaut. De plus, il est indispensable de garantir la participation sociale des personnes handicapées», a précisé Christian Lohr, conseiller national et vice-président de Pro Infirmis.
Les autorités entendent-elles l’enfant lors de son placement en institution ou lors d’une procédure de renvoi du père ou de la mère étrangère? Si ces deux situations sont délicates pour l’enfant, qui sera séparé de sa mère, de son père ou des deux, elles mettent aussi les autorités à l’épreuve. Cette étude bilingue porte sur la pratique des cantons en matière d’audition des enfants dans le droit civil (placement en institution ou en famille d’accueil) et dans le droit des étrangers (renvoi d’un parent).
Placement. Il en ressort que, dans les cantons de Berne, de Neuchâtel et de Fribourg, les enfants sont en principe entendus à partir de l’âge de 6 ans par les autorités de protection de l’enfant et de l’adulte (APEA) avant un placement, en accord avec la jurisprudence du Tribunal fédéral. Quant aux enfants plus jeunes, ils participent à la procédure par l’entremise des services de protection. Des mesures sont cependant nécessaires pour mieux former les professionnel-le-s chargé-e-s de l’audition aux techniques d’interrogatoire adaptées aux enfants.
Renvoi d’un parent. En revanche, lors d’une procédure de renvoi d’un parent étranger, l’enfant est entendu dans un peu moins de la moitié des cantons. La majorité des offices de migration partent en effet du principe que l’intérêt de l’enfant est identique à celui du parent en passe d’être renvoyé. Un travail de sensibilisation et de formation aux droits de l’enfant se révèle donc indispensable pour les offices de migrations afin que l’enfant soit lui aussi considéré comme un sujet dans les procédures de renvoi.
Le Service dentaire scolaire du canton de Fribourg (SDS) s’est associé aux réalisateurs fribourgeois Samuel et Frédéric Guillaume, à la créatrice d’outils didactiques Anne Oberlin Perritaz et au chanteur Gaëtan pour développer un concept novateur dans le domaine de la prophylaxie.
Depuis la rentrée scolaire, un film, un kamishibai (théâtre de poche) et la chanson «Frotte tes quenottes» sont ainsi utilisés auprès des élèves de 4 à 8 ans. Les castors Tim et Léa représentent le fil rouge des différents supports et font passer sous une forme ludique des messages concernant en particulier l’hygiène dentaire, la santé des gencives, l’information sur le tartre, la salive et les bactéries et l’effet de certains aliments sur les dents. Les outils seront complétés ultérieurement pour intéresser un public cible plus âgé.
Cette boîte à outils est disponible dans les structures d’accueil et les écoles. Elle est aussi à disposition des dentistes privés, des parents et des enfants fribourgeois. Les communes qui se chargent elles-mêmes de la prophylaxie (Morat et environs) ont d’ores et déjà marqué un fort intérêt pour ces outils et des discussions sont en cours avec la Conférence suisse des cliniques dentaires scolaires pour une reprise du concept dans d’autres cantons.
La réalisation des outils a coûté 165 000 francs, majoritairement prise en charge par la Direction de la santé et des affaires sociales (DSAS). La Loterie Romande, la Société fribourgeoise des médecins dentistes (SSO-Fribourg), Promotion Santé Suisse, le club de service Kiwanis, section de Fribourg, l’entreprise Curaprox et la Confédération ont également soutenu le projet.
Note de la rédaction de REISO: Tant le film que la chanson sont très réussis et pleins de fantaisie. Sympa aussi que le canton de Fribourg envisage de mettre ce matériel à disposition d’autres cantons.
Henning Mankell, écrivain suédois connu pour ses romans policiers, est aussi un essayiste engagé, un auteur et directeur de théâtre. A 65 ans, en janvier 2014, on diagnostique chez lui un cancer métastatique qui l’emportera en octobre 2015. Alors il écrit, se promenant dans sa propre histoire et dans l’histoire du monde, décrivant notamment sa jeunesse modeste dans le nord de la Suède avec son père juge (sa mère les a quittés très tôt), évoquant aussi «la joie de vivre».
Déchets nucléaires. Mankell est un antinucléaire et son livre débute avec la recherche, en Finlande, d’un endroit où enfouir des déchets nucléaires pour cent mille ans au moins. «Nous savons que les civilisations ne font pas le ménage derrière elles. Mais aucune n’a jamais laissé des déchets mortellement dangereux durant des millénaires.» Tellement facile de prendre des risques avec la vie des autres.
L’annonce. «La femme médecin qui m’a fait l’annonce [d’un cancer sérieux et probablement incurable] a fait preuve d’art médical. Elle était bien préparée, s’exprimait clairement, a pris le temps de répondre à mes questions. Dans son cabinet, le temps n’existait plus - elle avait son temps pour moi, moi et personne d’autre. Tout s’était réduit à un point où il n’y avait plus d’avant ni d’après, rien que ce ‘maintenant’ indéfini.»
La maladie. «La vérité c’est que je rêve d’être l’heureuse exception. Que je réussirai à me débarrasser du cancer. Je sais cependant que ce n’est pas vrai. […] Je suis dans un labyrinthe qui n’a ni entrée ni sortie. Etre atteint d’une maladie grave, c’est être perdu à l’intérieur de son propre corps.»
Les amis. «Il m’est arrivé d’être surpris au cours de cette période. Des gens dont je pressentais qu’ils s’enfuiraient se sont révélés assez forts pour maintenir un contact fréquent tandis que d’autres, dont j’attendais davantage, ont disparu. Se sont fondus dans l’ombre du cancer. On n’a pas besoin de beaucoup d’amis. Mais ceux qu’on a, on doit pouvoir compter dessus.»
Les livres. «Quand j’ai réussi à me hisser hors du sable mouvant et à résister, mon principal outil a été les livres. Prendre un livre et m’y perdre a toujours été ma façon d’obtenir consolation ou, du moins, un peu de répit. […] Il me fallait une nouvelle fois décider à quoi j’allais consacrer ma vie. Cette courte vie bordée par deux éternités, deux grandes bouches d’ombre.»
Le monde. «Les hommes ont de tout temps commis des actions mauvaises. Je refuse cependant d’employer le mot ‘mal’. Je ne crois pas à l’existence du mal (...) La barbarie a toujours des traits humains, c’est ce qui la rend inhumaine.» Mankell a vécu entre la Suède et le Mozambique, où il dirigeait une troupe de théâtre au cours de deux décennies. Sur le fossé entre ici et là-bas: «Ceux qui vivent dans les marges extrêmes n’ont aucun choix. Se coucher dans la rue pour mourir n’est pas un choix. Nous avons tous les moyens nécessaires pour éradiquer la misère absolue et hisser l’ensemble des êtres humains [à un niveau de vie acceptable]. Nous choisissons de ne pas le faire. C’est un choix que je ne peux considérer autrement que criminel. Mais il n’existe pas de tribunal habilité à poursuivre…»
Un auteur humain et humaniste, un livre enrichissant.
La dignité humaine est-elle le concept pathétique utilisable à bien plaire pour dénoncer ce que notre subjectivité juge inacceptable, que l’on soit fervent opposant à l’avortement ou grand défenseur des droits des migrant-e-s? En d’autres mots, la notion de dignité humaine n’est-elle que la vitrine béatifiante que l’on offre à l’envi à nos convictions morales?
De fait, alors que c’est à la protection qu’il garantit aux plus vulnérables qu’on mesure la valeur qu’un Etat accorde à la dignité humaine, c’est justement là que la Suisse pèche. Encore et toujours.
Le cadre ainsi posé, l’auteur passe en revue les domaines dans lesquels le droit, en Suisse, au lieu d’empêcher et de pénaliser les atteintes à la dignité humaine des plus faibles, les encourage au contraire. Il évoque en particulier la situation des criminel·le·s de droit pénal, des bénéficiaires de l’aide sociale et des requérant·e·s d’asile débouté·e·s.
Ce texte est issu de la contribution orale d’Alex Sutter à la journée d’action «Wo Unrecht zu Recht wird/Quand l’injustice devient loi») à Zurich, le 18 mars 2017. Il a été publié en version longue (allemand) dans la Wochenzeitung (WOZ). Traduction et adaptation d’Isabelle Michaud, chargée de la version française de l'association humanrights.ch.
L’Institut universitaire de médecine sociale et préventive a réalisé cette enquête sur mandat du Département de la santé et des affaires sociales du canton de Vaud. Le Conseil d’Etat l’a adopté le 16 août 2017 (lire son rapport).
Quelques chiffres pour les EMS, dans lesquels les situations de violence sont plus fréquentes que dans les CMS:
Dans sa conclusion, «le Conseil d’Etat souhaite que les données collectées ainsi que les recommandations du rapport de l’IUMSP soient reprises par un groupe de travail conduit par le Service de la santé publique et qui associera des représentants de tous les acteurs concernés. Il aura pour tâche de construire un plan de mesures qui soit le plus largement accepté et qui ait les meilleures chances d’être traduit dans la pratique. La présentation de ces travaux est attendue pour la fin du premier semestre de l’année 2018.»
Deux Suisses sur trois se déclarent favorables à la légalisation du cannabis. Selon une enquête réalisée pour le Fachverband Sucht, le partenaire alémanique du Groupement romand d’études des addictions (GREA), toutes les régions linguistiques se prononcent pour une nouvelle approche.
Une majorité des Suisses sont favorables à un assouplissement de la loi actuelle sur le cannabis. Toutefois, ils émettent des conditions. Ils sont 66% à se prononcer en faveur d’une levée de l’interdiction du cannabis pour autant que sa consommation reste proscrite pour les jeunes de moins de 18 ans. Dans les mêmes proportions, une levée de l’interdiction est envisageable du moment que les personnes qui prennent le volant s’abstiennent de consommer.
Par ailleurs, 64% des personnes sondées estiment qu’une levée de l’interdiction va de pair avec la mise en place d’une règlementation comme c’est le cas pour les cigarettes (interdiction de fumer dans les lieux publics, par exemple). Elles sont 62% à subordonner la levée d’une interdiction d’une vente du cannabis dans les pharmacies, ou dans des magasins spécialisés, par du personnel formé.
Par région linguistique, c’est le Tessin qui est le plus fervent défenseur d’une levée de l’interdiction : entre 75% (conditionnée à l’inscription de mises en garde) et 88% (du moment que l’interdiction demeure pour les moins de 18 ans) des personnes sondées y sont favorables. En Suisse romande, ce taux se situe entre 42% et 56% selon les mêmes conditions.
Dans le débat actuel sur la règlementation du cannabis, ces chiffres sont un appel et un signal fort aux politiques et aux autorités publiques fédérales et cantonales.
L’enquête téléphonique GFS a été réalisée sur mandat du Fachverband Sucht entre le 11 juillet et le 5 août 2017 auprès de 1’200 personnes âgées de plus de 18 ans. Source : GREA
Vente et consommation de cannabis, Dr Andrea Umbricht (dir.), GFS, Zurich, août 2017, 15 pages, en allemand
La campagne « Entendez-vous la vie ? » de Pro Senectute se poursuit. Un spot TV et des offres d’information et de cours invitent les personnes âgées atteintes d’une perte auditive à agir suffisamment tôt.
Pour les personnes âgées, avoir une bonne ouïe est primordial pour rester mobiles et participer à la vie sociale. Une étude du centre de compétence interdisciplinaire sur la vieillesse de la Haute école des sciences appliquées de Saint-Gall commandée par Pro Senectute révèle que près de la moitié des seniors atteints d’une perte auditive ne la traitent pas. Seule une petite partie porte régulièrement un appareil auditif. L’analyse montre également qu’il s’écoule en moyenne entre sept et dix ans entre les premiers soupçons et le traitement. Or, plus l’on repousse la prise en charge, plus il est difficile de trouver l’appareil auditif qui convient et de l’adapter correctement. Plus le temps passe, plus le cerveau oublie le sens des signaux acoustiques ; il ne parvient alors plus à interpréter les bruits.
Les partenaires de la campagne sont Neuroth, la Haute école des sciences appliquées de Saint- Gall ainsi que forom écoute.
L’aide sociale constitue le dernier filet du système de protection sociale suisse. Il existe en Suisse de nombreuses autres prestations sociales sous condition de ressources qui interviennent en amont de l’aide sociale et en réduisent les charges. De grandes différences sont toutefois observées entre les cantons en ce qui concerne le nombre et le type de ces prestations sociales.
Cette publication présente les prestations des cantons dans leur diversité, mais aussi dans leurs points communs ainsi que l’évolution de la législation ces dernières années. Elle comprend également le calcul des dépenses et des taux de bénéficiaires de l’aide sociale au sens large, tout comme les différences entre cantons en la matière et l’évolution des statistiques ces dernières années.
Pour mémoire, les catégories de prestation de l’aide sociale au sens large : aide sociale au sens strict, aides à la famille, aides aux personnes âgées et aux personnes invalides, aides au logement, aides aux chômeurs, avances sur pensions alimentaires, prestations complémentaires de l’AVS et l’AI.
ndlr: une synthèse remarquable
Ce film rassemble de nombreux témoignages qui sensibilisent aussi bien les proches aidants que les bénévoles ou les professionnel-le-s qui les accompagnent, à l’importance de prendre soin de soi et de solliciter à temps les soutiens spécifiques dont chacun-e a besoin. Il présente également des outils destinés aux proches aidants afin de mieux gérer leurs défis quotidiens personnels, rassemblés sur trois axes :
Car accompagner une personne vivant à domicile avec des troubles importants de la mémoire ou une démence est effectivement un défi. Les proches aidant·e·s qui s’engagent dans cet accompagnement font preuve d’une solidarité précieuse pour toute notre société. Mais beaucoup d’entre eux sont stressés, au point qu’à un moment ou à un autre ils s’approchent de l’épuisement. En apprenant à mieux gérer les situations difficiles du quotidien, il est possible de réduire le stress et de retrouver plus de confiance et de plaisir à accompagner une personne chère fragilisée par une démence.
Ce film d’information de 25 minutes a été réalisé dans le cadre du projet «Un programme psycho-éducatif pour soutenir les proches aidants de personnes âgées atteintes de démence vivant à domicile», mené par Sandrine Pihet, professeure à la HEdS-FR, soutenu par la Fondation Leenaards. Il présente les groupes de soutien pour les proches aidants organisés à Fribourg.
Cette somme substantielle décrit l’histoire riche et parfois mouvementée, en Suisse romande et avec des références internationales, des mouvements d’accompagnement et de soutien aux patients psychiques, dans un sens d’empowerment.
«Les associations dérangent... et c’est indispensable! Il leur appartient de mettre le doigt sur les failles et incohérences des systèmes médicaux et sociaux, de dénoncer les pratiques inacceptables. Mais elles devraient aussi permettre de rêver l’avenir», dit la juriste Béatrice Despland dans sa préface. Jeune médecin cantonal lors de la création du GRAAP, je peux confirmer qu’il a parfois dérangé… Nous avons eu des échanges vifs, notamment à propos de contention en psychiatrie (voir p. 108-113). Mais, avec l’autorité sanitaire au service de laquelle j’étais et avec les cadres psychiatriques, nous avons reconnu le caractère constructif et la volonté de partenariat des initiatives de l’association, y compris des actions «surprenantes» telles que l’ouverture d’un P’tit Magasin offrant des produits d’épicerie sur le site de l’Hôpital de Cery.
L’ouvrage s’ouvre sur le rappel de la mouvance anti-psychiatrique des années 1970, y compris la contestation vive, surtout à Genève, des électrochocs. Elle avait mené à la cessation de la pratique dans ce canton. A noter que, en 2017, cette méthode connaît une certaine réhabilitation.
La vaudoise Madeleine Pont, co-fondatrice du GRAAP, a été une force majeure dans ces développements. Travaillant dans les années 1970 pour Pro Mente Sana, elle a très tôt «le sentiment que les assistants sociaux ne touchent pas leur cible par le seul travail individuel avec les clients. Elle est convaincue qu’il faut responsabiliser les personnes concernées et qu’en groupe elles pourront résoudre elles-mêmes leurs difficultés.» Elle était pionnière mais cette vision s’est concrétisée.
Après vingt ans d’activités, le GRAAP a connu une période difficile, liée à un fonctionnement très (trop ?) démocratique compliquant beaucoup la gestion d’une association qui avait beaucoup grandi. C’est à ce moment-là, dit Madeleine Pont, que «j’entends parler de la sociocratie, méthode de gouvernance participative très précise. Et avoir le pouvoir sur… c’est être au service de.» Belle et juste formule ! Les problèmes ont pu être surmontés par la création d’une fondation aux côtés de l’association. «Cela ne s’est pas fait sans drames, départs et licenciements mais cette transformation était indispensable.»
Une section est consacrée à la place et aux rôles des proches des patients, considérés d’abord comme des «coupable» puis comme partenaires. Il est vrai qu’existait une certaine méfiance à leur égard. Témoignage : «Il y avait énormément de culpabilisation des familles dans les années 1980. Quand notre fille avait moins de 18 ans, oui, on était informé. Mais dès qu’elle a été majeure, ça a été fini.» Ces questions sont actuelles aujourd’hui encore avec les débats sur l’autonomie du patient, le secret médical et les intérêts compréhensibles des proches. Les associations d’action pour la santé psychique ont élaboré une Charte des proches, fruit des réflexions menées au cours d’ateliers citoyens et publiée en 2013, qui a représenté un pas important.
Dans les conclusions, lisez la contribution de Shirin Hatam, juriste à Pro Mente Sana, sur le nouveau droit de la protection de l’adulte entré en vigueur en 2013. Elle apporte des précisions importantes sur les apports de ce nouveau droit, ne ménageant pas certaines critiques, y compris son caractère pas assez nuancé, voire régressif, et interprété de manières diverses selon les cantons.
«Pour les associations de défense des droits [en matière de santé mentale], il est urgent qu’un changement profond s’opère, pour que d’autres compétences que les aptitudes professionnelles soient valorisées.» Est discutée la question du travail et l’importance qu’on lui accorde: «Peut-on pleinement exister, être épanoui, sans travail salarié?» La réponse des auteurs est clairement oui. Beaucoup de ce que les personnes font jour après jour, y compris le travail sur soi et sa maladie, est un vrai travail.
Dans les dernières pages, un point majeur : «Dans une société partagée entre les principes de la liberté individuelle et ceux du risque zéro, nos organisations doivent être en faveur d’une politique du risque mesuré en offrant de larges places à la créativité et à la co-construction. La focalisation actuelle sur le risque zéro se répercute gravement [négativement] sur les justiciables.»
En résumé: une lecture recommandée pour la présentation diversifiée de ces démarches pionnières et militantes de grande valeur, sur les plans médico-social et sociétal, depuis quelques décennies en Suisse romande.
L’ouvrage a été publié à l’occasion des 30 ans du Groupe d’accueil et d’action psychiatrique (GRAAP) vaudois, conjointement avec ses homologues fribourgeois et neuchâtelois. Présentation sur REISO
La loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes (LEg) est en vigueur depuis le 1er juillet 1996. Vingt ans plus tard, cette étude de jurisprudence montre que les inégalités demeurent flagrantes. L’étude a analysé de façon approfondie 190 procès-verbaux de conciliation et jugements cantonaux relatifs à la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes (LEg) sur une période d’un peu plus de dix ans (2004-2015).
Les chiffres clés et les faits principaux sur l'Aide et soins à domicile à but non lucratif (organisations d'aide et de soins à domicile d'utilité publique et de droit public) en Suisse:
Sources: Statistique de l’aide et des soins à domicile 2014, OFS; pool de données, Santésuisse; estimations de l’Association suisse des services d’aide et de soins à domicile
Site internet
La première édition de cette brochure de Pro Mente Sana association romande a été distribuée à plus de 8000 exemplaires. La voici dans une version actualisée.
Alors que de nombreuses personnes suivent un traitement à base de psychotropes, il existe peu d’informations indépendantes et accessibles sur les différents groupes de médicaments psychotropes et leurs effets. Cette brochure de Pro Mente Sana, actualisée par le Dr Logos Curtis et le Pr Jean-Michel Aubry des HUG, comble avantageusement cette lacune.
Quels sont les groupes de médicaments psychotropes et comment agissent-ils? Que faire en cas d’effets indésirables? Comment devenir responsable de sa médication, ou de son arrêt, sans mettre sa santé en danger? Existe-t-il d’autres méthodes de traitement? Le fascicule décrit également le partenariat jugé indispensable entre personnes concernées et médecins pour parler de la médication.
Cette publication s’adresse tant aux personnes qui prennent des médicaments psychotropes qu’à celles qui souhaitent se renseigner. Elle sera profitable aux proches et à toute personne ne disposant pas d'une formation médicale qui désirent avoir un aperçu des traitements psychotropes.
Un exemplaire de la brochure peut être commandé gratuitement auprès du secrétariat 0840 000 060, (frais de port et d’emballage en sus en cas de commande en grand nombre)
Une étude avait montré en 2012 que les proches aidants de personnes handicapées n’ont souvent qu’une perception très imparfaite des prestations qui leur sont destinées. Sous la pression de la surcharge ou dans des situations critiques surgit alors la nécessité de s’informer pour trouver un soutien ou une solution. La volonté d’améliorer la visibilité de l’offre de prestations par une plateforme d’information est à l’origine du projet ProcheConnect.
Lancé en 2015 par Pro Infirmis Vaud, ce projet pilote a été évalué après une année, avec l’appui méthodologique de Katia Horber-Papazian, professeure à l’IDHEAP, Université de Lausanne. Les résultats principaux:
Flyer de résumé (plutôt destiné aux participant·e·s) en format pdf. Rapport intégral de l’évaluation disponible sur demande au 058 775 34 59 ou
Soutenir le développement des pratiques collaboratives et de l’éducation interprofessionnelle dans le domaine de la santé est primordial. Ce livre est destiné aux cadres et aux formateurs dans la mise en place ou le soutien d’activités pédagogiques de ce type.
Le but de cet ouvrage est de favoriser un développement harmonieux d’activités interprofessionnelles, dans les milieux de formation comme dans les milieux de soins. Pour atteindre cet objectif, les auteurs proposent un modèle à utiliser comme un guide, baptisé « modèle interprofessionnel de Lausanne ». Son utilité est de structurer un environnement complexe pour en faire un ensemble cohérent, grâce auquel il est facile de percevoir les éléments constitutifs et leurs relations. Avec des pistes, des solutions et des idées nouvelles.
Préfaces de Pierre-Yves Maillard, Conseiller d'état, Chef du Département de la santé et de l'action sociale du Canton de Vaud, et de Daniel Scheidegger, Président de l'Académie Suisse des Sciences Médicales.
L’autonomie du patient en fin de vie est un thème brûlant d’actualité. Il y a plus de quarante ans, ce sujet était tabou mais un auteur l’avait abordé avec une sensibilité et une pertinence rares : Romain Gary (sous le pseudonyme d’Emile Ajar) dans «La vie devant soi». Dans ce roman, le tout jeune Momo vit avec Rosa, vieille dame juive, prostituée retraitée à qui il a été confié par sa mère, elle-même prostituée. Très âgée et en mauvaise santé, la mère adoptive et le garçon abordent la fin de vie et l’euthanasie avec beaucoup d’humour et des formules qui font mouche. Relecture:
Momo. «Madame Rosa ne sortait presque pas. Elle n’avait plus assez de jambes et de cœur et son souffle n’aurait pas suffi à une personne le quart de la sienne [elle est très grosse]. Elle ne voulait pas entendre parler de l’hôpital où ils vous font mourir jusqu’au bout, au lieu de vous faire une piqûre. Elle disait qu’en France on était contre la mort douce et qu’on vous forçait à vivre tant que vous étiez encore capable d’en baver. Elle avait une peur bleue de la torture et disait toujours que, lorsqu’elle en aura assez, elle se fera ‘avorter’ [il veut donc dire ‘euthanasier’].»
«Les vieux ont la même valeur que tout le monde, même s’ils diminuent. Ils sentent comme vous et moi et même ça les fait souffrir encore plus. Mais ils sont attaqués par la nature, qui peut être une belle salope et les fait crever à petit feu. Chez nous, c’est encore plus vache que dans la nature, car il est interdit d’‘avorter’ les vieux quand la nature les étouffe lentement. […] C’était déjà terrible de voir Madame Rosa mourir peu à peu mais, quand elle n’a plus rien d’humain, c’est quelque chose qui exige des lois pour mettre fin à ses souffrances.»
«Tout le monde savait dans le quartier qu’il n’était pas possible de se faire ‘avorter’ à l’hôpital même quand on était à la torture, et qu’ils étaient capables de vous faire vivre de force, tant que vous étiez encore de la viande et qu’on pouvait planter une aiguille dedans. La médecine doit avoir le dernier mot et lutter jusqu'au bout pour empêcher que la volonté de Dieu soit faite.»
Madame Rosa. «Ils vont me faire vivre de force, c’est ce qu’ils font toujours, Momo. Ils ont des lois pour ça. C’est des vraies lois de Nuremberg. […] Je ne veux pas vivre plus que nécessaire. Ils vont me faire subir des sévices pour m’empêcher de mourir, ils ont un truc qui s’appelle l’Ordre des médecins qui est exprès pour ça. Ils vous en font baver jusqu’au bout et ils ne veulent pas vous donner le droit de mourir, parce que ça fait des privilégiés. J’avais un ami qui n’avait ni bras ni jambes, à cause d’un accident, et qu’ils ont fait souffrir encore dix ans pour étudier sa circulation. Je ne veux pas vivre uniquement parce que c’est la médecine qui l’exige, vivre des années dans le coma pour faire honneur à la médecine. J’ai donné mon corps à mes clients pendant trente-cinq ans, je ne vais pas maintenant le donner aux médecins. »
Momo. «Je comprendrai jamais pourquoi l’avortement [dans le sens d'euthanasie et d'avortement] c’est seulement autorisé pour les jeunes et pas pour les vieux. Je trouve que ce type en Amérique qui a battu le record du monde comme légume, durant dix-sept ans, c’est encore pire que Jésus - parce que ça dure longtemps. C’est dégueulasse d’enfoncer la vie de force dans la gorge des gens qui ne peuvent pas se défendre et qui ne veulent plus servir.»
Intéressant de se demander, quarante ans après, par quel cheminement le jury du Goncourt a décidé de distinguer cette œuvre. A-t-il pensé important d’ouvrir le débat sur ce sujet très tabou à l’époque ? Voulait-il montrer qu’il pouvait choisir un ouvrage iconoclaste et écrit dans un style peu académique ? Le roman avait-il simplement amusé les jurés ? Dans tous les cas, une lecture ou une relecture est distrayante et tonique, mettant en scène le quartier multiculturel de Belleville à Paris.
Le guide en ligne du Service de lutte contre le racisme de la Confédération présente un aperçu clair des procédures envisageables en cas de discrimination raciale. Il reprend le contenu de la version pdf datant de 2009, actualisée et désormais en ligne. Grâce aux onglets en tête de page et aux rubriques sur la colonne de gauche, il devient aisé de trouver les clarifications souhaitées. Le guide explique les différentes possibilités légales, ainsi que les mécanismes de règlement de litiges extra-judiciaires appropriés. Il détaille le cadre juridique propre à quinze domaines de la vie, tels que le monde du travail, les relations avec le voisinage ou avec les autorités, la naturalisation, le service militaire ou le secteur des assurances.
Le guide papier du centre de conseil fribourgeois «Se respecter» est destiné aux intervenant·e·s sociaux et sanitaires qui rencontrent des victimes de racisme et connaissent mal le domaine. Général et synoptique, il contient notamment une liste de questions que les conseillers doivent absolument poser lors d’une consultation. Ce guide est complété par des repères juridiques en ligne avec les bases législatives principales ainsi que toutes les décisions positives publiées par les tribunaux qui protègent contre la discrimination raciale. La jurisprudence est résumée et répertoriée en dix domaines de la vie courante.
Source : Plateforme d’information Humanrights.ch
Pour son Assemblée des délégués de juin 2017, Curaviva, association des homes et institutions sociales suisses, a invité le philosophe et publiciste alémanique Ludwig Hasler à délivrer un « keynote speech », qu’il a intitulé « CURA c’est bien, VIVA c’est mieux ». Nous vivons une époque formidable a-t-il dit, avec tout le potentiel technologique. Mais quelles seront demain les places respectives des hommes et des machines, quand nous aurons l’aide de robots « qui ne feront pas d’erreurs, ne seront jamais fatigués, jamais ivres, jamais amoureux », et où il n’y aura plus d’accidents de la circulation parce que plus de chauffeurs humains…
Quel est le sens de l’âge dans une société devenue sans repères sur le plan métaphysique? Je suis issu, a dit Hasler, d’une famille de six enfants ; après avoir accompagné notre maman et l’avoir vue s’affaiblir pour s’éteindre démente à 93 ans, notre appétit de vivre le plus longtemps possible a diminué. On sait que Google et les autres s’intéressent au transhumanisme, en direction de l’immortalité. Mais en attendant, l’assistance au suicide est de plus en plus acceptée et sollicitée. Dans un autre registre, nous devenons les comptables de notre état de santé. La prévention et la promotion de la santé sont évidemment de bonnes choses, mais soyons attentifs à de possibles dérives hygiénistes.
Comme d’autres, l’orateur insiste : il s’agit de faire des patients, en particulier chroniques, des acteurs de leur propre santé. Schopenhauer : « Il n’y a pas de bonheur qui ne découle de l’utilisation de ses propres forces.» Métaphore théâtrale : « Tout le monde monte en scène, personne ne reste dans les coulisses». Le but (une évidence !) est de rendre ce qui reste à vivre digne d’être vécu. Pour cela, il importe de vouloir que, à chaque moment, les personnes âgées soient des sujets aussi autonomes que possible malgré leurs limites fonctionnelles. Ne plus accepter leur « mise sous tutelle » dans la vie du home. Dans ce sens, les soignants/intervenants ont pour vocation d’être des animateurs, des revitalisateurs. Et il faut que le monde entre dans les institutions, l’air doit circuler et favoriser les interactions avec l’extérieur, avec des enfants, des animaux…
Un aspect très pratique est celui des risques que, avec le patient, on accepte de prendre dans la vie quotidienne. Une existence ultra-sécurisée inhibe, enferme, rend toujours plus dépendant. Les personnes ont le droit de prendre des risques, y compris de chute : cela leur laisse un libre arbitre. Se rappeler aussi les études qui montrent que le sourire et les échanges cordiaux ont, hors et dans les institutions, un rôle promoteur de santé ; tout comme l’humour et l’auto-dérision. « Il est essentiel de changer de paradigme », dit Hasler, injonction aujourd’hui fréquente. Une dimension de ce changement réside dans l’ « empowerment » du patient, son implication dans les réflexions et décisions, y compris sur le plan médical et des soins.
Question : Cela est fort bien dit par un orateur charismatique, mais est-ce réaliste ? Les services de santé et nos institutions ont-ils les ressources humaines ou matérielles et la volonté de mettre en musique tous ces bons conseils ? Les contraintes seront toujours présentes, cas échéant de plus en plus fermes. Pas sûr que les financeurs et politiques, eux qui pourtant ont des vies très pleines, soient très sensibles à la nécessité de mettre de la joie de vivre, quitte à prendre certains risques, dans la vie des seniors dépendants. Pas sûr que tous les soignants (au sens large) soient convaincus qu’il est bon de maximiser la possibilité pour les résidents de donner leur avis et de co-décider. Cela demande du temps, un temps précieux. Dans tous les cas, il est toujours stimulant de bénéficier d’avis extérieurs, y compris profanes, de courants d’air, par des gens qui pensent « hors du cadre », donnant des impulsions pour adapter les pratiques aux besoins.
Revenant aux robots : que restera-t-il à faire de substantiel quand tant de tâches seront accomplies par des machines ? Il restera à vivre, pleinement. Et le conférencier de faire référence à «Intouchables» (2011), le film français le plus vu hors de France, montrant un aidant africain sans formation autre que sa « compétence vitale », formant équipe avec un riche tétraplégique et donnant à tous les deux de multiples « occasions de vivre ». Il faudrait donc, conclut Hasler, des soignants et accompagnants qui soient des « spécialistes de la vie et de l’humain». Ce que beaucoup sont heureusement déjà.