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Dans l'article paru dans la revue Social Change in Switzerland en mars 2019, Laura Ravazzini, Ursina Kuhn et Christian Suter montrent que l'homogamie des couples a augmenté en Suisse depuis les années 1990 au niveau de la formation et du revenu.
Ils constatent que les hommes avec un revenu élevé sont plus souvent en couple avec des femmes ayant également un revenu élevé, et que les personnes avec un revenu faible se trouvent plus souvent entre elles. Au niveau de l’éducation, ce sont particulièrement les personnes ayant un faible niveau de formation qui ont plus tendance à se mettre en couple entre elles qu'il y a vingt ans.
La nouvelle étude montre l'évolution du niveau de formation et des revenus des ménages de couples hétérosexuels en Suisse. Entre 1992 et 2014, la proportion de couples dans lesquels les deux ont un diplôme universitaire est passée de 3 à 13 % par rapport à l’ensemble des ménages. Au cours de la même période, la proportion de couples homogames ayant terminé une formation du niveau secondaire II est tombée de 36 à 27%. La proportion de couples dont les deux n’ont terminé que l'école obligatoire est restée stable à 8 %. Comme il s'agit d'un groupe de population en décroissance, cette stabilité témoigne d'un choix de partenaire de plus en plus sélectif.
La proportion de ménages dans lesquels les hommes ont un niveau d`éducation supérieur à celui des femmes est tombée de 28 % en 1992 à 20 % en 2014. Dans le même temps, les couples dont les femmes ont un niveau d’éducation plus élevé que leurs partenaires représentent aujourd’hui 12 % de tous les ménages, contre 7 % en 1992. La proportion des hommes et des femmes habitant seuls est restée constante à environ un cinquième de tous les ménages (parmi les 25-64 ans). Si les hommes et les femmes titulaires d'un diplôme universitaire vivent plus souvent seuls que les personnes ayant un niveau d’éducation inférieur, cet écart était encore plus prononcé en 1992 qu'en 2014.
Finalement, l'équipe de recherche montre avec les données du Panel suisse de ménages que l'homogamie a augmenté en termes de revenus. Ainsi, tant pour les personnes à faible revenu que pour les personnes à revenu élevé, la probabilité que leur partenaire gagne un revenu aussi bas ou aussi élevé s'est accrue. Cette forte homogamie par revenu indique que le statut social reste un critère important pour le choix d'un partenaire en Suisse.
Source : Social Change in Switzerland
Commentaire et documentation par Jean Martin
Les enjeux du dérèglement climatique sont tels qu’on reste perplexe, interloqué. Bertrand Kiefer tout récemment dans la Revue médicale suisse: « En 2019, le climat, la finance folle et la croissance des inégalités feront un peu parler d’eux. Bien loin cependant de leur réel impact (…) Dans ces débats, les universitaires et spécialistes de l’éclairage sociétal se sentent la responsabilité de mettre des nuances. Mais ces nuances composent une pièce de théâtre pour enfants, déroulant une histoire bisounoursée. » (1) Il pointe un problème majeur et pas assez discuté ; l’expérience des commissions d’éthique m’a souvent laissé songeur devant l’extrême attention portée à tous les détails imaginables d’une question posée, sans en aucune manière se pencher sur les enjeux généraux. Parce que ce serait trop « gros », trop multifactoriel, pas de notre ressort ni dans nos compétences !
Le philosophe suisse Mark Hunyadi plaide avec force pour que l’on passe de l’éthique usuelle pointilliste, où « c’est comme si nous luttions pour la liberté de choisir la couleur des briques de notre propre prison », à une Grande éthique voyant large et loin (2). Sa position n’a certainement pas eu jusqu’ici les échos qu’elle mérite ; parce que, bien sûr, c’est beaucoup - infiniment ? - plus compliqué de changer de modèle général de société.
Or, c’est un tel changement qu’implique la mobilisation des marcheurs pour le climat. Les mieux disposés – je pense à des amis politiques de haut niveau et autres notables – vous écoutent, consentent qu’il y a un problème, mais le saut logique qui consisterait à mettre en cause le « système » reste simplement inimaginable. Avec, entre autres, l’excuse classique du « On ne peut pas être sage tout seul ». Il le faudra bien pourtant, une fois.
Les médecins, les soignants et les intervenants du domaine social sont évidemment concernés, au vu des impacts délétères du dérèglement climatique, pour les personnes individuelles et leur bien-être comme pour la santé publique – la mise au point la plus affûtée étant le « Compte à rebours » de Lancet, une des meilleures revues médicales du monde, régulièrement mis à jour (3). Un exemple : c’est sur la base de données scientifiques que les « Aînées pour la protection du climat » ont entrepris une action en justice contre le Gouvernement fédéral, au motif que les femmes de plus de 70 ans sont plus touchées par les effets du réchauffement que d’autres groupes.
A souligner le fait que les étudiants et leurs institutions s’engagent vivement pour cette cause. Dans une quinzaine de Hautes Ecoles de Suisse se déroulent du 4 au 9 mars les multiples activités de la Semaine de la Durabilité (Sustainability Week Switzerland), dont le lancement pour l’Unil et l’EPFL a eu lieu le 28 février à Dorigny.
A noter aussi, lors de l’interview d’António Guterres par Darius Rochebin dans «Pardonnez-moi» du dimanche 3 mars 2019, le secrétaire général de l’ONU a affirmé au cours de la conversation et sans que le journaliste le questionne sur le climat : «Nous sommes en train de perdre la bataille du changement climatique.»
En mai 2017, Sophie Le Garrec subit une opération du cœur avec quelques complications post-opératoires qui prolongeront son hospitalisation de plusieurs semaines. La chirurgie cardiaque est devenue banale et routinière, mais le cœur reste encore associé à un organe majeur et son dysfonctionnement à une gravité patente tant pour le malade que pour son entourage.
C’est la narration de son parcours intra et extra-hospitalier durant une année que l’auteure a consignée à partir de nombreuses notes prises au vol des événements, tant médicaux que personnels.
Sociologue depuis plus de vingt ans, qui plus est, dans le champ de la santé, cette expérience de vie n’a cessé de faire écho à sa pratique professionnelle. C’est donc un ouvrage hybride liant ces deux facettes qui la constituent, patiente et sociologue.
Des coulisses d’une clinique considérée comme « haut de gamme » aux critiques quant à son fonctionnement, des réflexions sur les représentations sociales des maladies et des malades aux paradoxes organisationnels des soins, de la déshumanisation de certains actes à la déstructuration du bien travailler, chaque chapitre vise à comprendre, dénoncer ou questionner certains aspects actuels du monde médical, du fonctionnement des hôpitaux (ou cliniques) et des rapports aux malad(i)es.
Sophie Le Garrec est sociologue à l’Université de Fribourg. Elle s’intéresse depuis le début de sa carrière universitaire aux problématiques de santé.
Ce mois de février 2019 a paru un gros numéro de «Handicap & politique», la revue trimestrielle de AGILE.CH. En point de mire : «Les personnes en situation de handicap en voie de paupérisation».
«L’assurance-invalidité: facteur de risque de pauvreté ? «Plus de 250 000 personnes sont au bénéfice d’une rente AI. En 2017, le niveau moyen de la rente est de 1433 francs pour les femmes et de 1498 francs pour les hommes. En regard du minimum vital, plus de 114 000 personnes reçoivent une prestation complémentaire, soit 46,7% des rentiers (36% en 2008). L’évolution dans le temps est forte et exprime la péjoration du revenu des rentiers AI. »
«Au-delà du taux global de bénéficiaires AI, des différences très marquées caractérisent les différentes catégories d’âge. Les rentiers âgés de 22 à 33 ans environ, sont plus de 70% à bénéficier de PC, 60% entre 34-35 et 40 ans. Les conséquences à long terme sont préoccupantes. L’évolution de ces situations confirme que le niveau des rentes AI est insuffisant et qu’il génère de la précarité. »
«En observant l’emploi rémunéré, une différence apparaît: chaque année, les hommes avec handicap reçoivent de l’AI environ 300 millions de francs de plus que les femmes dans la même situation pour des me- sures d’insertion professionnelle. Selon l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS), les raisons de cet écart frappant entre les sexes sont principalement structurel- les. Le marché suisse du travail dans son ensemble, ainsi que de nombreux secteurs économiques sont encore très genrés, avec des différences correspondantes en termes de salaires et de perspectives de carrière.»
Le Gouvernement jurassien a publié son premier «Rapport social». Il pose les jalons et définit les indicateurs pertinents choisis pour lutter efficacement contre la pauvreté.
La pauvreté est un phénomène complexe et multidimensionnel qui dépasse largement la simple question du pouvoir d’achat au sens économique ou de l’efficacité des prestations sociales. C’est pour cette raison que le Gouvernement jurassien a retenu une approche qui sort du cadre strictement financier. Les dimensions retenues sont larges : conditions de vie matérielle, activité productive, santé, éducation et formation, loisirs et interactions sociales, sécurité, gouvernance et droits fondamentaux, environnement naturel ou encore qualité de vie.
S’il est ambitieux dans son approche, le rapport ne prétend toutefois pas être exhaustif dans sa première version. Un certain nombre d’indicateurs sont en effet manquants, insuffisamment détaillés ou alors ne permettent pas des comparaisons intercantonales. Les prochaines années permettront d’estimer les ressources nécessaires pour évaluer les mesures déjà appliquées et préciser celles à instaurer.
Quelques chiffres
La thématique de la pauvreté gagne progressivement en importance politique. La création de la plateforme nationale «Contre-la-pauvreté», issue des travaux conjoints de la Confédération, des cantons, des villes et de partenaires privés, en est un des nombreux reflets. La contribution du canton du Jura à ces travaux ne date pas de ce jour mais la mise en place d’instruments de pilotage et de mesure performants va permettre d’en améliorer le dispositif.
Le Rapport en format pdf, 44 pages
En suivant les trajectoires de déprise dans les centres de soin, d'accompagnement et de prévention en addictologie et dans les groupes d'entraide (Vie Libre et Narcotiques Anonymes), cette recherche permet d'appréhender la sortie des addictions aux produits psychoactifs. Elle propose une analyse des enjeux autour de la définition de l'addiction elle-même et la manière d'en sortir. Peut-on guérir d'une addiction ou doit-on apprendre à vivre avec ? L'auteure entend ainsi saisir ce qui se joue entre savoirs professionnels et savoirs expérientiels dans la construction morale et sociale d'une trajectoire de déprise.
Line Pedersen est docteure en sociologie de l'Université de Franche-Comté. Elle signe son premier ouvrage issu de son travail de thèse sur la sortie des addictions. Elle enseigne actuellement à l'Université de Fribourg, Chaire de travail social et politiques sociales. Elle poursuit ses recherches sur les enjeux de savoir et de pouvoir dans le domaine des politiques de santé publique des addictions, avec une attention particulière sur les rapports entre savoir savant et savoir expérientiel.
Réalisé par la Conférence romande des Bureaux de l’égalité et mené sous l’égide du Bureau de l'égalité entre les femmes et les hommes du canton de Vaud, le nouveau matériel pédagogique «L’école de l'égalité» a pour objectif d’encourager la prise en compte de l’égalité dans la formation.
Déclinée en quatre brochures s’adressant à l’ensemble de la scolarité obligatoire, «L’école de l’égalité» propose de nombreuses activités en lien avec le Plan d’études romand et les disciplines scolaires. Ce matériel pédagogique permet d’intégrer des dimensions en lien avec l’égalité entre les sexes dans les contenus abordés en classe. Ce support vise à accompagner une dynamique d’ouverture sur les questions d’égalité entre les sexes en proposant au corps enseignant des outils facilement utilisables.
La nouvelle brochure du cycle 1 destinée aux élèves de 4 à 8 ans environ est disponible en ligne (9 Mo) ou en version papier auprès des Bureaux de l’égalité des cantons de Vaud et Fribourg.
Les brochures des cycles 2, 3 et 4 sont en cours d’élaboration et seront prochainement mises à disposition. Dans l’intervalle, le matériel édité en 2006 reste disponible sur egalite.ch.
Cheffe de projet de «L'école de l'égalité» : Seema Ney
Groupe de projet : Isabelle Collet (Université de Genève / IUFE), Muriel Guyaz (HEP Vaud), Nicole Jacquemet (HEP VS), France Laurent (BPEV de Genève), Françoise Pasche Gossin (HEP BEJUNE). Introduction, éclairage théorique et lexique : Caroline Dayer et Seema Ney
Les inégalités salariales entre femmes et hommes s’étaient légèrement réduites de 21,3% en 2012 à 19,5% en 2014 dans le privé. La tendance s’est inversée depuis lors puisque, en 2016, les inégalités remontent, certes très légèrement, à 19,6%. Parmi ces différences de salaire, 42,9% restent «inexpliquées», selon l’Office fédéral de la statistique (OFS). Quelques chiffres.
Working poors. Sur trois postes à plein temps rémunérés à moins de 4000 francs bruts par mois, près de deux étaient occupés par des femmes en 2016.
Plafond de verre. Dans le privé, le différentiel salarial entre les femmes et les hommes est d’autant plus grand que la fonction de cadre est élevée.
Secteur public. Dans l’ensemble du secteur public (Confédération, cantons et communes), l’écart salarial entre femmes et hommes se montait en moyenne à 16,7% en 2016 (2014: 16,6%). Ainsi, là aussi, la tendance s’est inversée.
Discrimination. La part inexpliquée des différences de salaire entre femmes et hommes observées dans le secteur privé a progressé à 42,9% en 2016, alors qu'elle n’atteignait que 39,1% en 2014 et 40,9% en 2012. Pour le secteur public, cette part représentait 34,8% en 2016 alors qu'elle atteignait 41,7% en 2014 et 38,8% en 2012.
En francs. Dans le privé, la part «inexpliquée» de l’écart salarial entre femmes et hommes représentait 657 francs par mois en moyenne en 2016, contre 585 francs en 2014.
Educateur spécialisé auprès d’adolescents en difficulté et formateur en entreprise, auteur suisse d’origine ivoirienne, Joël Konan publie trois manuels sur la migration, l’adolescence et la citoyenneté.
Nourri par son expérience auprès des adolescents, l’auteur produit schémas, questionnaires et une multitude d’outils personnalisables pour comprendre et analyser ce sujet de société sensible et profondément actuel.
Ces trois manuels de référence présentent de nouvelles investigations dans le développement de l’humain, les dialogues entre cultures et la transmission intergénérationnelle. Ils sont destinés à un large public : écoles ou centres de formation en travail social, étudiants, éducateurs, enseignants et chercheurs dans les sciences humaines et sociales.
Tome 1 - Utopie ou réalité migratoire
Tome 2 – Evolution de la personne : quels enjeux
Tome 3 – Citoyenneté chez nos ados
Nous pouvons tous prévoir et organiser la fin de vie. Malgré tout, la plupart des gens ne meurent pas là où ils le souhaiteraient. L'ouvrage «La fin de vie en Suisse. Perspectives individuelles et sociales» reflète les connaissances actuelles sur la mort en Suisse. Bilan: il faut renforcer les soins palliatifs tout en sachant que la fin de vie n’est planifiable et contrôlable que dans une certaine mesure.
Le comité de direction du PNR 67 «Fin de vie» avait publié il y a un an une synthèse des résultats des 33 projets de recherche du Programme (recension par Jean Martin dans REISO). Ce nouvel ouvrage interdisciplinaire approfondit certaines connaissances telles que le déroulement des décès, les décisions à prendre en fin de vie, les soins prodigués aux personnes en fin de vie, des aspects économiques, juridiques et des idéaux quant à la mort.
Quatre cinquièmes des personnes vivant en Suisse meurent à l'hôpital et en maison de retraite. Les besoins de ces personnes ne sont pas toujours pris en compte: de nombreux hôpitaux et EMS ne sont actuellement pas équipés pour accompagner des mourants ou s'en occuper de manière appropriée.
Les spécialistes des soins devraient mener une discussion ouverte et au moment propice avec les mourants et leurs proches, mais cela n'a pas toujours lieu. Les soins palliatifs ont le potentiel d'améliorer nettement cette situation; ils allient accompagnement et soins dans leur globalité: atténuation des souffrances, aide au maintien d'une qualité de vie la meilleure possible, prise en compte des besoins de nature sociale et spirituelle, intégration des proches ainsi qu'une bonne articulation entre les services existants.
La Suisse orientale fait figure de pionnière avec son expérience d'un système de soins palliatifs basé sur la communauté. Markus Zimmermann souligne néanmoins que malgré tous les soins et toutes les prévisions élaborés, le déroulement de la fin de vie demeure incertain et ne manque pas de soulever des questions imprévisibles. «Le dernier chapitre de la vie n'est planifiable que de manière partielle.»
Les auteurs et autrices : Markus Zimmermann (théologien, Université de Fribourg), Stefan Felder (économiste, Université de Bâle), Ursula Streckeisen (sociologue, HEP Berne) et Brigitte Tag (juriste, Université de Zurich)
Issu du colloque « Éthique de l'Accompagnement et Agir Coopératif », organisé à l'université de Tours en mai 2016, cet ouvrage propose à un ensemble de praticiens de l'accompagnement, issus de champs professionnels et d'espaces géographiques divers, de mettre en perspective les critères qui, dans le quotidien de l'exercice professionnel, sous-tendent une éthique de l'accompagnement. Chaque contributeur donne à voir la réalité la plus concrète des dispositifs conçus et mis en œuvre, avant d'en analyser les sources, les conditions, les effets. Les textes rassemblés dans cet ouvrage permettent ainsi, en partant de la réalité du terrain, d'interroger les dispositifs et pratiques d'accompagnement dans les domaines de la santé, du travail social et de la formation d'adultes.
Hervé Breton, maître de conférences en sciences de l'éducation à l'université de Tours.
Sébastien Pesce, professeur de sciences de l'éducation à l'université.
Parmi les auteurs de contributions, Daniel Lambelet, de la Haute école de travail social et de la santé · EESP · Lausanne
Lire aussi, de Daniel Lambelet : « Sortir de prison et s’en sortir : une double peine », 2016, et «La probation a-t-elle encore besoin des travailleurs sociaux ?», 2014, REISO, Revue d’information sociale
Addiction Suisse publie la cinquième édition de ce dossier média complet sur les thèmes : alcool, tabac, drogues illicites, médicaments, jeux d’argent et internet.
Que sait-on des divers marchés? Quelles sont les répercussions de la consommation d’alcool, de tabac et de drogues illégales ou encore des jeux d’argent sur la société? Quelles sont les tendances actuelles en matière de consommation de ces produits en Suisse? Qu’en est-il de la consommation de médicaments, de l’usage d’internet et du jeu excessif? Comment la société se positionne-t-elle face aux problèmes de dépendance? Comment protéger au mieux la santé des consommateurs et consommatrices? Le Panorama Suisse des Addictions répond à ces questions.
NDLR de REISO : une synthèse remarquable, un outil de référence important
Panorama 2019, 27 pages pdf
Qu’est-ce qui donne envie aux jeunes d’apprendre, de s’engager et de se mobiliser dans une activité ? Cette question intéresse en particulier les enseignants, mais aussi les employeurs. Afin d’y apporter des éléments de réponse, les auteures de cet ouvrage se sont intéressées à une population spécifique : des jeunes âgés de 16 à 25 ans qui ont librement choisi de s’engager dans des domaines associatifs aussi variés que le sport, la politique, l’environnement, l’humanitaire ou l’événementiel.
Se basant sur des entretiens, cette étude retrace le parcours bénévole d’une quarantaine de jeunes femmes et de jeunes hommes issus de toutes catégories sociales. Ils évoquent avec fierté les responsabilités qui leur ont très tôt été confiées dans un monde associatif structuré, souple et bienveillant. Leurs témoignages contribuent à mettre en visibilité les nombreux apprentissages et compétences que l’expérience bénévole leur a permis de développer.
Table ronde. Le jeudi 7 mars 2019 à 18h, vernissage et table ronde sur «Le bénévolat des jeunes» à l'Institut fédéral des hautes études en formation professionnelle IFFP, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens, 4ème étage, salle 112-114. En savoir plus
Les questions sont celles que les proches de personnes en situation de handicap posent lors des consultations en ligne de Procheconnect. Les réponses sont données par les spécialistes de Pro Infirmis Vaud.
De nombreuses informations sont disponibles sur cette page qui rassemble les questions concrètes posées par les proches de personnes en situation de handicap, avec des réponses concrètes elles aussi. Au sommaire :
Aider un proche et travailler
Santé de mon proche : mon rôle, mes droits
Avantages et réductions quand on s'occupe d'un proche handicapé
Cette rubrique s'enrichira au fil des prochains évènements en ligne et grâce aux interventions en direct des proches.
«À MA SANTÉ!» La nouvelle campagne de Dialogai veut prendre soin de la santé globale des gays. Avec de nombreuses actions et des ateliers.
Du 1er au 27 février 2019, Dialogai va à la rencontre des hommes gays pour leur parler santé et bien-être psychique. Que ce soit pour le grand public ou même les associations, la santé des hommes ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes est trop souvent cantonnée au VIH ou aux IST. Et pourtant d'autres questions telles que le mal-être, l'anxiété, la dépression, la santé psychique ont des conséquences lourdes à long terme sur la santé globale des hommes gays.
L’enquête santé gaie de Dialogai en 2002 a été l'une des premières recherches dans le monde à avoir mis en évidence le mauvais état de santé psychique des hommes gays et bisexuels. Toutes les recherches réalisées depuis sur la santé des hommes gays ont confirmé qu’ils sont particulièrement touchés par des problèmes de santé psychique comme les troubles anxieux, la dépression et l’abus de substances et qu’ils sont également à plus haut risque de suicide que les hommes de la population générale.
Durant le mois de février 2019, Dialogai organise des ateliers en lien avec les sites de rencontre, des coachings de santé mentale ou encore des ateliers ludiques et participatifs. En parallèle, des actions dans des bars et des saunas gays présenteront la campagne. Toutes les activités prévues sont gratuites et sans inscription. Suivre aussi le hashtag #dialogaiàmasanté.
La campagne est soutenue par Sidaide, l'Aide suisse contre le sida et l'Etat de Genève
Recension par Jean Martin, médecin de santé publique et bioéthicien
L’auteure a étudié les croyances et les pratiques en rapport avec la santé et la maladie des enfants en Mauritanie, principalement dans la capitale Nouakchott. Il importe de savoir que « la pluralité culturelle des enfances tient à la diversité de la société, composée de Maures et de populations dites négro-mauritaniennes - pulaar » (d’origine notamment sénégalaise).
« Autour des trajectoires de maladie de quelques enfants, nous avons exploré les configurations familiales, les représentations des maladies et les logiques interprétatives. » Hélène Kane documente remarquablement parcours, croyances, différences et inégalités, au travers de vignettes de la vie - parfois de la mort - d’enfants et, notamment, de leurs mères. Confrontations aux multiples dimensions de la maladie, aux problèmes de relation avec les professionnels - le dialogue n’étant trop souvent ni empathique ni à égalité. « Les jeunes mères sont aux prises avec des faisceaux de normes exigeantes et parfois contradictoires. » S’ajoutent les complexités administratives et difficultés d’accès - qui pourraient être levées par des apports financiers additionnels dont un grand nombre de familles ne disposent pas. On se souvient que des formes d’esclavage persistent en Mauritanie (malgré une quatrième abolition officielle, en 1980).
Travail d’une anthropologue, considérant la maladie comme un « fait social total », l’ouvrage va « au-delà de la mise à disposition de services géographiquement et économiquement accessibles. L’accessibilité sociale et cognitive est questionnée ». Relevons que, en principe, la santé publique devrait elle aussi avoir une telle vision holistique (J.M.).
Quelques éclairages. « Les systèmes de santé comportent parfois des violences : absence d’attention pour le soulagement de la douleur ou négligence. » Il y a « dépendance de la qualité des soins du statut social, affectif et décisionnel donné à l’enfant. » Ce qui n’étonnera en rien, étant une constante - à des degrés variables bien sûr - dans toutes les sociétés, même riches et relativement égalitaires. « La méfiance, l’impression que les coûts sont trop élevés, la critique et la comparaison avec les normes étrangères dominent les perceptions des Mauritaniens. » Intéressant : « Les enfants que nous avons rencontrés interviennent sur leur prise en charge par l’intermédiaire de sollicitations habiles et discrètes. Ils apprennent à moduler leurs plaintes. » A propos du sous-titre de l’ouvrage Taire et soigner : « La prudence face au pouvoir des mots traverse l’ensemble de la société mauritanienne. »
Facette ethnologique interpelante : « Les femmes pulaar participent à l’économie domestique par divers apports. Les femmes maures elles ne sont pas tenues de contribuer à l’entretien de leur famille ; les maris doivent assurer toutes les dépenses et tendent à présenter leurs femmes comme oisives et inconsistantes. Cela a pour corollaire une certaine déresponsabilisation des femmes. Un travail chez les Tamasheq (Touareg) du Mali constate une négligence comparable des femmes nobles, dans une société où elles accroissent leur prestige en travaillant le moins possible, y compris soins aux enfants. »
Anthropologie de la santé infantile en Mauritanie intéressera les professionnels de la santé et du social, aussi chez nous bien sûr dans la mesure où les patients provenant d’autres pays et cultures sont nombreux.
Avec ces cent mots, pour une profession longtemps restée sans mots, Philippe Gaberan parle de pratiques éducatives, dans un langage simple, mais non simpliste. En analysant ce qui se trame entre Soi et l’Autre, entre l’éducateur et la personne accompagnée, il fait le lien entre les actes posés au quotidien et le sens que ceux-ci prennent au regard des objectifs éducatifs.
Au-delà des définitions, ce dictionnaire jette un pont entre l’apparente banalité des gestes quotidiens et leur fondamentale répercussion sur le développement de l’être. Il n’est pas à laisser dans la bibliothèque mais à intégrer dans la trousse à outils que tout professionnel devrait avoir à porter de main, comme tout artisan qui se respecte.
Car le métier d’éducateur relève d’un savoir faire dont la complexité n’est pas toujours bien perçue parce que souvent trop mal exprimée.
Philippe Gaberan, éducateur spécialisé, formateur et chercheur en travail social à l’ADEA de Bourg-en-Bresse.
A l’heure où, selon les statistiques, une personne sur quatre en Suisse est susceptible de faire un passage en institution psychiatrique au cours de sa vie, un livre lève le voile sur ce type d’établissement, lieu tabou par excellence dans l’imaginaire collectif…
Cet ouvrage décrit l’hôpital psychiatrique de Marsens (FR) depuis son ouverture jusqu’à ce jour. L’institution y parle d’elle-même par la voix de plusieurs médecins-directeurs qui s’y sont succédé, et la vie de l’hôpital se déroule au fil de son siècle et demi d’histoire. L’on y découvre les pratiques et thérapies utilisées pour soigner les troubles psychiques, et l’esprit dans lequel elles s’exercent – ou se sont exercées. Des soignants et thérapeutes décrivent leur mise en œuvre, et leur ressenti en les appliquant. Mais l’histoire serait incomplète sans la parole donnée à ceux qui sont la raison même de l’existence de l’hôpital: les patients. Une large place est donnée à leurs témoignages dans les deux derniers chapitres du livre. On l’aura compris, il ne s’agit pas d’un énième ouvrage savant traitant de la psychiatrie, mais bien de la mise en lumière d’un type d’hôpital public, dont il est légitime de rappeler qu’il n’est la propriété ni des politiciens ni des psychiatres, mais bien celle de nous tous, citoyens.
Un nouveau portail présente une quarantaine de vidéos de quelques minutes pour raconter la vie quotidienne des participants et des professionnels de l’atelier Galiffe qui accueille des «fragilités psychiques et des solitudes urbaines» à Genève. Il est coordonné par Camille Bierens de Haan.
Ce portail est le résultat d’un projet de film pour garder la mémoire du lieu – car le chantier d’extension de la gare Cornavin va bouleverser le quartier durablement dès 2024 – pour célébrer une pratique professionnelle et une option institutionnelle particulières, et pour mettre en valeur des personnalités ignorées de la chronique sociale.
Plutôt que fabriquer un produit fini à distribuer à des consommateurs, ce projet cherche à intéresser et animer un réseau de personnes concernées par l’accueil de la fragilité psychique et de la solitude urbaine. Une page FaceBook liée attend vos commentaires et suggestions. Le portail est appelé à évoluer au fur et à mesure de la publication de nouvelles vidéos.
Les vidéos croisent les regards, les apports et les témoignages. Chaque fois introduites par un texte, clairement classées, avec une indication du minutage, elles représentent un matériel didactique potentiellement utile pour l'enseignement. Ses contenus sont disponibles en libre accès sur internet.
La première projection publique-discussion autour de Gens de Galiffe aura lieu le mercredi 16 janvier à 19h à Fonction Cinéma, Maison des Arts du Grütli, à Genève. La projection durera environ 45 minutes et les discussions suivront. Veuillez annoncer votre présence :
Les Collectifs romands publient le «Manifeste pour une grève féministe et des femmes» qui sera organisée le 14 juin 2019.
La grève des femmes de 1991 avait surpris tout le monde. Un immense élan vers l’égalité avait secoué le pays: nous avons depuis lors obtenu des résultats concrets comme une Loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes, un congé maternité, le splitting et le bonus éducatif dans l’AVS, la solution dite des délais en matière d’avortement, des mesures de lutte contre les violences domestiques.
Aujourd’hui, nous avons besoin d’un nouvel élan ! Le 22 septembre 2018, 20’000 personnes solidaires ont manifesté à Berne pour l’égalité et contre les discriminations. Le début d’une mobilisation que nous voulons poursuivre jusqu’à la grève féministe et des femmes* le 14 juin 2019 !
Le Manifeste présente 19 raisons, parmi d’autres, de la grève :
Le magazine Diagonales du Groupe d’accueil et d’action psychiatrique (GRAAP) a consacré un article élogieux à la revue REISO qui vient de fêter sa première décennie.
A l’occasion des dix ans de la Revue d’information sociale REISO, le magazine du GRAAP-Fondation revient avec sa rédactrice en chef Marylou Rey sur cette aventure interdisciplinaire qualifiée d’avant-gardiste.
L’article d’Alexandre Mariéthoz raconte les origines, les options rédactionnelles et le lectorat de la revue en ligne. L’indépendance de la rédaction est assurée notamment par le fait que la revue est autofinancée et gérée par une association à but non lucratif, une situation fort rare dans les médias romands. Les ressources financières proviennent des abonnés, en provenance de toute la Suisse romande, et des annonceurs qui présentent sur le site leurs formations continues, leurs offres d’emploi ou leurs événements. Quant à l’objectif éditorial, il consiste à amener les lecteurs et lectrices à s’ouvrir aux réflexions des uns et des autres pour s’interroger différemment sur des problématiques actuelles du domaine social et de la santé publique.
«REISO a pleinement trouvé sa place dans le paysage médiatique romand», conclut le journaliste.
Diagonales est le magazine romand de santé mentale édité par le Graap-Fondation (lien internet). Bimestriel, il s’adresse à l’ensemble des personnes concernées par cette thématique en Suisse romande, aussi bien les personnes vivant avec la maladie psychique que les proches, les professionnels de la santé ou du domaine social, les autorités, les professeurs, les étudiants et les simples curieux.
Les douleurs chroniques et rebelles aux traitements classiques minent, parfois gravement, le quotidien d’environ 20% de la population. Le fait que ces douleurs « ne se voient pas » lors des examens médicaux joue en défaveur des individus touchés qui ne se sentent pas toujours pris au sérieux dans leur souffrance. Elles n’ont pourtant rien d’imaginaire. On sait maintenant qu’elles sont liées à des dérèglements des systèmes de contrôle de la douleur.
Heureusement, l’amélioration de la qualité de vie des personnes endurant des douleurs persistantes est possible. Elle repose sur un engagement actif et une prise en charge globale combinant plusieurs approches: médicamenteuses, physiques, psychologiques et sociales.
Comment éviter que les douleurs ne prennent toute la place? Quel est le rôle des émotions dans les symptômes? Comment contrôler soi-même ses douleurs? Ce livre fournit des clés de compréhension, utiles également pour les proches aidants. Il propose une série d’outils pour mieux gérer ces douleurs complexes et redevenir le pilote de sa vie.
Suzy Soumaille, journaliste médicale, rédactrice en chef du magazine Pulsations , HUG
Dre Valérie Piguet, responsable du Centre multidisciplinaire d’évaluation et de traitement de la douleur, HUG
Vingt-huit mesures de promotion de la santé mentale seront soutenues par l’Etat de Fribourg et Promotion santé suisse pour plus de 2 millions de francs entre 2019 et 2021. La démarche systémique ayant conduit à la définition du programme est inédite.
Défini de manière participative et reposant sur un état des lieux de l’existant, le Programme cantonal de promotion de la santé mentale s’intègre à la Stratégie de promotion de la santé et de prévention (Perspectives 2030). Il répertorie les politiques publiques en lien avec la thématique et détaille l’implication des nombreux partenaires qui œuvrent déjà à la promotion de la santé mentale dans le canton.
Les objectifs du programme sont de sensibiliser les enfants, jeunes, seniors, leurs proches et les professionnels à l’importance de la santé mentale, de faciliter l’accès à des offres socio-sanitaires et de favoriser le renforcement des ressources et la participation. Chaque année entre 2019 et 2021, les mesures représenteront 563’000 francs pour les enfants et jeunes et 158’000 francs pour les senior-e-s. Promotion santé suisse participe à ces montants avec 179’000 francs par année.
Parmi les vingt-huit mesures figurent des prestations pour les enfants victimes de violence au sein du couple, l’accompagnement d’enfants ou de familles en deuil, les permanences sociales de rue, un projet de cohabitation entre personne âgée et jeune, un système de veille pour les senior-e-s fragilisé-e-s, la formation des professionnel-le-s ou encore le soutien aux parents lors d’une séparation.
Les auteures du rapport (Service de la santé publique) :
Lire aussi, sur la campagne nationale pour la santé mentale, l’article de Stéphanie Romanens-Pythoud et Alexandre Mariéthoz, «La santé mentale, ça s’entretient aussi!», REISO, Revue d'information sociale, mis en ligne le 4 janvier 2019
Présentation par Jean Martin, médecin de santé publique et bio-éthicien
L’historien et écrivain israélien Harari publie son troisième livre. Après sa brève histoire de l’humanité et sa brève histoire du futur, il présente sa vision des facteurs qui marqueront le siècle commençant. Il évalue ce que sont les forces qui formatent la réalité et présente les attitudes et orientations qu’il s’agit de privilégier. Comme les ouvrages précédents «Sapiens» et «Homo Deus», cette lecture est stimulante. Cinq parties : le défi technologique, le défi politique, désespoir et espoir, vérité, résilience. Et 21 chapitres pour 21 leçons.
L’auteur attaque frontalement la notion - jusqu’ici jugée quasi indiscutable - de l’homo economicus rationnel : « La pensée libérale a acquis une confiance immense dans l’individu rationnel indépendant et a fait de cette créature mythique la base de la société. La démocratie se fonde sur l’idée que l’électeur sait à quoi s’en tenir ; le capitalisme de marché croit que le client a toujours raison et l’enseignement libéral que les étudiants pensent par eux-mêmes. Or, des penseurs ont fait observer que cet individu rationnel pourrait bien être une chimère. On a démontré que la plupart des décisions humaines reposent sur des réactions émotionnelles et des raccourcis heuristiques. »
« Le libéralisme n’a pas de réponses évidentes aux plus gros problèmes : l’effondrement écologique et la disruption technologique. Il s’en remet à la croissance pour résoudre, comme par magie, des conflits politiques et sociaux épineux. Toutefois, la croissance ne nous sauvera pas, elle est la cause de la crise écologique. »
« Le libéralisme perd sa crédibilité au moment où les révolutions jumelles de l’information et de la biotechnologie nous lancent les plus grands défis. Les algorithmes Big Data pourraient créer des dictatures digitales au pouvoir concentré entre les mains d’une minuscule élite. »
(In-)justice. « Les injustices du monde contemporain résultent pour la plupart de biais structurels de grande échelle. Ecrire ce livre me l’a fait comprendre, je cours toujours le risque de privilégier le point de vue de l’élite mondiale par rapport à celui de groupes désavantagés (…), qui sont confrontés chacun à un dédale différent de plafonds de verre, de doubles standards, d’insultes codées et de discrimination institutionnelle. » Le temps est venu d’élaborer un récit entièrement nouveau.
« Nous ne cherchons plus les infos, nous googlisons. Et plus nous le faisons, plus notre capacité de chercher des informations par nous-mêmes diminue. La ‘vérité’ se définit par les premiers résultats de la recherche Google. Il en va de même avec les capacités physiques, telles que se mouvoir dans l’espace. » Cependant, on peut attendre des progrès de l’utilisation de l’IA, par exemple dans le trafic : 42 des études récentes font penser que « le remplacement des conducteurs humains par des ordinateurs devrait réduire d’environ 90% le nombre de morts et de blessés sur la route »... Mais aussi : « Peut-être l’Etat devra-t-il intervenir pour édicter un code éthique qui s’imposerait à tous les véhicules autonomes. »
« Dans un nombre croissant de compétences, l’IA commence à nous surpasser. Mieux nous comprendrons les mécanismes qui sous-tendent émotions, désirs et choix, plus les ordinateurs excelleront dans l’analyse des comportements et la prédiction des décisions.» « La créativité oppose des obstacles difficiles à l’automation. A la longue néanmoins, aucun travail ne lui échappera totalement. Les artistes doivent s’y attendre. Si l’art se définit par des émotions humaines, que pourrait-il advenir le jour où des algorithmes seront capables de comprendre et manipuler les émotions mieux que Shakespeare ? »
Des logiciels permettront de détecter nos émotions. « Netflix, Amazon ou qui possède notre ‘algorithme TV’ connaitra notre type de personnalité et saura presser sur nos boutons émotionnels. Ces données leur permettront de nous choisir des films avec une mystérieuse précision - et peut-être de prendre pour nous les décisions importantes ; qu’étudier, où travailler et qui épouser. »
« Hommes et machines pourraient fusionner si complètement que les humains ne pourront survivre s’ils sont déconnectés du réseau. Ils seront connectés dès le ventre de leur mère. »
L’artificiel et le naturel ! « Il y a danger si nous investissons trop dans le développement de l’IA et trop peu dans celui de la conscience humaine. L’IA trop sophistiquée des ordinateurs pourrait simplement servir à amplifier la bêtise naturelle des humains. »
« Malgré l’apparition de nombreux emplois nouveaux, nous pourrons assister à l’essor d’une nouvelle classe ‘inutile’ et souffrir à la fois d’un chômage élevé et d’une pénurie de main-d’œuvre qualifiée. »
Les gens ordinaires perdraient leur valeur économique, les sociétés deviendront de plus en plus inégales. « Les riches et les aristocrates ont toujours imaginé posséder des talents supérieurs. Pour autant qu’on puisse le dire, ce n’était pas vrai. En 2100 cependant, les riches pourraient bien être réellement plus créatifs et intelligents, y compris par des cerveaux ‘améliorés’. Dans les pays capitalistes, l’élite pourrait saisir la première occasion pour démanteler ce qu’il reste de l’Etat-providence. »
Un revenu/soutien de base est-il la solution ? « Homo sapiens n’est simplement pas fabriqué pour être satisfait. Si le soutien de base universel vise à améliorer les conditions objectives de l’individu moyen en 2050, il a une bonne chance de réussir. S’il s’agit de rendre les gens subjectivement plus satisfaits de leur sort, probablement échouerait-il. Pour atteindre ses buts, le soutien universel devra être complété par des activités qui aient réellement du sens. »
Avec l’IA, « nous perdons certains avantages de l’individualité. Par exemple, un médecin qui commet une erreur ne tue pas tous les patients du monde et ne bloque pas la mise au point de tous les traitements. En revanche, si [la médecine] était un seul et même système et que celui-ci commette une erreur, les résultats pourraient être catastrophiques. »
« Beaucoup de médecins se concentrent sur le traitement de l’information (données dans les dossiers). Les généralistes, diagnostiquant des maladies connues et administrant des traitements familiers, seront probablement remplacés par des IA-médecins. Les infirmières quant à elles ont besoin de bonnes compétences motrices et émotionnelles. Aussi aurons-nous probablement une IA-médecin de famille sur nos smartphones avant d’avoir une infirmière-robot fiable. »
« Les gens bénéficieront des meilleurs services de santé mais probablement seront-ils tout le temps malades. Il y a toujours quelque chose qui ne va pas dans le corps. Autrefois, on se sentait en forme du moment qu’on ne présentait pas de douleur ou handicap. En 2050, grâce aux capteurs biométriques et aux algorithmes, on présentera sans cesse quelque ‘pathologie’. En refusant de suivre alors un traitement, vous pourriez perdre votre assurance-maladie, voire être licencié. »
« Le retour au nationalisme offre-t-il de vraies solutions aux problèmes sans précédent de notre monde globalisé ou s’agit-il d’une forme de dérobade complaisante ? » Une tentative d’échapper à une réalité inquiétante ? « Même si une planète unie continuera de faire une large place au genre de patriotisme célébrant le caractère unique de ma nation, l’humanité n’a guère d’autre choix que de compléter ces loyautés locales par des obligations substantielles envers une communauté mondiale. »
« Désormais, nous souffrons de problèmes mondiaux sans avoir de communauté mondiale. Ni Facebook, ni le nationalisme, ni la religion ne sont près de créer une communauté de ce genre. »
« Les technologies de rupture qui pourraient changer la nature même de l’humanité sont enchevêtrées avec des croyances éthiques et religieuses profondes. Si l’humanité ne parvient pas à concevoir des directives éthiques globalement acceptées, ce sera carte blanche au Dr Frankenstein (…) Après 4 milliards d’années d’évolution de la vie organique, la science entre dans l’ère de la vie inorganique façonnée par le dessein intelligent. »
« La plus grande menace est de loin la perspective du changement climatique. Comme si l’on menait une expérience illimitée sur des milliards de cobayes humains. A la différence de la guerre nucléaire – futur potentiel – le changement climatique est une réalité présente. Un consensus scientifique existe (…) Nous nous approchons rapidement de points de basculement (tipping points) au-delà desquels même une baisse spectaculaire des émissions de gaz à effet de serre ne suffira pas à éviter une tragédie mondiale. »
A garder en mémoire : « Autant il est difficile d’établir les priorités en temps réel, autant il est trop facile de dire rétrospectivement ce qu’elles auraient dû être. Nous accusons les dirigeants de n’avoir pas su empêcher les catastrophes qui se sont produites, tout en demeurant béatement inconscients de désastres qui ne se sont jamais matérialisés. »
« Les terroristes sont maîtres dans l’art de manipuler les esprits. Ils tuent très peu mais n’en réussissent pas moins à terrifier des milliards de gens et font trembler d’immenses appareils politiques (…) disproportion flagrante entre leur force effective et la peur qu’ils inspirent (…) Dans la plupart des cas, notre surréaction au terrorisme menace bien davantage notre sécurité que les terroristes eux-mêmes. »
Raisonnement intellectuellement cohérent, objectif, mais qui imagine pouvoir gommer les aspects émotionnels, liés notamment à l’imprévisibilité des actes terroristes. Nous savons qu’il faudrait leur accorder moins de visibilité, notamment médiatique, le fait est que ce n’est pas simple (droit à l’information).
Aujourd’hui, « donner plus d’informations à ses élèves est la dernière chose qu’ait besoin de faire un enseignant. Il faut plutôt leur apprendre à en dégager le sens, à distinguer l’important de l’insignifiant et surtout associer les multiples bribes en une vision d’ensemble du monde (…) Si la jeune génération manque d’une vision globale du cosmos, l’avenir de la vie se décidera au hasard. » L’important pour Harari est que les écoles passent à l’enseignement des quatre C : pensée critique, communication, collaboration et créativité.
« Pour me construire une identité viable et donner un sens à ma vie, je n’ai pas vraiment besoin d’un récit dépourvu d’angles morts et de contradictions. Il suffit qu’il satisfasse à deux conditions. La première est qu’il me donne un rôle à jouer, la seconde qu’il m’intègre à quelque chose qui me dépasse. Les récits qui ont le plus de succès demeurent ouverts. »
« Personne ou presque n’a qu’une identité. Personne n’est uniquement musulman, italien, ou capitaliste (…) Je peux me reconnaitre des obligations particulières envers ma nation tout en ayant d’autres identités – et responsabilités/devoirs. De temps en temps cependant apparait un credo fanatique exigeant de ne croire qu’à un seul récit et de n’avoir qu’une seule identité. »
Sur la laïcité. « Il s’agit d’une vision du monde positive et active, qui se définit par un code de valeurs cohérent plutôt que par l’opposition à telle ou telle religion. Certaines sectes revendiquent le monopole de la sagesse et de la bonté, les laïques ne revendiquent aucun monopole de cette nature. Ils sont à l’aise avec des identités hybrides et multiples. » « Les hommes devraient toujours garder la liberté de douter, de vérifier, d’entendre une seconde opinion ou d’essayer une autre voie. »
Le dernier chapitre est consacré à l‘importance qu’a eu pour lui à 24 ans, en 2000, la découverte de la méditation (de type Vipassana), qu’il pratique maintenant deux heures par jour et dont il affirme que cela a été un pilier fort dans l’écriture de ses livres.
« La méditation est un outil pour observer directement l’esprit, l’explorer. Loin de moi l’idée de suggérer d’abandonner les pratiques et outils [scientifiques] de la recherche sur le cerveau. La méditation ne les remplace pas mais elle pourrait les compléter. Cela fait penser aux ingénieurs creusant un tunnel à travers une montagne. Pourquoi creuser d’un seul côté ? Mieux vaut creuser des deux. Si le cerveau et l’esprit sont une seule et même chose, les deux tunnels ne peuvent que se rejoindre. »
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« Les révolutions de la biotech et de l’infotech vont nous permettre de dominer le monde en nous, mais aussi de remanier ou fabriquer la vie. Personne ne sait avec quelles conséquences. Les humains ont toujours excellé à inventer des outils, beaucoup moins à en faire un usage avisé. » Appréciation qu’il n’est pas le seul à émettre…
Le but de cette recension était de traiter des facettes significatives des positions de Harari. Je n’ai pas abordé ses réflexions, entre autres, sur Dieu, les religions et leurs rôles aux cours de l’histoire comme aujourd’hui, sur l’immigration, sur la post-vérité et les fake news (dont il relève que si elles sont très présentes actuellement, elles ont toujours existé), ou encore sur la science-fiction qui serait à son sens, « au début du XXIe siècle, peut-être le genre artistique le plus important ».
Bonne lecture !
«21 leçons pour le XXIe siècle», Yuval Noah Harari, Paris : Albin Michel, 2018, 375 pages
L'association Première Ligne active dans la réduction des risques liés aux consommations de drogues a mandaté la Haute école de travail social de Genève pour réaliser une étude sur la situation sociale et économique des personnes usagères du Quai 9.
La situation sanitaire des personnes concernées fait l'objet d'une abondante littérature. Leur situation sociale et économique est en revanche très peu documentée. Recueillir un nombre important de données sur des dimensions parfois intimes liées à leur situation a représenté le principal enjeu de cette étude. C'est par immersion et en étroite concertation avec la direction et les professionnel·le·s de l'association que les chercheur·e·s ont travaillé pour établir une relation de confiance.
Quatre types socioéconomiques ont été distingués: les personnes intégrées, précaires, vulnérables et désaffiliées. Malgré leurs situations fort différentes, tous les usagers et usagères valorisent les soutiens sanitaires et sociaux proposés.
Un résumé de l'étude a été publié dans le journal de Première Ligne, avec des témoignages qui montrent combien la rencontre et le lien permettent parfois d'entrevoir de nouvelles perspectives de vie.
Auteur·e·s: Laurent Wicht, professeur associé, Laure Scalambrin, adjointe scientifique, Jérôme Mabilallard, collaborateur scientifique, Centre de recherche sociale, HETS Genève, Journal Première ligne N° 30, décembre 2018